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Centenaire du PCF, au jour le jour : L'Humanité du samedi 18 décembre 1920

L'Humanité, journal socialiste quotidien

À partir du site internet Gallica, de la Bibliothèque nationale de France

 

L'Humanité du samedi 18 décembre 1920

 

 

L'Unité que nous voulons - par Varine

Paul Faure avait prévu que la quasi-unanimité des militants éprouveraient un « haut-le-cœur » à la lecture des thèses des conditions de l'Internationale Communiste. Les congrès fédéraux du Parti répondent à cette assertion avec l'éloquence des chiffres. La Fédération de la Seine a donné 10 000 voix de majorité, la plupart des fédérations donnent une forte majorité, à la résolution du Comité de la IIIe Internationale, incorporant thèses et conditions de Moscou, et appelée aussi motion Cachin–Frossard. Paul Faure ne s'était pas trompé en prévoyant un « haut-le-cœur » ; mais c'est en lisant le Populaire que les militants l'ont ressenti.

N'étant pas suspect d'adoration du plus grand nombre pour le nombre, après cinq années de travail modeste et ingrat dans les rangs de la minorité dont le Congrès de Tours consacrera l'avènement à la direction du Parti, et après avoir prouvé par nos écrits que notre souci d'exprimer avec le maximum de netteté le point de vue communiste, l'emportait sur toute autre préoccupation, nous avons aujourd'hui le droit d'accorder une grande importance au déplacement de la majorité.

Il en est qui considèrent ce déplacement comme une simple fluctuation de la lutte de préséance de fractions rivales, comme la péripétie d'une compétition de prépondérance, que d'autres fluctuations et péripéties pourront compenser. Ces aveugles ne voient pas quelle évolution oriente simultanément les prolétariat de tous les pays vers un seul et même but : l'abolition du régime capitaliste, et ils ne comprennent pas que le parti de classe du prolétariat recoure à des méthodes de combat de plus en plus directes, de plus en plus offensives, à mesure qu'il perçoit plus nettement que la force est le seul moyen décisif d'affranchissement du travail. Partant, ils s'offusquent des prétentions de cette Internationale Communiste qui entend conduire la rébellion mondiale des exploités et des opprimés en adoptant les procédés reconnus comme indispensables dans la guerre moderne, civile ou étrangère : unité d'organisation, unité de direction, unité de plan, coordination d'action, répression de la trahison, etc. Leur indignation s'explique fort bien du fait qu'ils ne conçoivent nullement la période historique actuelle comme celle de la « lutte finale » du prolétariat contre la bourgeoisie. Pour eux, rien n'est fondamentalement modifié depuis la guerre dans les rapports sociaux et les conditions économiques, leur seule ambition est de gagner au Parti quelques sièges supplémentaires au Parlement, tous les quatre ans, et de provoquer de temps en temps une crise ministérielle. Les communistes qui leur parlent d'expropriation des expropriateurs, de dictature du prolétariat, de révolution, leur paraissent échappés d'un autre monde.

Deux conceptions aussi opposées de la politique du prolétariat, la nouvelle et l'ancienne, ne se peuvent concilier et harmoniser : voilà ce que la majorité du Parti comprend aujourd'hui, si nous interprétons bien le sens de ses déterminations. En votant notre résolution, le Parti rompt avec un passé chargé d'erreurs et d'illusions. Une vie nouvelle va commencer pour lui.

Les « reconstructeurs » et les « résistants » semblent ne pas s'y résigner aisément. On conçoit leur mélancolie, mais leur accès de fureur sont pour étonner. Depuis quand la majorité d'un Parti n'est-elle plus libre de décider de sa politique ? Si cette politique n'agrée pas aux majoritaires d'hier, qui les empêche de fonder un parti qui répondra à leurs conceptions ? Au nom de quoi prétendraient-ils nous imposer leur collaboration que nous repoussons ?

