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Centenaire du PCF, au jour le jour : L'Humanité du jeudi 28 octobre 1920

L'Humanité, journal socialiste quotidien

À partir du site internet Gallica, de la Bibliothèque nationale de France

 

L'Humanité du jeudi 28 octobre 1920

 

 

COURTE RÉPONSE - par Jean LONGUET

J'avais apporté aux lecteurs de l'Humanité un ensemble de faits et de chiffres sur la situation du socialisme allemand, au lendemain du Congrès de Halle, non pas rédigé de chic, mais résultat de mes observations sur les lieux. Je n'avais engagé aucune polémique injurieuse contre n'importe quel militant.

Varine me répond dans un article, dont le titre (le Mensonge de l'Unité) comme le texte est un véritable défi à la mémoire du fondateur de ce journal, de l'homme dont toute la carrière socialiste fut un long combat unitaire.

Je n'ai pas la moindre intention de poursuivre une polémique quelconque avec le citoyen Varine, qui prend avantage des persécutions gouvernementales dont il souffre, pour s'ériger en censeur atrabilaire et injurieux de tous les socialistes qui ne pensent pas comme lui.

J'ai mieux à faire. Je ne relèverai donc pas son appréciation sur mes articles du Bonnet Rouge : elle est du même acabit que celles de M. Léon Daudet, quoique en sens inverse.

Mais je ne puis cependant laisser dire par le citoyen Varine, que j'ai, par une seule phrase, par un seul mot de mon article, « diffamé des communistes allemands » ou « exploité (!) l'assassinat » de mon vieil et cher ami Karl Liebknecht ou de Rosa Luxembourg, etc., pour « reprocher aux communistes de manquer de chefs », voire pour les traiter avec « insolence » (!)

À cette monstrueuse déformation de ce que j'ai écrit, il me suffira d'opposer le jugement de tous les lecteurs de l'Humanité qui auront bien voulu lire mon article, et qui auront pu constater que je n'ai pas écrit une ligne sur le parti communiste (ou spartakiste), toute mon étude étant consacrée aux socialistes indépendants. De ceux-ci, les seuls qui aient été assassinés par la bourgeoisie et la réaction, sont des camarades dits « de droite » - Kurt Eisner et Hugo Haase.

Quant au camarade Daumig, dont j'ai proclamé la sincérité, mon appréciation sur lui est infiniment plus bienveillante que celle de Lenine proclamant, il y moins d'un an « qu'il était pour la classe ouvrière plus dangereux que Scheidemann ».

Jean LONGUET

 

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WRANGEL et l'Alliance franco-russe

M. de Martel, haut commissaire de la République française en Crimée, a été reçu le 20 octobre par le général Wrangel, auquel il a adressé l'allocution suivante :

En me chargeant de représenter la République française auprès de Votre Excellence, mon gouvernement a eu pour but de relever l'importance qu'il attache à l'amitié et à l'alliance franco-russe traditionnelles.

La France n'oublie pas l'assistance puissante que lui ont donnée les Russes au moment de l'invasion allemande. Elle sait que la responsabilité de la paix de Brest-Litovsk ne doit être imputée qu'à une infime minorité de traîtres. La France ne traitera jamais avec les bolcheviks qui se sont mis hors les lois internationales, et se range résolument du côté des partisans de l'ordre, de la liberté et de la Justice.

C'est pour cette raison qu'elle salue votre gouvernement démocratique qui respecte les minorités nationales et s'appuie sur une armée nationale.

Bien que la guerre lui ait causé d'énormes dommages, la France, n'en a pas moins décidé de vous accorder un plein et entier appui moral et toute l'aide matérielle possible. Vous connaissez déjà l'attitude prise par M. Millerand envers la Russie, ainsi que les paroles prononcées à ce sujet au Parlement par M. Leygues.

Je me fais l'interprète de mon gouvernement en me déclarant prêt, comme ami du peuple russe, à accorder à Votre Excellence ma cordiale collaboration et mon aide sincère.

J'ai tenu à reproduire ici le texte complet du salut du représentant de la France à Wrangel.

