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Centenaire du PCF, au jour le jour : L'Humanité du mercredi 22 décembre 1920

L'Humanité, journal socialiste quotidien

À partir du site internet Gallica, de la Bibliothèque nationale de France

 

L'Humanité du mercredi 22 décembre 1920

 

 

La douche écossaise - par Raoul Verfeuil

Le Parti est soumis depuis quelques temps au régime de la douche écossaise. Vous connaissez cette douche : un jet d'eau froide, un jet d'eau chaude. Ça fait les nerfs, paraît-il. Le jet d'eau froide était venu avec les 21 conditions et le Parti avait désagréablement frissonné. On ne reçoit pas, ainsi sans broncher, pareille avalanche de liquide glacé. Un peu partout, des militants s'insurgeaient, qui ne furent jamais ni des « réformistes » ni des « jusqu'auboutistes » et qui étaient et restent, d'ailleurs, quoi qu'on puisse prétendre, partisans de l'adhésion à la IIIe Internationale.

Les neuf conditions, avec les réserves formulées par Daniel Renoult dans son article de l’Humanité, passe encore !

Les 21, ça n'allait plus du tout. Le jet était un peu trop fort et un peu trop froid.

Vint alors la motion Cachin-Frossard, rédigée en collaboration avec le Comité de la IIIe ou la motion du Comité de la IIIe rédigée en collaboration avec Cachin-Frossard.

C'était un jet d'eau chaude. Sauf deux ou trois points secondaires, elle pouvait être acceptée par tous ceux qui désirent sincèrement entrer dans l'Internationale communiste. Les 21 conditions étaient noyées dans un amas de littérature sous lequel on ne les reconnaissait plus. Ce n'était plus le vitriol moscovite : c'était la vaseline parisienne. Les principales réserves formulées par nous s'y trouvaient : pas d'exclusions, pas de subordination des syndicats, pas de changement de titre du Parti. C'était la motion de la Corrèze revue, corrigée, allongée et aggravée, mais c'était la motion de la Corrèze tout de même… jusqu'à l'appendice.

Car la motion Cachin–Frossard offre cette particularité qu'elle comporte un appendice. Ce sont les « décisions ».

Représentation proportionnelle supprimée dans les organismes centraux ; Comité directeur parisien muni de pouvoirs dictatoriaux ; Commission inquisitoriale des conflits, c'est cela qu'on voit dans ces fameuses décision.

L'eau froide après l'eau chaude ! Nous sommes un certain nombre qui avons, de nouveau, frissonné.

Sur ce, le Congrès fédéral de la Seine se réunit. Daniel Renoult fait connaître le procès-verbal de son entrevue avec Zinoview. C'est une brèche dans les « décisions » de la motion Cachin-Frossard, puisque Zinoview consent à une représentation de la minorité « dans les organismes directeurs du Parti et de l’Humanité ».

Quinze jours après, Frossard confirme et semble même élargir les concessions de Zinoview par une déclaration qu'il est utile de rappeler :

Je monte à la tribune pour l'accomplissement d'un devoir qui m'est pénible et je le fais à une heure où mes déclarations ne peuvent pas apparaître comme une manœuvre de Congrès. Depuis trois mois, sans cheminements souterrains, par une propagande ouverte et loyale, je m'efforce d'orienter le Parti socialiste vers la IIIe Internationale. Mais cet effort de redressement de notre politique socialiste s'accompagne d'une préoccupation constante : celle de maintenir entre tous les socialistes sincères un maximum d'unité. Rejetant nettement, pour ma part, toute mesure de proscription, je continue de penser que l'adhésion du Parti à l'Internationale communiste peut et doit s'accomplir sans brimade contre ceux qui, minorité demain, accepteraient de se conformer dans l'action publique aux directions arrêtées par le Congrès lui-même dans sa pleine souveraineté. Un parti comme le nôtre, de mouvement et d'action, ne peut ni se figer dans l'immobilité du dogme, ni condamner ses militants à la rigueur des disciplines monastiques. Au reste, une expérience de cinq années témoigne que les majorités sont précaires dans un Parti capable d'assouplir ses moyens de lutte à la diversité des situations et des circonstances. Pour la sécurité de tous et de chacun, les droits des minorités ne sauraient donc ni disparaître de notre charte commune ni être abandonnés à l'arbitraire des majorités changeantes. Nous sommes prêts à les déterminer exactement, à les inscrire dans le statut remis à jour du Parti et cela doit, je pense, rassurer ceux qui appréhendent pour leur tendance des représailles dont j'ai le droit de dire qu'elles ne sont d'ailleurs dans l'esprit d'aucun d'entre nous.