Au nom de « l'unité », disent-ils. Parlons-en. Mais parlons-en franchement, explicitement et sans rien dissimuler de notre pensée. Ne discutons pas d'unité comme des aveugles discuteraient de couleurs. Que celui qui invoque l'unité dise tout haut ce qu'il entend par là. Qui prononce le mot unité sans en préciser le contenu manque de probité intellectuelle. Il y a trop longtemps que le prolétariat est trahi au nom de nous ne savons quelle unité, pour que nous reconnaissions une vertu magique à l'expression d'un vocable galvaudé.

L’unité, est-ce la faculté pour des membres du Parti de servir la bourgeoisie ? Est-ce le droit d'Albert Thomas de travailler dans le camp de l'ennemi ? Est-ce que le droit de Renaudel de se montrer solidaire de Pilsudski, massacreur d'ouvriers et de paysans russes et polonais ? Est-ce le droit de Delory, de Jules Uhry, de fraterniser avec les ministres et les généraux de la République bourgeoise, tourmenteuse de la République prolétarienne russe, chienne enragée de l'Europe ? Est-ce le droit de Longuet de tromper son Parti, comme il le fait chaque fois qu'il prétend le renseigner, comme il le fait (pour ne citer qu'un exemple entre mille) quand il présente J.–H. Thomas, leader traître du Labour Party, défenseur de l'impérialisme britannique, partisan de la monarchie, comme un révolutionnaire de toute confiance ? Est-ce le droit du Populaire de calomnier les communistes de Hongrie, d'Allemagne, de Pologne, d'Amérique ? Est-ce le droit de Lebas de dénoncer dans les sections du Nord Loriot comme un anarchiste ?

Si c'est cela, votre unité, dites-le. Si ce n'est pas cela, dites ce que c'est.

Nous, nous avons dit clairement comment nous comprenons l'unité. Elle est le rassemblement dans un même parti de tous ceux qui acceptent les thèses de l'Internationale Communiste, qui observent la discipline du Parti et de l'Internationale, qui conforment leurs actes à leurs engagements. Cela signifie que ceux qui repoussent le programme de l'Internationale Communiste doivent sortir du Parti et que les syndicalistes qui approuvent ce programme doivent y entrer.

Si notre définition de l'unité n'est pas assez claire, nous renonçons à exprimer notre pensée. Mais nous souhaitons seulement que nos contradicteurs disent ce qu'ils pensent avec la même clarté. Nous n'en demandons pas davantage.

Varine.

 

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Avant le Congrès National

Le vote des fédérations

Ardèche

Cachin-Frossard, 5 mandats ; Longuet-Faure, 7.

Aude

Cachin-Frossard, 60 voix ; adhésions avec réserves, 49 voix ; [Haute-Vienne, 50 voix.]

Cantal

Cachin-Frossard, 13 mandats ; Longuet-Faure, 13 ; Blum-Paoli, 7.

Cher

Cachin-Frossard, 24 mandats ; Longuet-Faure, 5 ; Blum-Paoli, 2.

Charente-Inférieure

Cachin-Frossard, 29 mandats ; Longuet-Faure, 8 ; Blum-Paoli, 8 ; abstention, 1.

Deux-Sèvres

Cachin-Frossard, 9 mandats ; Longuet-Faure, 3.

Haute-Marne

Cachin-Frossard, 9 mandats ; Longuet-Faure, 2 ; Blum-Paoli, 1.

Haute-Saône

Le Congrès extraordinaire de la Fédération Socialiste de la Haute-Saône s'est tenu, le dimanche 12 décembre, à Port-sur-Saône. L'ordre du jour suivant a été voté par 40 voix contre 1 et 5 abstentions :

La Fédération de la Haute-Saône, approuvant les réserves formulées dans la motion d'adhésion Longuet-Paul Faurel à la IIIe Internationale, et tenant compte des résultats obtenus à la Conférence internationale de Berne, donne à ses délégués un « mandat facultatif », leur laissant le soin de s'inspirer dans leurs votes des intérêts supérieurs de l'Unité socialiste.

Indre

Cachin-Frossard, 10 mandats ; avec réserves, 2.

