Fédération de l'Oise

Fédération de l'Oise
Accueil
 
 

Centenaire du PCF, au jour le jour : L'Humanité du mercredi 8 décembre 1920

L'Humanité, journal socialiste quotidien

À partir du site internet Gallica, de la Bibliothèque nationale de France

 

L'Humanité du mercredi 8 décembre 1920

 

 

 

Avant le congrès

À la IIIe ! - par Alexandre Blanc

Le prochain Congrès du Parti socialiste préoccupe de plus en plus les membres, les amis ou les adversaires du Parti. Mais la question que les uns et les autres se posent n'est plus la question qu'ils se posaient voilà deux mois à peine.

Alors on se demandait : « L'adhésion à la IIIe Internationale sera-t-elle votée ? » Aujourd'hui on dit : « Quelle majorité obtiendront les partisans de l'adhésion ? » Cette dernière ne faisant plus de doute.

Quant est la majorité elle-même, les moins optimistes d'entre nous l'évaluent aux deux tiers des mandats. On verra, bientôt, en effet que leur optimisme n'est affublé d'aucun coefficient méridional.

En dehors de la Fédération de la Seine qui a donné aux tendances de Moscou un nombre écrasant de suffrages, les résultats qui, journellement, arrivent des fédérations ou des sections de province prouvent que le mouvement est irrésistible qui pousse le Parti vers la IIIe Internationale.

Ce ne sont pas seulement - il s'en faut - des sections citadines, composées surtout de travailleurs d'ateliers et d'usines, qui approuvent ainsi les nouvelles directives et la dictature du prolétariat.

Mais à côté de ces sections, d'autres, une foule d'autres, approuvent les mêmes directives, comprennent plus particulièrement des paysans, salariés, métayers ou petits propriétaires.

Ainsi tous les travailleurs, qu'ils soient à la ville ou aux champs, ces travailleurs groupés dans notre organisation expriment leur approbation de la méthode des Soviets.

Lorsque le Congrès se sera prononcé, lorsque notre Parti sera délibérément entré dans cette famille de plus en plus grande qu'est la IIIe - la vraie - Internationale, quitteront-t-ils le Parti, ceux de nos camarades qui nous menacent d'une scission ?

Libre à eux. Ils porteraient eux-mêmes - et j'ignore si le poids leur serait léger - toute la responsabilité de la scission. Mais beaucoup qui boudent, socialistes avant tout, cesseront de bouder et très loyalement regagneront le gros du Parti, celui-ci plus fort parce que plus net qu'auparavant.

D'après nos adversaires, il n'en serait pas ainsi, et le Parti perdrait de sa force et de sa facilité de propagande. Certains de ces adversaires paraissent se réjouir du fait que les tendances dit extrémistes triompheront à Tours.

Paraissent-ils se réjouir pour donner ainsi une arme aux socialistes qui ne veulent en aucun cas de la IIIe Internationale ? Ou bien paraissent-ils se réjouir pour se donner la douce illusion que ce parti qu'ils détestent et qu'ils craignent marche à sa perte ?

Dans tels et tels journaux conservateurs plus ou moins teintés de rose, dans d'autres teintés de jaune, on prétend que le vote de notre motion comblera d'aise les défenseurs de l'ordre social. Plus de propagande possible pour nous, surtout dans la campagne ! Donc, plus de danger pour la bourgeoisie.

Nous connaissons déjà l'image des fourches dressées contre nous. De cette menace, nous sourions aujourd'hui comme nous en avons souri autrefois. Et avec la même raison.

Mais puisque notre propagande va ne plus avoir de portée, puisque nos idées doivent éloigner même ceux qui étaient sympathiques au socialisme, pourquoi, dans ces journaux conservateurs, lisons-nous ensuite que notre Parti ne relèvera plus que de la police et des tribunaux ?

Comment, cette répulsion que nos doctrines inspireraient, cette répulsion ne suffit pas pour que la bourgeoisie soit sauvée et que ses privilégiés soient hors d'attente ? Il faut que la bourgeoisie ait peu de foi en cette répulsion pour qu'elle appelle, dans la discussion, et à son profit, les forces policières, comme elle appelle, au besoin, les forces militaires.

En réalité, la bourgeoisie a peur. Et ce n'est pas seulement la police, la magistrature et l'armée quelle invoquera, à défaut d'arguments, c'est encore la calomnie. Cette calomnie qu'elle manie ou fait manier avec tant de maladresse, d'ailleurs, que de mauvaise foi.

Salir, essayer de salir, voilà le mot d'ordre qu'elle donne et que des gens capables de tout exécutent. Nous venons de le constater une fois de plus ces jours derniers au sujet de morts [qu']endeuillent le Parti. C'est gens capables de tout ne savent même pas respecter le sentiment le plus humain.