Il contient un aveu précieux :

L'alliance avec Wrangel, c'est « l'alliance franco-russe traditionnelle ». On ne saurait mieux reconnaitre que Wrangel reprend la politique des tsars, et que le gouvernement français, au lendemain du conflit, dont une des plus grosses parts de responsabilité incombe à la Russie tsariste, nie la Revolution, méprise la démocratie russe, et revient à l'alliance de M. Poincaré avec Nicolas II.

Wrangel, c'est « l'ordre, la liberté, la justice » !

Chacun de ces mots est une ironie sanglante. Et M. de Martel a seulement oublié d'ajouter qu'en Crimée, et dans les régions libérées par le général balte, il s'agit de l'ordre… capitaliste, de la liberté… des spéculateurs et des mercantis et de la justice… des pourvoyeurs de gibet.

Le « gouvernement démocratique » de Crimée, tout le monde sait que c'est la dictature des propriétaires et des banquiers de l'ancien régime, que c'est la démocratie telle que la peuvent comprendre et pratiquer les Krivocheïne, les Choulquine et tous les ex-fidèles serviteurs de l'absolutisme tsariste qui grouillent à la cour de Sébastopol.

C'est à cet homme et à ce gouvernement que la France a décidé d'accorder « toute l'aide matérielle possible ».

Qu'en dites-vous, ouvriers français ? Quand déciderez-vous à votre tour de vous accorder pour refuser cette aide matérielle à l'assassin des libertés russes ?

Le prolétariat britannique, qui ne se laisse pas absorber tout entier: par le conflit entre socialistes sur l'Internationale, n'oublie pas un instant qu'il est en conflit permanent avec sa propre bourgeoisie, et il a su obtenir la non reconnaissance de Wrangel. Il vous donne une salutaire leçon.

L'alliance Wrangel-Millerand est un double défi aux prolétaires de France et de Russie. Serons-nous capables de relever ce défi, si nous perdons l'union qui, quoi qu'on en dise fait la force ? Et mériterons-nous la reconnaissance, je ne dis pas du gouvernement de Moscou, mais des simples prolétaires russes si nos divisions nous paralysent, nous empêchent de leur porter l'assistance immédiate qu'ils réclament, et nous condamnent à de longs mois d'impuissance ?

André PIERRE.

 

Les États-Unis vont-ils reconnaître Wrangel ?

D'après Les dernières Nouvelles russes, le représentant des États-Unis, l'amiral Mack, vient d'être appelé par son gouvernement à Constantinople, pour recevoir télégraphiquement des instructions sur l'attitude à adopter envers le gouvernement du sud de la Russie. Dans les milieux autorisés on attache à ce fait une importance, considérable.

 

On découvre une organisation russe en Lettonie

Riga, 27 octobre. - On a découvert en Lettonie une organisation formée pour aider le général Wrangel. Cette organisation envoyait par Memel des soldats en Crimée, sous prétexte d'y envoyer des ouvriers. Ces révélations ont amené la démission du chef d'état-major de l'armée lettone. Une crise ministérielle est probable. - (Radio.)

 

Moscou décrète la guerre à outrance

Varsovie, 27 octobre. - Le journal Pravda de Moscou confirme que le Congrès des Soviets, à Moscou, a voté à une majorité de 4/5 de voix la continuation de la guerre contre Wrangel et Petlioura. « Toutes les nouvelles de cessation d'hostilités sur ce front sont donc, ajoute l'organe officiel, dénuées de tout fondement ».- (Radio.)

 

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Chez les Indépendants de droite

Berlin, 20 octobre. - (Par lettre, de notre correspondant particulier.) - Les indépendants de droite, se sont réunis dimanche matin dans un bâtiment du Jardin zoologique de Halle.