L'eau chaude après l'eau froide. Elle nous enveloppe délicieusement. La déclaration Frossard est de nature, en effet, à provoquer un rapprochement entre les deux principales fractions du Parti.

Mais le Bulletin Communiste qui, sous la plume de Varine, avait déjà, dans son numéro du 25 novembre, affirmé la nécessité d'exclure les « centristes », d'abroger la R. P. et de refuser toute collaboration avec les reconstructeurs, proclame, le 2 décembre, la nécessité de la scission. Le Comité de la IIIe Internationale, à son tour, publie dans l'Humanité, une note disant :

Cette résolution (celle du Comité) ne pourra subir au Congrès de Tours aucune altération. Elle devra être appliquée dans son esprit comme dans sa lettre. Le Comité donne mandat à tous ses membres délégués au Congrès de s'en tenir strictement au texte rédigé et approuvé par les signataires de la résolution. Il invite tous les délégués sincèrement partisans de l'Internationale communiste à ne se prêter à aucun compromis, aucune transaction, et à repousser toute addition qui infirmerait une des dispositions de la résolution.

La résolution comportant l'abolition de la représentation proportionnelle dans les organismes directeurs du Parti, toute contradiction de ce point de vue équivaut à un refus d'adhérer à l'Internationale communiste qui considère comme une nécessité absolue l'unité de direction des partis affiliés.

La note est évidemment dirigée contre Frossard qui, sollicité par le Comité de la Reconstruction, de dire s'il maintient ses déclarations de la Seine, réplique par une « mise au point » dans laquelle il affirme maintenir lesdites déclarations.

Toujours la douche écossaise !

Enfin, la délégation « communiste » de la Seine réunie décide, à l'unanimité (Frossard absent), que la résolution d'adhésion à la IIIe ne subira aucune retouche et qu'on n'y changera même pas une virgule, ce qui équivaut à dire que l'on ne veut d'aucun rapprochement.

Voilà où nous en sommes à la veille du Congrès. C'est la confusion la plus complète. Il faudra bien qu'elle se dissipe à Tours et que nous sachions quelle est la pensée véritable de la future majorité.

Les congressistes d'abord, tous les adhérents du Parti ensuite et l'opinion ouvrière dans son ensemble ont le droit de connaître quels sont ceux qui poussent à la division des forces prolétariennes et ceux qui, au contraire, s'efforcent de l'empêcher.

Raoul Verfeuil.

 

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Parti socialiste (S.F.I.O.)

18e Congrès National

Le 18e Congrès national du Parti socialiste s'ouvrira à Tours, salle du Manège, rue Nationale, le samedi 25 décembre prochain. Il siégera le samedi 25, dimanche 26, lundi 27, mardi 28, mercredi 29, et jeudi 30 décembre.

L'ordre du jour a été arrêté comme suit :

1° Rapport du secrétariat ;

2° Rapport de la trésorerie ;

3° Rapport de la Commission de contrôle ;

4° Rapport du Conseil d'administration et de direction de l’Humanité ;

5° Rapport du Groupe socialiste parlementaire ;

6° La question de l'Internationale.

Au rapport du secrétariat a été annexée la discussion sur le conflit qui divise les Jeunesses socialistes, et, sous réserve qu'il n'y aurait pas de débat, le rapport de la Fédération de la Seine sur la question de l'imprimerie du Parti.

Samedi matin, de 9 h à 11 h, il sera procédé à l'échange des mandats. À 11 heures s'ouvrira la première séance publique du Congrès.

Il est rappelé aux Fédérations qu'elles seront représentés sur la base des cartes prises au 31 décembre 1919, chaque carte étant appuyée d'une moyenne de 8 timbres. Il leur est également rappelé que leurs délégués au Congrès devront avoir 5 années de présence dans le Parti. Les délégués d'autre part, sont invités à se munir des attestations nécessaires pour éviter toute contestation de la Commission de vérification des mandats.

Le Parti prend à sa charge les frais du voyage aller et retour en 3e classe d'un seul délégué par Fédération.

Le secrétaire : L.-O. Frossard.

 

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À la porte, Clara Zetkin !

