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Centenaire du PCF, au jour le jour : L'Humanité du vendredi 24 décembre 1920

L'Humanité, journal socialiste quotidien

À partir du site internet Gallica, de la Bibliothèque nationale de France

 

L'Humanité du vendredi 24 décembre 1920

 

 

Parlons sérieusement - par Sixte-Quenin

J'ai gardé le souvenir d'une brochure d'un brave socialiste qui faisait la guerre dans les ministères, pendant que les pauvres diables la faisaient dans les tranchées. Ça s'intitulait : « La Paix que nous voulons ». Il suffisait d'en lire quelques lignes pour s'apercevoir que cette paix, c'était la continuation de la guerre.

Varine vient de nous exposer : « l'Unité que nous voulons ». À chaque phrase on peut s'apercevoir que cette unité c'est le fractionnement du Parti en plusieurs tronçons. Il est vrai que l'un deux - celui dont fera partie Varine - restera seul digne de se dire socialiste, ce pourquoi il ne se le dira plus, car il sera communiste. L'autre, ou les autres, parce qu'ils garderont le nom de socialistes, ne le seront plus !

En toute sincérité j'ai essayé de comprendre la nécessité de cette dispersion unitaire. Je n'y suis pas parvenu.

La raison principale m'a semblé reposer sur une prophétie : « une vie nouvelle va commencer pour le Parti. » Est-il interdit de demander d'attendre six mois, un an, ou la prochaine campagne électorale, pour se convaincre de la véracité de cette affirmation ?

À cette raison s'en ajoutent d'autres qui ne sont pas toutes à dédaigner. Mais les plus sérieuses me paraissent appeler des décisions claires du Parti fixant l'attitude des élus socialistes à l'égard du pouvoir bourgeois. Elles ne sauraient justifier la mise au ban du Parti de milliers de socialistes qui ne sont pas fonctionnaires de la Société des Nations, qui n'ont jamais songé à inviter M. Millerand à leur rendre visite, qui ne tiennent pas à fraterniser avec Pilsudski et qui cependant font des réserves aux 21 conditions de Moscou.

Ces réserves, qu'ils avouent, ne sont guère différentes, d'ailleurs, de celles auxquelles Varine a souscrit, sans les avouer, en signant la motion Cachin-Frossard. Il est vrai que la dite motion commence par proclamer que les 21 conditions sont « légitimes et indispensables ». Pourquoi déclarer ensuite qu'on se dispensera de celle-ci et que celle-là n'est pas légitime, puisque nuisible ? Est-ce ainsi parler, comme on s'en flatte, en pleine clarté ?

L'Unité, telle que je la comprends, je demande la permission à Varine de l'exposer.

Ce n'est pas un Parti socialiste permettant à ses membres de frayer avec Millerand et Pilsudski, mais c'est un Parti permettant à Varine et à Frossard de défendre - clairement - leur point de vue différent, sans les frapper d'exclusion ni l'un ni l'autre !

C'est encore, je l'avoue, un Parti permettant à Longuet, sans aller se tuyauter chez Varine, d'exposer la politique socialiste internationale telle qu'il la voit, lui permettant même de se tromper, le cas échéant, sur le compte de tel ou tel militant étranger, comme il arriva à Rappoport de se tromper sur « le plus grand commun diviseur » Lénine.

C'est enfin un Parti qui ne répète pas à ses adhérents ce que j'ai lu il y a quarante ans dans mon catéchisme, savoir qu'il y a de mauvais journaux et de mauvais livres qu'il est interdit de lire sous peine de péché mortel.

Maintenant, pour que le brouillard se dissipe pleinement, Varine me permet-t-il de lui demander de s'expliquer sur un sujet que les communistes les plus éprouvés préfèrent ignorer, malgré toutes les invites à le traiter qu'on leur adresse ?

Une vie nouvelle va commencer pour le Parti. « Le parti de classe du prolétariat va recourir à des méthodes de combat de plus en plus directes, de plus en plus offensives. » Nous sommes, sans avoir le droit d'en douter dans « la période historique de la "lutte finale" du prolétariat contre la bourgeoisie ». Parfait.

Mais ce parti de classe va-t-il permettre, ou interdire, la continuation de la collaboration des communistes des Bouches-du-Rhône, du Vaucluse, du Rhône, du Gard, de l'Hérault, de la Loire, de la Seine - je dois en passer - avec les radicaux, ou socialistes indépendants, qui firent liste commune avec eux aux élections municipales ?

Ce parti de classe va-t-il permettre à Henri Fabre de continuer à préconiser, pour les prochaines élections législatives de la Seine, la présentation au second tour d'une liste Varine–général Sarrail ou Loriot-Aulard ?