Un appel a été lancé aux membres du Parti indépendant pour exposer les principes du Parti :

« Nous maintenons notre programme d'action de Leipzig. Nous nous efforcerons par tous les moyens de conquérir le pouvoir politique et de nous y maintenir par la dictature du prolétariat ; nous continuons la lutte contre les socialistes de droite et leur politique de réformisme et de coalition avec les partis bourgeois et le patronat, mais nous refusons d'exciter les ouvriers à de nouvelles émeutes, avec des mots d'ordre changeant tous les jours, et à éveiller en eux des illusions irréalisables en les trompant sur le véritable rapport des forces. Le prolétariat soutient en Allemagne un combat dur et difficile contre un. adversaire bien organisé et puissant qui s'oppose à lui avec cohésion. Les ouvriers ne peuvent Vaincre que s'ils sont eux-mêmes unis, non pas par des bureaux d'organisation ou des formules subtiles, mais par la lutte révolutionnaire pour des buts imposés à lui par sa situation et sa conscience de classe. »

Le prolétariat doit donc être mené ou combat pour des buts concrets qui lui apportent un accroissement de ses forces et dont l'objet soit toujours la réalisation du socialisme. Nous demandons des actions de masse immédiates pour la socialisation des principales branches d'industries, en commençant par les mines ; nous .demandons que les droits des Conseils d'exploitation soient élargis jusqu'à un droit de contrôle sur la production. Il doit être interdit d'arrêter les usines ; elles doivent travailler à la production des objets nécessaires à la consommation des masses. Des chantiers doivent être ouverts pour remédier au chômage. Nos représentants dans les communes doivent faire une politique de municipalisation énergique et particulièrement pour la question des logements, qu'on résoudra par la socialisation des industries du bâtiment et des forêts. Nous exigeons une élévation immédiate des impôts sur le capital et la propriété, et la rénovation de la politique financière par la socialisation des principales branches de production.

« Nous demandons des pensions suffisantes pour les vieillards, les invalides de la guerre et du travail.

« Ces buts sont pour le prolétariat une question de force ; ils ne seront pas atteints par des décisions parlementaires. Toute la puissance politique et économique de la classe ouvrière doit y être employée et c'est pourquoi toutes les organisations économiques des travailleurs doivent être animées de l'esprit révolutionnaire. Les représentants du Parti dans les syndicats, les conseils d'exploitation, doivent combattre sans relâche la politique de collaboration avec le patronat. Les syndicats et. conseils d'exploitation doivent se considérer avant tout comme des organisations pour la réalisation du socialisme. C'est pourquoi nous désirons la transformation des syndicats en organisations d'industrie et nous nous refusons. absolument à leur division et à leur scission d'après un principe national ou international. »

 

Le discours de Hilferding

Hilferding, au cours de la séance, a prononcé un discours où il a fait une distinction entre le marxisme scientifique et le bolchevisme qui lui apparaît comme un système de politique de force opportuniste.

« Sa méthode consiste à faire d'une partie du prolétariat une troupe d'assaut pour la politique de Moscou en faisant appel aux plus mauvais instincts des éléments les plus arriérés, et en séparant les masses de leurs hommes de confiance. Cette méthode n'est pas moins déplorable si on la considère du point de vue international. Le plus grand intérêt révolutionnaire du prolétariat mondial est que le prolétariat russe puisse maintenir sa domination et ne succombe pas à la contre-révolution. Personne n'a fait plus de tort à cet intérêt révolutionnaire que les communistes russes en introduisant la division dans la classe ouvrière des pays européens qui lui viennent en aide. C'est le plus grand des crimes contre le mouvement ouvrier russe.

« Le discours de Longuet nous a donné l'espérance de pouvoir nous rencontrer bientôt avec les socialistes de France, d'Angleterre, d'Amérique, de Suisse, d'Autriche et des autres pays qui, comme nous, veulent se réunir à la IIIe Internationale, afin de nous entendre sur les possibilités de Cette réunion.

« Cette conférence sera le noyau de la réunion ultérieure du prolétariat d'Occident avec le prolétariat d'Orient. Nous aurons alors un terrain solide pour fonder une véritable Internationale révolutionnaire d'action.