Notre chère Clara Zetkin, la grande propagandiste du communisme allemand, adresse à l’Humanité le télégramme suivant :

Berlin, 18 décembre. - Gouvernement français me refuse, sans donner de raison, l'autorisation d'entrer en France. Impossible de remplir mon mandat. Je vous enverrai une lettre à lire au Congrès, sur lequel flottera la bannière de la IIIe Internationale communiste. - Clara Zetkin.

Dans un pays où l'élection au Parlement d'un travailleur socialiste est tenue par les bourgeois comme attestant « le désarmement du pouvoir devant les menées bolchevistes », dans un pays qui en est venu à considérer comme d'intérêt national le fait d'envoyer un haut diplomate baiser la mule du pape, le refus de laisser Clara Zetkin franchir la frontière et se rendre au Congrès socialiste de Tours est une mesure dont on peut dire qu'elle va de soi. La France, actuellement, est la terre bénie des capitalistes et des réactionnaires : il est dans l'ordre que ceux-ci en ferment l'entrée aux révolutionnaires qui prennent au sérieux la révolution et qui ne transigent pas avec les principes. L'interdiction dont elle est l'objet honore Clara Zetkin et, dans sa personne vénérée, l'Internationale communiste tout entière.

Mais les gredins falots qui gouvernent la France ne sont pas la France ouvrière et paysanne, bien innocente des méfaits de ses oppresseurs. Patience ! La révolution libératrice remettra un jour à leur place toutes choses et toutes gens. - Am. D.

 

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Avant le Congrès National

Comité de la reconstruction

Les délégués de la Fédération de la Seine ayant pour mandat « l'adhésion avec réserves », se sont réunis lundi soir au Populaire.

D'un accord unanime ils ont établi leur ligne de conduite au Congrès de Tours.

Fidèles au mandat reçu, ils maintiendront inlassablement la position prise par le Comité de la Reconstruction dans la question de l'Internationale, à savoir : La nécessité historique et politique de l'adhésion à la IIIe Internationale sous des réserves compatibles avec nos conditions particulières de lutte et l'indispensable tolérance réciproque entre « majorités » et « minorités » dans notre Parti. - Le secrétaire-adjoint : Manier

Aux délégués de province

Tous les délégués au Congrès de Tours mandatés sur la motion Longuet–Paul Faure (adhésion avec réserves) sont convoqués à une réunion privée, samedi soir, le 25, l'heure et la salle seront indiquées dès samedi matin au Congrès. - Le Comité de la Reconstruction.

Les votes des fédérations

Côte-d'Or

À l'unanimité pour la motion Cachin-Frossard

Ille-et-Vilaine

Cachin-Frossard, 8 mandats ; Longuet, 4 ; Blum, 3.

Maine-et-Loire

Cachin-Frossard, 11 mandats ; Longuet-Faure, 7.

Sarthe

Nous recevons la dépêche suivante :

Le Mans, 20 décembre. - Il faut rectifier le vote du Congrès de la Sarthe : Huits mandats pour la motion Cachin. - Berger.

Yonne

Cachin-Frossard, 64 mandats ; Longuet-Faure, 3 ; Heine, 1.

 
 

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Excuses

Notre ami Georges Pioch a publié dans le Populaire une lettre de M. la Fouchardière où celui-ci s'explique sur les articles qu'il a consacrés dans l'Œuvre à la disparition de Raymond Lefebvre, Vergeat et Lepetit.

« J'ai, dit M. la Fouchardière, sincèrement coupé dans cette histoire de tableaux et de bijoux rapportée par les agences et qui représentait Raymond Lefebvre comme le commis voyageur des bolcheviks ».

Et M. La Fouchardière ajoute que s'il n'a pas reconnu plutôt et publiquement son erreur, c'est qu'il craignait de paraître demander pardon pour celle-ci.

C'est très mal poser la question.

M. la Fouchardière après ses accusations inconsidérées devait, en effet, des excuses, mais pas à nous. Il les devait aux mères, aux femmes, aux petits orphelins qu'ont laissé ceux dont, par légèreté, il a risqué d'atteindre la mémoire. Quand s'étant trompé, on présente ainsi à des familles éplorées les regrets qui sont dus, on ne s'abaisse pas, on s'honore.

M. La Fouchardière a beaucoup tardé à reconnaître son erreur, mais il le fait enfin. Dont acte.

Mais les autres ? Les Latzarus et consorts vont-ils à leur tour déclarer qu'ils ont commis une mauvaise action en représentant comme des voleurs et des aventuriers les trois martyrs communistes ?