Ne nous plaignons pas. Leurs menaces et leurs calomnies ne sauraient affaiblir l'enthousiasme qui pousse les masses populaires vers la IIIe Internationale ouvrière et paysanne, vers l'Internationale Communiste.

Alexandre Blanc.

 

-

 

Le vote des fédérations

Le Congrès de la Fédération de Meurthe-et-Moselle, réuni à Nancy, a voté dimanche dernier, à l'unanimité moins une voix, la motion Cachin-Frossard.

Voici les votes émis par la Fédération d'Indre-et-Loire : Cachin-Frossard, 46 ; Longuet-Faure, 24 ; Paoli-Blum, 1.

Alger, 6 décembre. - (Par dépêche de notre correspondant.) - Le vote du Congrès fédéral d'Alger tenu le 5 décembre, est le suivant : Motion Comité IIIe, 13 mandats ; motion Blum, 2. - Lacoste.

N.–B. - Dans la dépêche de Metz que nous avons publiée hier il faut lire « présence de Grumbach » et non « présidence… ».

 

---

 

La conférence de Be​rne

Berne, 7 décembre. - La conférence socialiste a tenu lundi une réunion préliminaire au cours de laquelle lecture a été donnée de rapports relatifs à la situation des socialistes dans les différents pays, rapports faits par Crispien (Allemagne), Adler (Autriche allemande), Cernak (Tchéco-Slovaquie), Grimm (Suisse), Wallhead (Angleterre), Collom (États-Unis), Martow (Russie), Longuet (France).

L'assemblée a abordé ensuite les débats relatifs à la création d'une internationale réunissant les partis socialistes révolutionnaires. Ont pris part à la discussion : Ledebour, Bauer, Grimm, Crispien, Shinwell, Wallhead.

Il a été décidé d'instituer une commission chargée de rédiger un manifeste qui sera adressé aux prolétaires du monde entier, manifeste qui devra être soumis à la conférence.

Finalement, la conférence a approuvé, sur la proposition de Rosenfeld, la décision suivante :

La conférence internationale des Partis socialistes révolutionnaire proteste énergiquement au nom des millions de prolétaires de tous les pays qui la soutiennent, contre le régime de sang exercé par les détenteurs du pouvoir, en Hongrie, particulièrement contre le fait que des hommes qui ne font que leur devoir politique à l'égard de la classe ouvrière, sont traités comme de vulgaires criminels et livrés aux bourreaux.

La conférence fait appel aux socialistes révolutionnaires du monde entier, en vue de prouver leur solidarité avec le prolétariat hongrois. - (Havas)

 

--

 

Le Congrès communiste allem​and

Daumig, au nom des indépendants de gauche et des communistes d'Allemagne, ayant adressé « à la gauche du Parti socialiste français », une invitation à se faire représenter au Congrès de fusion de Berlin, le citoyen Frossard lui a répondu par une dépêche exposant qu'en raison de la préparation du Congrès français il était difficile à l'aile gauche d'envoyer à Berlin, les délégués auxquels elle aurait voulu confier ce mandat. Il exprimait ses félicitations à Daumig pour l'œuvre accomplie et adressait son salut fraternel aux indépendants de gauche communistes.

 

 

--

 

Pour l'Imprimerie du P​arti

Voilà enfin le Congrès national saisi de la question ; nul doute qu'il sera de notre avis et que la commission qui en sera chargée se mettra résolument à l'ouvrage pour mettre au plus tôt le Parti en face de l'œuvre à accomplir.

Mais, en attendant cette heure, maintenant que nos discussions sont presque terminées sur l'adhésion, les sections et groupes du Parti peuvent déjà faire une active propagande dans leur milieu en faveur de l'émission d'obligations et actions qui sera ouverte et envisager les moyens pratiques pour le placement de souscriptions, timbres et bons qui seront émis par le Parti

C'est une lourde tâche, certes, mais que les militants tiendront à honneur d'accomplir devant l'impérieux besoin pour assurer la garantie de nos moyens de propagande, en toutes circonstances, et procurer à la Caisse du Parti les bénéfices en résultant, au lieu et place d'intermédiaires.

Le moment est venu où le Parti doit s'organiser sur tous les terrains, surtout dans la propagande journalière, et envisager les moyens financiers pour la multiplier : assez de discours, de discussions oiseuses et de querelles intestines, car il faut maintenant de l'action et de l'organisation pour lutter contre le capitalisme.

Que l'exemple donné par certaines fédérations qui possèdent leur imprimerie et leur maison du Peuple depuis longtemps, ainsi que par la C.G.T. qui vient de décider l'augmentation des cartes et des cotisations pour fonder un journal quotidien, serve de stimulant aux militants pour arriver à mettre debout une arme puissante dans les mains mêmes du Parti.