Morbihan

Cachin-Frossard, 10 mandats ; Longuet-Faure, 4 ; Blum-Paoli, 2.

Saône-et-Loire

Cachin-Frossard, 55 mandats ; Longuet-Faure, 15 ; Blum-Paoli, 7.

Vendée

Cachin-Frossard, 4 mandats ; Longuet-Faure, 1 ; Blum-Paoli, 1.

 
 
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Groupe Socialiste au Parlement

Extrait du procès-verbal de la séance du jeudi 16 décembre 1920

Présents : […]

La séance est ouverte à 10 heures du matin sous la présidence du citoyen Pressemane.

Communications diverses. - Le secrétaire donne lecture de diverses lettres dont il est pris acte ou qui sont renvoyées aux sous-commissions.

Délégation au Congrès national. - Sont désignés : Goude, Lafont, F. Morin, Paul-Boncour, Léon Blum, délégués titulaires ; André Berthon et Aubry, délégués suppléants au Congrès de Tours.

Les résolutions de la Fédération de la Seine et le rapport du groupe au Congrès. - Léon Blum expose que le groupe s'est strictement conformé à l'action prescrite par le pacte d'unité et le programme du Parti. La résolution de la Seine est injustifiée, il demande au groupe d'examiner la situation créée par le vote de cette résolution.

Compère-Morel estime que les camarades qui sont de cœur avec la IIIe Internationale doivent dire ce qu'ils pensent de l'action menée en commun.

Goude. - Élus sur un programme adopté par le Parti, les élus y sont restés fidèles et le camarade Vaillant–Couturier, qui médit de leur action, n'a jamais, sauf une fois, assisté aux séances du groupe.

Aussoleil. - Les statuts du Parti prévoient le contrôle sur les élus ; il a participé à l'action du groupe qui a été unanime ; le groupe n'a qu'à répondre aux critiques devant le Congrès.

E. Lafon juge que la résolution de la Seine est hétérodoxe et peu conforme aux thèses communistes.

Maurel, partisan de la IIIe internationale, a collaboré avec le groupe dans son action et se solidarise avec lui dans l'action d'aujourd'hui dictée par le Parti, comme après Tours il suivra avec la même fidélité la nouvelle politique du Parti.

J. Mouret. - La motion de la Seine tend à discréditer l'action parlementaire, cette action se défend par elle-même et répond victorieusement à toutes les critiques. Il restera toujours fidèle au programme socialiste.

J. Lebas. - Parmi les camarades de la IIIe Internationale les uns sont absents, les présents se solidarisent avec l'unanimité du groupe. La motion de la Seine condamne le contre-projet socialiste de nationalisation signé par tous les membres du groupe, projet soutenu en accord avec le C.E.T. de la CGT. Il faut rester socialiste et non anarchisant, en défendant l'œuvre du groupe nous défendrons la politique du Parti socialiste.

J. Parvy. - En mai dernier, on a déclenché une grève qui a laissé des milliers d'ouvriers dans la misère, pour réclamer la nationalisation industrialisée, et on critique ensuite les élus défendant cette idée. L'auteur de la motion, maire de banlieue, ne peut, à sa mairie, faire œuvre révolutionnaire. Quant aux interpellations sur la politique extérieure, ce sont toujours des élus de la IIIe Internationale qui les ont défendues à la tribune. Parvy reste socialiste contrairement à ceux qui retournent à l'anarchie.

Georges Lévy regrette les attaques contre les absents. La Fédération de la Seine a le droit d'avoir une opinion, comme le groupe a le droit de la discuter. Lévy a fait la même politique que l'ensemble du groupe, s'inclinant devant la majorité. Après Tours, il faudra s'incliner devant la nouvelle volonté du Parti. Le seul tort de la Seine c'est d'avoir juger le passé avec les gens de l'avenir.