 

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Menées bolchevistes…

Menées royalistes…

… Et menées gouvernementales ?

Comme nous l'indiquions hier, le gouvernement met un empressement remarquable à se faire interpeller sur les « menées bolchevistes ». Après avoir vainement essayé de faire fixer à la séance d'hier la discussion de « l'interpellation » Soulier, il a réussi à en obtenir l'inscription à l'ordre du jour de ce matin. La date de vendredi, à laquelle on s'était arrêté, risquait d'ajourner dangereusement le débat qui doit se produire, de toute nécessité, avant la discussion sur la politique extérieure et sur les douzièmes où le cabinet risque d'être cruellement traité. Il doit exterminer une fois de plus le bolchevisme pour mériter ces quatre cents voix.

M. le pasteur Soulier, qui est un interpellateurs aimable, sera, espérons-le, un traducteur sincère : sa tâche est tout bonnement d'exprimer les inquiétudes électorales de ses amis, après leur rossée du Lot-et-Garonne. Y réussira-t-il aussi bien que l'Intransigeant d'hier soir ?

Le morceau vaut la citation :

Le pasteur Soulier, lit-on dans l'Intransigeant, interpelle demain le ministère à propos de l'élection du Lot-et-Garonne qui vient de donner la majorité à un socialiste dans le propre département de M. Leygues.

L'échec du candidat du Bloc a été ressenti très vivement dans les milieux de la majorité. Cela n'est pas sans inquiéter fortement les partisans du gouvernement actuel.

Ces bons républicains s'inquiètent moins de « menées royalistes » sur lesquelles Berthon a déposé hier une demande d'interpellations dont il a demandé et obtenu la jonction avec l'interpellation Soulier.

Le débat sur la politique extérieure va venir aujourd'hui, après-midi, quelques heures après le débat où le gouvernement aura pris, sur la propagande bolcheviste, l'attitude qu'on devine. Qui prendra la responsabilité de renverser un gouvernement qui viendra, le matin, de sauver la société ?

Le souvenir de ses services ne sera pas davantage effacé demain, lors de la discussion des douzièmes, pour laquelle M. André Lefèvre aiguise son grand sabre.

Vainement.

Le gouvernement dispose, pour la parade, du terrible couteau bolchevik.

C.-E. Labrousse.

 

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Tous les jeunes travailleurs,

tous les militants socialistes

voudront lire

« le drapeau rou​ge »

organe bi-mensuel

de propagande et de défense du socialisme

de la Fédération des Jeunesses socialistes

Rédaction et administration :

12, rue Feydeau, Paris (2e)

Abonnements : 1 an, 5 fr. ; 6 mois, 2 fr. 50

Le numéro : 20 centimes

En vente dans les kiosques de Paris

Envoi d'un numéro gratuit sur demande.

Réduction de 25 % sur les commandes des groupes.

Le drapeau rouge paraît les 1er et 15 de chaque mois, 4 ou 8 pages.

 

- « la douche écossaise », par Raoul Verfeuil [Voilà où nous en sommes à la veille du Congrès. C'est la confusion la plus complète. Il faudra bien qu'elle se dissipe à Tours et que nous sachions quelle est la pensée véritable de la future majorité.]

- « 18e Congrès National de la S.F.I.O. », avec l’ordre du jour du Congrès 

- « À la porte, Clara Zetkin » [L'interdiction dont elle est l'objet honore Clara Zetkin et, dans sa personne vénérée, l'Internationale communiste tout entière.]

- « Avant le Congrès National » : ligne de conduite des reconstructeurs et réunion privée le 25 au soir

- « le vote des Fédérations » : Côte-d’Or ; Ille-et-Vilaine ; Maine-et-Loire ; rectification pour la Sarthe ; Yonne

- « excuses » de M. La Fouchardière sur son article avec insinuations concernant Lefebvre

- « menées bolchevistes… menées royalistes… et menées gouvernementales ? », après l’élection du député socialiste dans le Lot-et-Garonne [Le gouvernement dispose, pour la parade, du terrible couteau bolchevik.]

- publicité pour le bi-mensuel « le drapeau rouge »

 

le 21 décembre 2020

 
 

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« Le bonheur est une idée neuve en Europe. » Saint-Just (révolutionnaire français, 1767-1794)