Qu'on m'entende, je ne demande pas qu'on interdise à Fabre la propagande d'une tactique pour laquelle je proclame ma secrète sympathie et que les neuf dixièmes des socialistes pratiqueront dès que l'occasion leur en sera donnée. Je ne veux pas, non plus, causer aucune peine, même légère, à tous les camarades, adjoints socialistes, qui font bon ménage avec leur maire radical, ou maires socialistes qui s'entendent avec leur adjoint radical.

C'est que je suis en social-traître. J'attends, en effet, pour être certain d'un événement, qu'il se soit produit. D'où qu'en vienne l'ordre je me refuse à tenir pour acquis, ce qui n'est que possible ou même probable.

Mais, Varine, l'Internationale communiste, elle, admet-elle les coalitions électorales, les collaborations municipales avec des bourgeois ? Pour fixer « la vie nouvelle du Parti », il ne serait pas inutile qu'une réponse claire soit faite à cette question, avant, qu'à Tours, le délégué de Montpellier vote la motion Cachin-Frossart.

Sixte-Quenin

 

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Avant le Congrès National

Comité de résistance socialiste

Réunion ce soir, à 21 heures, à Tours, salle des Mutualités, ancien musée, place des Arts. À cette réunion sont conviés tous les délégués qui considèrent comme impossible l'acceptation des thèses et des conditions de la IIIe Internationale.

Le vote des fédérations

Eure

Cachin–Frossard : 71 mandats ; Longuet : 2.

Haute-Loire

Cachin–Frossard : 4 mandats ; Longuet-Faure : 1.

Basses-Pyrénées

Cachin–Frossard : 11 mandats ; Longuet-Faure, 6 ; Blum-Paoli : 1 ; abstention : 2.

Sarthe

Cachin–Frossard : 8 mandats ; Blum–Paoli : 7 ; Longuet–Faure : 2.

Les partisans des motions Cachin et Longuet ont voté ensuite la motion suivante, sur laquelle les partisans de la motion Blum-Paoli ont déclaré s'abstenir :

Considérant : 1. Que la direction du Parti appartient au Parti lui-même, c'est-à-dire au Congrès national qui se réunit chaque année (art. 20).

2. Que les Congrès nationaux ont pour tâche essentielle de définir le programme du Parti et d'apporter aux statuts toutes modifications qu'ils jugeraient nécessaires.

3. Que la volonté individuelle des membres du Parti doit s'incliner devant les décisions de la majorité.

La Fédération Socialiste de la Sarthe exprime sa ferme volonté de rester dans le Parti et déclare qu'elle s'incline à l'avance devant la décision du Congrès national de Tours quelle qu'elle soit. »

 

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Parti socialiste (S.F.I.O.)

Commission administrative permanente

Séance du vendredi 17 décembre 1920

Étaient présents, les citoyens Bloch, Bracke, Bureau, Paul Faure, Frossard, Grandvallet, Le Troquer, Longuet, Maurin, Verfeuil, titulaires ; Grumbach, Morizet, suppléants.

Excusés : Loriot (en prison), Renaudel, citoyenne Saumoneau, Paul Louis, Daniel Renoult.

La commission arrête les dernières dispositions en vue du Congrès. Elle désigne comme présidents des séances du congrès les citoyens Cachin, Goude, Mistral, Ribaut, Marcel Sembat.

Elle donne mandat au secrétaire de convoquer, conformément à la décision du Conseil national du 4 juillet, la conférence des secrétaires de fédérations.

Sur la proposition de Morizet, il est entendu que le bureau du Parti prendra à Tours l'initiative d'une convocation des municipalités socialistes en accord avec les représentants de la fédération nationale.

La C.A.P. enregistre une lettre du citoyen Midol, à l'égard duquel s'est manifestée la solidarité du Parti.

Les citoyens Jean Longuet et Paul Faure présentent le compte rendu de leur délégation à la conférence de Berne.

En conclusion de leur exposé, le citoyens Bracke propose l'ordre du jour suivant :

« La C.A.P. prend acte des résultats de la conférence internationale préparatoire de Berne, tels qu'ils viennent de lui être rapportés par les délégués du Parti, les citoyens Jean Longuet et Paul Faure.

Elle s'en félicite d'autant plus qu'ils sont la confirmation dictée par l'expérience internationale de la méthode indiquée par le congrès national de Strasbourg comme la seule qui permette d'arriver à la reconstruction d'une internationale unique et forte.

