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Centenaire du PCF, au jour le jour : L'Humanité du jeudi 23 décembre 1920

L'Humanité, journal socialiste quotidien

À partir du site internet Gallica, de la Bibliothèque nationale de France

 

L'Humanité du jeudi 23 décembre 1920

 

 

Avant le Congrès National

Comité de résistance socialiste

La réunion organisée pour vendredi soir, à Tours, aura lieu à 21 heures, salle des Mutualités, ancien musée, place des Arts. À cette réunion sont conviés tous les délégués qui considèrent comme impossible l'acceptation des thèses et des conditions de la IIIe Internationale.

Le vote des fédérations

Algérie

Alger : Cachin–Frossard, 13 ; Blum, 2.

Constantine : Cachin–Frossard, 14 ; Heine, 4 ; Longuet, 1.

Oran : Cachin–Frossard, 12.

Soit, pour l'Algérie : Cachin–Frossard, 39 ; Heine, 4 ; Blum–Paoli, 2 ; Longuet–Faure, 1.

Ardèche

Cachin–Frossard, 40 ; Longuet–Faure, 7.

Aveyron

Cachin–Frossard, 282 voix ; Longuet–Faure, 174 ; Blum–Paoli, 7.

Haute-Marne

Cachin-Frossard, 9 mandats ; Longuet-Faure, 3.

Haut-Rhin

Cachin-Frossard, 24 ; Longuet-Faure, 1.

Vosges

Cachin-Frossard, 14 mandats ; Longuet-Faure, 4 ; Blum-Paoli, 3.

 

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Une École de propagandistes pour les femmes

Voici donc les femmes qui s'éveillent, voici donc les femmes qui bougent. La Voix des Femmes ne veut plus être seulement une voix écrite, elle veut être une voix parlée, si j'ose risquer ces pléonasmes. Sous ses auspices, sur l'initiative d'Alice Jouenne, avec le concours de Nelly Roussel, une École de propagandistes vient de se fonder.

Son titre même est son programme. Elle veut apprendre aux femmes à parler en public - pour faire de la propagande.

De même qu'on apprend l'orthographe, dit Alice Jouenne, on peut apprendre à parler, à énoncer des phrases claires et ordonnées, à composer une allocution, un exposé, un discours.

Il ne suffit pas de faire une conférence, ajoute Nelly Roussel, il faut savoir répondre aux interrupteurs, aux contradicteurs, il faut savoir intervenir dans un débat, il faut, en un mot, savoir discuter.

Et l'École de propagandistes veut apprendre aux femmes quels doivent être les sujets et quel doit être l'objet de leur propagande. Elle veut leur donner des idées précises sur la nouvelle tâche sociale qu'elles doivent accomplir ; et les matériaux intellectuels, les documents nécessaires pour cet accomplissement.

Nous savons combien la Révolution russe est attachée et s'attache encore à obtenir le concours actif et sincère des femmes.

« N'eût été l'appui des travailleuses, a dit Zinoview, au Congrès des ouvrières et paysannes de 1919, notre révolution n'aurait pas été victorieuse. Les hommes doivent se rendre compte que nous n'aurions pas été loin avec notre révolution si les travailleuses avaient refusé pour un certain temps de prendre part à notre lutte. »

« Enfin, dans le mouvement ouvrier, dans l'histoire de l'humanité, dit Trotsky au dernier Congrès de Moscou, ce qu'il faut remarquer comme un fait de la première importance, c'est que les femmes, ces esclaves, se réveillent. Avec les femmes… c'est un nouveau courant de base révolutionnaire qui vient s'ajouter au mouvement du prolétariat mondial. »

Nous avons suivi de très près toute l'œuvre féminine entreprise par la Révolution russe, et tout le mouvement féminin, toutes les manifestations féminines qui ont été la conséquence de cette œuvre : Congrès des femmes de novembre 1918, Congrès des ouvrières et paysannes de septembre 1919, Conférence internationale communiste des femmes, du mois d'août dernier.

Les Russes savent toute l'habilité qu'ont eue les prêtres et comment ils ont pu établir leur puissance et la faire durer en s'assurant, non pas l'intelligence des femmes - car il ne les instruisaient et ne les instruisent pas - mais leur cœur et leur âme.

Les Russes s'adressent non seulement au cœur et à l'âme des femmes mais aussi, mais surtout à leur intelligence. Certes, ils ne dédaignent pas la sensibilité féminine, source de richesses humaines inestimables. Mais ils savent bien que la sensibilité féminine a été réduite aux larmes depuis l'origine des civilisations par ceux qui n'avaient que trop d'intérêt à la résignation et à la passivité de la femme, et à sa croyance en un au-delà de justice réparatrice destiné à lui faire accepter toutes les misères et toutes les souffrances de la terre.