Non seulement les membres du Parti socialiste ont un grand intérêt à confier à leur Parti les armes dont il aura à disposer en toutes circonstances et contre tous ses adversaires, pour avoir toutes les garanties possibles, mais tous les travailleurs, tous les exploités sans distinction, qui veulent sauvegarder l'avenir dans leurs intérêts de classe et leur but d'émancipation complète, ont besoin de confier les organismes de lutte et de propagande à l'organisation centrale de la classe ouvrière qui est leur émanation directe et est placée constamment sous son contrôle vigilant.

En dehors de cette situation, pas de garantie réelle, car toute coopérative ne sera que l'œuvre de quelques hommes, donnant quelques garanties superficielles en temps normal, avec quelques délégués d'organisations dans le Conseil, mais dons tout pourra être changé, bouleversé et transformé en période de lutte violente contre les capitalistes qui disposent, eux, de moyens puissants quand il faut sauvegarder leurs intérêts.

Seule la possession de toutes les armes de lutte par le Parti, organisation centrale de la classe ouvrière, qui représente non seulement les socialistes, mais tous les exploités sans distinction ; tous les travailleurs qui ont confiance en lui pour les conduire autant à leur émancipation économique que politique, peut donner toutes garanties parce que, encore une fois, sous leur contrôle constant et étant leur émanation directe.

Assez joué sur les mots en disant que le Parti socialiste n'est qu'un parti politique, pour les besoins de la cause, car il est avant tout un Parti poursuivant l'émancipation économique de la classe ouvrière.

Les intérêts de toute la classe ouvrière et les moyens de les défendre ne seront en sûreté que dans les mains de leur organisation centrale, donc ils sont les maîtres.

Militants socialistes, syndicaliste et coopérateurs, à l'œuvre dès aujourd'hui pour vous donner, à vous-même, le meilleur outil que vous pourrez vous attribuer, étant votre bien et votre œuvre, dont vous disposerez entièrement, selon vos besoins et les nécessités de la lutte.

Qu'à l'appel du Parti tous répondent : « Présent ! » et en peu de temps l'Imprimerie du Parti sera une réalité. Ce sera alors le début d'une organisation complète de combat qui ne tardera pas à donner ses fruits.

J. Ferretti.

Secrétaire de la 11e section.

 

--

 

La France ouvrière

La propagande dans l'Oise

Notre camarade Verfeuil vient d'accomplir dans la Fédération de l'Oise une tournée de propagande.

Devant un public attentif et sympathique, il a développé la doctrine du Parti et, en parfait unitaire, il a évité d'agiter la question irritante de la IIIe Internationale, se bornant uniquement à faire de l'éducation socialiste.

Très éloquent et persuasif, il a obtenu de nombreuses adhésions dans les sections visitées.

Le secrétaire fédéral : Ruillier.

 

----

 

Trois année​s d'efforts contre la Russie - par Marcel Cachin

Ma conviction c'est que le bolchevisme est perdu et qu'il le sait. Les Rouges battent en retraite sur tous les points. (Discours de Pichon, ministre, il y a 18 mois.)

Lénine est plus fort que jamais. On n'en aura pas raison par les armes. (Les journaux d'aujourd'hui.)

Au lendemain du coup d'État de novembre 1917, la France et ses alliés ont commencé la lutte contre le pouvoir des Soviets.

Dans le discours de l'été de 1918, et sous couleur de lutter contre l'Allemagne, l'Entente fit débarquer dans la mer Blanche des contingents importants qui s'élevèrent à 40 000 hommes. La part de la France était de quelques bataillons qui, après l'armistice, refusèrent de se battre contre la Russie révolutionnaire.

En même temps, les Alliés, avec l'aide du Japon, organisent en Sibérie une base d'expédition. Des complots contre-révolutionnaires organisés par les consuls des grandes puissances se nouent à Vladivostock. Une révolte des prisonniers tchécoslovaques est appuyée par l'ambassade française et ses agents. Noulens engage sur le sol même de la Russie une lutte ouverte contre le gouvernement de fait établi à Moscou.

Tous les éléments anti-bolchevistes de Russie sont groupés avec l'appui des Alliés à la Conférence d'Oufa en septembre 1918. On constitue à Omsk un gouvernement provisoire que dirige Avkxentief. Quelques semaines après, Koltchak, ministre de la marine de ce pouvoir fantôme organise avec succès contre lui un coup d'État que nous sanctionnons. Et depuis ce moment-là jusqu'au mois de février 1920, où Koltchak est tué par ses propres troupes, le ministère Clémenceau donne à l'amiral réactionnaire la plus complète assistance. En mai 1919, il l'a reconnu comme seul gouvernement de la Russie. Il l'a doté de conseillers militaires techniques dirigés par le général Janin ; il l'a fourni de matériel. Lasies estime que la seule base française de Sibérie « centralisait en fonds et en matériel une somme qui, pour 1919, a dépassé 1 milliard ».