Elle est heureuse de penser que la façon dont elle a exécuté le mandat que lui avait donné le congrès de Strasbourg en envoyant successivement pour se mettre en rapport avec les partis socialistes, Daniel Renoult en Italie, Paul Faure en Suisse, Paul Mistral en Allemagne, Marcel Cachin et Frossard en Russie, Jean Longuet en Angleterre, n'a pas été étrangère au mouvement qui aboutit à la convocation, le 22 février prochain, d'une conférence internationale destinée à préparer la réunion de tous les prolétariats organisés.

Elle proposera en conséquence, au Congrès national de Tours, de décider l'envoi de délégués du Parti à la Conférence internationale de Vienne.

La C.A.P. adresse ses félicitations à ces délégués pour la manière dont ils ont accompli le mandat qui leur avait été confié en conformité des résolutions de Strasbourg. »

Au nom de la minorité, le citoyen Frossard déclare ne pouvoir s'associer à cet ordre du jour. Il est néanmoins voté par 12 voix contre 11 et une abstention.

Ont voté pour : Bracke, Paul Faure, Grandvallet, Longuet, Le Troquer, Maurin, Mayéras, Mistral, Poisson, Renaudel, citoyenne Saumoneau, Sembat ou leurs suppléants.

Ont voté contre : Bloch, Bureau, Cartier, Frossard, Paul Louis, Loriot, Méric, Rappoport, Renoult, Ribaut, Tommasi, ou leurs suppléants.

S'est abstenu : Verfeuil.

Le secrétaire : L.–O. Frossard.

 

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Le parti communiste ouvrier allema​nd et la IIIe Internationale

Berlin, 20 décembre. - (Par lettre.) - La Kommunistische Arbeiter Zeitung, organe du parti communiste ouvrier, annonce que le parti communiste ouvrier (K. A. P. D.) a été admis le 5 décembre comme membre sympathisant de l'Internationale communiste, et a depuis cette date un représentant permanent dans son Comité exécutif.

Le délégué des communistes et néo-communistes allemands a voté contre la reconnaissance du K. A. P. D. ; le délégué bulgare s'est abstenu. Le parti communiste ouvrier a fait une déclaration préalable par laquelle il disait ne renoncer en aucun cas à son programme, particulièrement dans la question des syndicats, de l'Union générale des travailleurs et du parlementarisme.

On se rappelle que le parti communiste ouvrier avait été exclu du parti communiste après le congrès d'Heidelberg, au mois d'octobre 1919. Au dernier congrès communiste de Berlin, son admission dans la IIIe Internationale comme membre sympathisant avait été repoussée à l'unanimité malgré l'avis de Zinoviev. La thèse soutenue par Paul Lévi était que le K. A. P. D. n'avait qu'à se soumettre au parti communiste. - F.C.

 

Indépendants et communistes fusionnent au Reichstag

Berlin, 23 décembre. - Au Reichstag, les partis indépendant et communiste ont fusionné. - (Havas.)

 

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La libération de Max Levin à Vienne

Vienne, 20 décembre. - Le communiste Max Levin, qui s'était réfugié à Vienne après la chute du gouvernement des Soviets à Munich et qui avait été interné en Autriche, vient d'être mis en liberté.

 

 

 

- « parlons sérieusement », par Sixte-Quenin [Mais ce parti de classe va-t-il permettre, ou interdire, la continuation de la collaboration des communistes des Bouches-du-Rhône, du Vaucluse, du Rhône, du Gard, de l'Hérault, de la Loire, de la Seine - je dois en passer - avec les radicaux, ou socialistes indépendants, qui firent liste commune avec eux aux élections municipales ?]

- « avant le Congrès » : réunion du Comité de résistance socialiste le soir même à Tours

- « le vote des fédérations » : Eure ; Haute-Loire ; Basses-Pyrénées ; Sarthe, avec vote d’une motion

- compte-rendu de la séance du 17 décembre de la C.A.P de la SFIO [Au nom de la minorité, le citoyen Frossard déclare ne pouvoir s'associer à cet ordre du jour. Il est néanmoins voté par 12 voix contre 11 et une abstention.]

- « le Parti communiste ouvrier allemand et la IIIe Internationale » [adhésion à l’IC en dépit  de l’opposition des communistes et néo-communistes allemands, qui ont voté contre la reconnaissance du K. A. P. D.]

- « indépendants et communistes fusionnent au Reichstag »

- « la libération de Max Levin à Vienne »

 

le 22 décembre 2020

 
 

Il y a cent ans : L'Humanité au jour le jour

 
 
« Le bonheur est une idée neuve en Europe. » Saint-Just (révolutionnaire français, 1767-1794)