Alors, ils font appel à sa raison, à son courage, à sa volonté - pour ce monde-ci. « Il est du devoir de toutes les femmes de s'occuper sérieusement non seulement de petites choses et d'événements courants, mais aussi de ces grandes questions qui appellent l'attention du monde entier… Cela est aussi important que le pain quotidien. »

Une étude documentée d'Hélène [Blonina], parue dans le Bulletin Communiste, et dont j'ai déjà parlé ici-même, nous avait appris de quelles merveilleuses capacités d'organisation les ouvrières russes avaient fait preuve. Il y a maintenant en Russie d'excellentes ouvrière propagandistes et des ouvrières publicistes. Le travail d'éducation et d'instruction qu'elles font dans les masses ouvrières féminines est intense et remarquable par ses résultats.

Il n'y a aucune raison pour que les ouvrières propagandistes et publicistes ne surgissent pas des masses ouvrières féminines françaises.

Les propagandistes, formées à notre école, sauront les découvrir et les instruire, et chaque centre important d'ouvrières françaises fournira, nous en sommes certaines, des capacités et des valeurs qui s'ignorent encore.

Poursuivant la réalisation d'un idéal pour lequel nous avons fait entendre la voix des femmes aux heures les plus terribles de la guerre, fidèles à la Révolution russe, à son exemple et à ses enseignements, riches seulement de bonne volonté, d'énergie et de foi, nous élargissons notre œuvre avec les moyens dont nous disposons.

Louise Bodin.

P.-S. - les cours comprennent une partie pratique et une partie théorique. Ils ont lieu tous les lundis, à 20h30, rue de Bretagne, 40. Les adhésions et les cotisations sont fixées à 6 francs par personne et par mois - il faut que nous puissions payer notre salles - et reçues à la Voix des Femmes, 10, rue Montmartre. Que les femmes osent développer et tirer parti des ressources qui sont en elles.

 

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La scission s​ocialiste en Belgique

Bruxelles, 22 décembre. - La minorité du parti ouvrier belge a publié cette déclaration qu'elle a présentée au Congrès extraordinaire restreint.

On sait que cette minorité de gauche est groupée autour de l'Exploité de [Jaequemotte].

Les soussignés, délégués au Congrès extraordinaire restreint, considèrent comme un devoir de conscience de communiquer au Congrès, au moment où il est appelé à se prononcer sur la question de la discipline dans le Parti la déclaration suivante :

Notre activité socialiste dans le passé a toujours été inspirée par l'intérêt supérieur du mouvement prolétarien de lutte de classe et par l'action pour la révolution sociale, sur la base de l'unité du socialisme belge et de l'application de nos principes fondamentaux, tant au point de vue national qu'international.

Nous avons lutté, sans cesse, pour poursuivre au sein du mouvement ouvrier belge, pour ce que nous considérons et continuons à considérer comme la seule tactique répondant aux intérêts du prolétariat : la lutte de classe, l'opposition à la bourgeoisie sur tous les terrains, sans compromission ni entente.

La proposition soumise par la majorité de la Commission des Résolutions, qui porte l'atteinte la plus grave à la liberté d'action de la minorité, est considérée par nous comme rendant impossible notre activité socialiste au sein du Parti ouvrier belge.

Nous déclarons considérer le vote de cette proposition comme une mesure d'exclusion.

Nous rappelons au Congrès que notre conception est soutenue par de larges masses prolétariennes dans le pays et que, notamment la Fédération Bruxelloise s'est prononcée, à l'unanimité, pour une formule garantissant à la gauche du mouvement socialiste la liberté d'action nécessaire et indispensable.

Seul, le vote de cette motion peut nous permettre de continuer, en toute liberté et dignité, notre action au sein du Parti.

En ce moment solennel, nous attirons la très sérieux attention des partisans actuels de la motion de la Commission sur la lourde responsabilité qui leur incombe.

À eux de décider.

Nous rejetons sur eux la responsabilité d'une rupture que nous avons, de notre part, tout fait pour éviter.

 

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Rapport des délégués

au Conseil de direction et d'administration de « L’Humanité »

sur l'administration de la « Voix paysanne »

Camarades,

Nous rappelons tout d'abord que la Voix paysanne a été créé sur les demandes réitérées des fédérations qui assuraient juger nécessaire la création d'un journal socialiste destiné à pénétrer dans les milieux ruraux et se charger, dès qu'il existerait, de le répandre et de le faire prospérer.

Dans notre rapport sur l’Humanité, nous avons déjà demandé à nos camarades de partout d'examiner si tout ce qui avait été ainsi promis a été tenu. Nous ne voulons d'abord, ici, que donner la situation de l'organe de pénétration paysanne telle qu'elle est actuellement.

C'est à ce titre d'annexe de l’Humanité que la Voix paysanne a été constituée. Son budget rentre donc dans le budget général de l'organe central du Parti et il n'est pas établi pour elle de bilan spécial.