Après l'exécution de l'Aventurier, les débris de son armée furent réunis par Semenof, qui vient de terminer lui aussi en Extrême-Orient sa lamentable et coûteuse équipée.

Le coup d'État de Koltchak contre le pseudo-gouvernement socialiste révolutionnaire d'Omsk date du 18 novembre 1918. C'est à cette même époque que Denikine établit lui aussi, après la disparition de Kornilov sa dictature en Ukraine et dans le sud de la Russie, Don, Caucase, Kouban, Crimée. Denikine se met presque aussitôt sous les ordres de Koltchak. Il constitue une armée de volontaires que nous subventionnons pendant dix-huit mois sans compter. Nous entretenons près de lui une mission militaire où brillait d'un vif éclat le valeureux Ehrlich, jadis socialiste. Denikine avait aussi à ses côtés le germanophile général Krassof, commandant les cosaques du Don, que l'on dut déposséder de son grade en raison de ses sentiments réactionnaires et pro-allemands. Le commandant de la cavalerie de Denikine était Wrangel, qui devait le remplacer après sa défaite de juillet 1920 à Tsaritsine. Mais entre Wrangel et Denikine s'élevèrent rapidement les rivalités les plus aiguës ; Wrangel reprochait à son chef les scandales de son état-major ; il l'accusait d'avoir refusé par ambition de secourir Koltchak et de l'avoir « traîtreusement lâché ». À quoi répondit Denikine en chassant de son armée ce Wrangel qui, disait-il amèrement, était « d'orientation allemande ».

Cependant, Wrangel fut appelé à la succession de Denikine comme chef de l'armée des volontaires le 7 avril 1920. Six mois après il était à la mer malgré la reconnaissance solennelle et ridicule de M. Millerand survenue en août dernier.

Durant son bref interrègne combien coûta-t-il au budget français ? Il était appuyé par de puissantes sociétés capitalistes franco-russes du Donetz. Mais ce concours était insuffisant, et chacun se souvient d'une interview fameuse, donnée le 10 octobre 1920 au Matin par le « socialiste » Strouve, devenu « ministre des affaires étrangères de Wrangel » (?)

Strouve disait sa certitude de tailler en pièce rapidement l'armée rouge si on lui donnait seulement quatre cents millions, « gagés, ajoutait-il, sur nos conquêtes futures ».

Youdenitch, auquel on avait confié le rôle ingrat d'enlever Petrograd aux Rouges, organisa son expédition en octobre 1919. Dès le mois suivant, ses bandes étaient refoulées en désordre en Est[h]onie, en dépit de l'appui précieux que lui assurèrent les flottes alliées.

De ce rapide examen, il est aisé de conclure que durant les années 1918, 1919, 1920, nos gouvernants bourgeois ont multiplié les efforts les plus tenaces, les plus dispendieux et les plus inutiles pour abattre la Révolution russe. Ils n'y ont pas réussi. Désormais, que vont-ils tenter et quelle va être leur conduite de demain vis-à-vis des Soviets ? Cette question domine la politique de tous les pays de l'Europe présente.

Marcel Cachin.

 

- « Avant le Congrès - À la IIIe ! », par Alexandre Blanc [Aujourd'hui on dit : « Quelle majorité obtiendront les partisans de l'adhésion ? » Cette dernière ne faisant plus de doute.]

- « le vote des fédérations » de Meurthe-et-Moselle, d’Indre-et-Loire et d’Alger

- « la conférence de Berne », avec une commission chargée de rédiger un manifeste adressé aux prolétaires du monde entier

- « le Congrès communiste allemand », sans délégués français, excusés par la préparation du Congrès de Tours

- « pour l’Imprimerie du Parti » [Qu'à l'appel du Parti tous répondent : « Présent ! » et en peu de temps l'Imprimerie du Parti sera une réalité.]

- « la propagande dans l’Oise », écho de la tournée du camarade Verfeuil dans les sections où « il a obtenu de nombreuses adhésions »

- « trois années d’effort contre la Russie », résumées par Marcel Cachin, où l’on croise Noulens, Avkxentief, Koltchak, Semenof, Denikine, Wrangel [De ce rapide examen, il est aisé de conclure que durant les années 1918, 1919, 1920, nos gouvernants bourgeois ont multiplié les efforts les plus tenaces, les plus dispendieux et les plus inutiles pour abattre la Révolution russe.]

le 07 décembre 2020

 
 

Il y a cent ans : L'Humanité au jour le jour

 
 
« Le bonheur est une idée neuve en Europe. » Saint-Just (révolutionnaire français, 1767-1794)