II est compréhensible que dans la situation économique où nous sommes, les masses ne croient pouvoir s'affranchir que par des solutions radicales. C'est une crise morale inévitable et par où le prolétariat doit passer pour recouvrer sa santé. Ce qui nous a empêché jusqu'ici de faire une politique conséquente c'est que dans chaque action, nos camarades nous tombaient dans le dos. Mais aujourd'hui nous sommes libres et nous voulons unir le prolétariat dans la lutte pour des buts concrets, buts qui devront être poursuivis par toutes les organisations prolétariennes, que leurs chefs le veuillent ou non.

« Nous savons très bien que ces socialisations partielles ne sont pas encore la réalisation du socialisme, mais nous savons aussi que dans cette lutte nous avons affaire à un front bourgeois compact et qu'elle est le point de départ d'une grande lutte finale qui doit être conduite jusqu'à la conquête du pouvoir politique.

« Nous ne nous imaginons pas que même ces actions partielles puissent aboutir par les moyens parlementaires ; nous savons qu'elles ne réussiront que par les actions de masses du prolétariat. Nous voulons conduire le prolétariat dans ses actions de masses pour qu'il cesse de se déchirer autour de formules abstraites. Ces luttes sont également nécessaires pour démasquer le réformisme qui a relevé la tête dans ses derniers temps.

« Les communistes vivent de la démoralisation apportée par la guerre. Nous autres, vivons de la certitude que l'évolution historique est pour nous et que le prolétariat se sentira capable, dès que les effets désastreux de la guerre seront passés, de vaincre le capitalisme par le seul fait qu'il se montrera plus capable moralement et intellectuellement que la bourgeoisie. Nous vivons de la raison qui s'épanouit ; ils meurent d'une illusion qui agonise. - F. CAUSSY.

 

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PARTI SOCIALISTE (S. F. I. O.)

Commission administrative permanente

REUNION MIXTE DU MARDI 19 OCTOBRE 1920

Étaient présents : BLoch, Bracke, Bureau, Frossard, Grandvallet, Le Trocquer, Maurin, Mayeras, Méric, Poisson, Paul Louis, Rappoport, Renaudel, Ribaut, Tommasi, titulaires ; citoyenne Kauffmann, Klemczynski, Lévy, Morizet, Marianne Rauze, suppléants.

Assistaient à la séance : Bretin, délégué permanent ; Rochereuil de la C.E. de la Seine.

La réunion a été convoquée à la demande de la CGT pour examiner avec la C.A. de cette organisation la proposition d action commune qui lui a été faite par le Parti en faveur de la Révolution russe. Les membres de la C.A., de la C.G.T. sont présents. Le citoyen Bidegaray préside.

Frossard au nom du Parti, Jouhaux et Dumoulin, au nom de la C.G.T. font un bref exposé des échanges de vues qui ont eu lieu sur la question dans leurs organisations respectives. Frossard donne lecture de la déclaration qu'il est autorisé à faire sur la politique syndicale du Parti. Une discussion s'établit ensuite à laquelle prennent part : Jouhaux, Dumoulin, Bourderon, Lenoir, Digat, Savole, Perrot pour la C.A. de la C.G.T. ; Frossard, Bracke, Mayeras, Renaudel, Méric, Rappoport pour la C.A.P. du Parti. Elle aboutit aux constatations suivantes :

1° Les deux commissions sont d'accord sur la nécessité d'une action intensifiée en faveur de la Révolution russe. Cette action devrait se proposer le rétablissement des relations politiques et économiques, la paix avec les Soviets et la levée du blocus.

2° La C.A. de la C.G.T. estime insuffisante la déclaration lue par Frossard. Elle considère que cette déclaration doit être complétée par la condamnation formelle de toute action de division ouvrière (constitution de noyaux communistes dans les syndicats).

La C.A.P. examinera dans une réunion particulière la réponse qu'elle juge devoir faire à la demande de précisions nouvelles qui lui est faite par la C.G.T.

Le secrétaire : L.-O. FROSSARD.

 

Centenaire du PCF, au jour le jour : L'Humanité du jeudi 28 octobre 1920

 

le 27 octobre 2020

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« Le bonheur est une idée neuve en Europe. » Saint-Just (révolutionnaire français, 1767-1794)