Nous allons vous donner, relevé sur nos livres généraux, le compte d'exploitation de la Voix paysanne depuis sa fondation (premier février 1920) jusqu'à fin septembre 1920, soit pour une durée de huit mois :

[…]

Ce qui ressort de ce compte, c'est donc une perte assez élevée, de 5 000 francs par mois. Si nous attirons l'attention là-dessus, ce n'est pas pour l'importance de cette perte. Dans un budget général qui, comme celui de l’Humanité, s'est élevé, pour certains mois, à plus d'un million, ce chiffre n'a qu'une influence secondaire. Au moment où nous sommes, les bénéfices de l’Humanité sont incomparablement plus élevés que les pertes provenant de la Voix paysanne.

Mais nous entendons, en vous mettant sous les yeux cette situation, chercher ce qui n'a pas été fait pour cette feuille si obstinément réclamée et, par conséquent, ce qui serait à faire.

Les premiers abonnements avaient atteint le chiffre de 3 928 dans les quatre premiers mois. Qu'est-il arrivé ensuite ? Vous le verrez par le tableau suivant arrêté au 15 novembre 1920.

[…]

L'augmentation et donc si minime, en somme, qu'on peut considérer que la diffusion de la Voix paysanne est dans un état de quasi-stagnation. À quelles causes l'attribuer ?

Premièrement, les difficultés de la vie, qui vont sans cesse augmentant, entrent assurément pour une part dans le mouvement qui porte les salariés à réduire leurs dépenses et, par conséquent, à abandonner un organe de complément.

Deuxièmement - nous touchons là, sans doute, à une cause importante - les petits propriétaires, fermiers et métayers socialistes déclarent ne pas trouver suffisamment dans la Voix paysanne les renseignements agricoles qui doivent y être cherchés. Ils observent que, pour rentrer à fond dans les familles paysannes, la feuille agraire du Parti doit être à même d'évincer les journaux agricoles conservateurs et réactionnaires. Qu'est-ce à dire, sinon que nos camarades de partout n'ont pas apporté, sous forme d'informations prises sur place et d'indications touchant la situation dans leur milieu, la collaboration que le Comité de rédaction de la Voix paysanne était en droit d'en attendre.

Troisièmement, et surtout, sections et fédérations du Parti se sont vraiment trop désintéressées du progrès du journal agricole, après en avoir, pour ainsi dire, exigé la création et avoir assumé la responsabilité de ses progrès futurs. Elles ont attendu passivement que la plante poussât toute seule, sans se préoccuper des semailles.

L'attention des militants est principalement tournée vers les centres urbains. Ils se préoccupent médiocrement même d'aller récolter le résultat d'efforts faits en dehors d'elles et c'est ainsi que la tournée de propagande pourtant bien organisée par la C.A.P., avec le concours des élus municipaux et les députés du Parti, n'a produit que fort peu de choses au point de vue des abonnements.

Que dis-je ? Un très grand nombre de sections ne se sont même pas abonnées, comme elles devaient le faire, et - indice certain de l'attitude passive que nous signalions plus haut - l'abonnement n'a été indiqué comme devant être pris à aucun des groupements nouvellement créés pendant l'année.

Enfin, à l'exception de celle qui a été faite dans l'Humanité, aucune publicité n'a été mise au service de la Voix paysanne par les organes socialistes locaux.

Nos camarades voudront certainement faire cesser leur [carence]. Elle serait sans excuse si elle se prolongeait, à un moment si propice à la propagande chez les paysans. Un léger effort suffira, non seulement à combler un déficit qui, nous le répétons, n'est pas le principal, mais à tirer d'une arme nouvelle mise entre les mains du socialisme tout le parti possible.

Les rapporteurs délégués.

Bracke, Jean Mouret.

 

 

- « avant le Congrès national » : réunion du Comité de résistance socialiste

- vote des fédérations : Algérie ; Ardèche ; Aveyron ; Haute-Marne ; Haut-Rhin ; Vosges

- « une École de propagandistes pour les femmes » [Il n'y a aucune raison pour que les ouvrières propagandistes et publicistes ne surgissent pas des masses ouvrières féminines françaises.]

- « la scission socialiste en Belgique », avec la déclaration du parti ouvrier belge

- « rapport des délégués au Conseil de direction et d’administration de ‘L’Humanité’ sur l’administration de la ‘Voix paysanne’ » [Nous rappelons tout d'abord que la Voix paysanne a été créé sur les demandes réitérées des fédérations qui assuraient juger nécessaire la création d'un journal socialiste destiné à pénétrer dans les milieux ruraux]

 

le 21 décembre 2020

 
 

Il y a cent ans : L'Humanité au jour le jour

 
 
« Le bonheur est une idée neuve en Europe. » Saint-Just (révolutionnaire français, 1767-1794)