J. Uhry. - Toutes les interventions du groupe ont été signées ou approuvées par tous ses membres. Les élus extrémistes de la Seine auraient dû défendre l'œuvre du groupe devant leur Fédération. Cachin a toujours parlé et exprimé la pensée unanime du groupe dans la politique extérieure et Vaillant-Couturier à tort de ridiculiser les élus ouvriers en public.

F. Morin. - La minorité n'a pas eu à s'incliner devant la majorité, aucune initiative révolutionnaire à la Chambre n'ayant été proposée par eux et repoussée par le groupe.

Compère-Morel. - Il faut mandater Blum pour dire au Congrès que le groupe a fidèlement rempli le mandat reçu du Parti.

Goude. - Blum devra parler au nom du groupe au Congrès, mais il faut voter une réplique à la Seine, pour les Fédérations qui ne se sont pas encore réunies.

Evrard demande que le procès-verbal détaillé soit publié par l’Humanité en première ou deuxième page.

Varenne. - Il convient qu'il y ait un vote du groupe.

Léon Blum propose l'ordre du jour suivant :

« Le groupe constatant l'accord unanime de tous ses membres sur la politique pratiquée depuis le début de la législature, conformément aux statuts et au programme du Parti, passe à l'ordre du jour. »

Cet ordre du jour est voté à l'unanimité.

Léon Blum est mandaté pour parler au nom du groupe au Congrès national.

Le groupe décide que le procès-verbal sera publié en bonne place dans l’Humanité.

J. Uhry demande si dans l'interpellation de demain, Cachin parlera en communiste ou en accord avec le groupe.

J. Parvy. - Cachin parlera suivant son tempérament et il exprimera, soyez-en sûrs, la pensée du groupe.

Moutet. - À la Commission des affaires extérieures, Cachin est d'accord avec moi contre les extrémistes de droite. On pourrait lui demander avant la séance de demain s'il parlera en accord avec le groupe.

Bracke. - Le groupe n'a pas demander à Cachin ce qu'il dira ; l'interpellation de demain est la suite d'une précédente interpellation ; Cachin et moi, nous exposerons la même politique qui a déjà été défendue.

Aussoleil propose l'ordre du jour suivant :

« Le groupe socialiste au Parlement se déclare prêt à pratiquer avec discipline demain comme hier une politique conforme à celle de la majorité du Parti. »

Ferrand. - L'heure est tardive, je demande l'ajournement.

L'ajournement mis aux voix est voté à l'unanimité moins quatre voix. La séance est levée à midi dix.

Le secrétaire : Léon Blum.

 
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La dictature bourgeoise

50 jours de prison pour avoir vendu une brochure

Avant-hier 16 décembre le tribunal de Dieppe a condamné notre ami Briard - « coupable d'avoir mis en vente la brochure : Vive la République des Soviets, dans un but de propagande anarchiste (!!!) », à cinquante jours de prison.

Nous demandons à M. le garde des sceaux de bien vouloir donner de l'avancement aux trois dévoués magistrats qui viennent de faire si consciencieusement leur métier.

 

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La C.G.T. devant le tribunal

La journée des plaidoiries

Que nous voici loin des petits marchandages quotidiens dont la correctionnelle est le théâtre ! C'est tout le droit de la classe ouvrière à puiser en elle les forces qui édifieront l'avenir qui fut discuté, démontré, magnifié.

Une salle attentive et émue a suivi les discours de nos amis.

La plaidoirie admirable de Paul–Boncourt a-t-elle convaincu les juges ? Elle a, en tout cas, par sa clarté éloquente et son irréfutable dialectique, apporté aux consciences troublées, aux esprits indécis, un aliment tonique et substantiel. Plus d'un des jeunes stagiaires que la curiosité avai[en]t attirés s'en retourna conquis. C'est le résultat immédiat de toutes les poursuites de ce genre, de servir l'idée qu'on persécute en lui donnant de nouvelles tribunes et de nouveaux moyens d'expansion.

Pierre Laval

C'est Laval qui plaide le premier.

Il définit la tâche de la défense et comment les avocats ont divisé le travail.

Puis il résume le procès et examine les griefs du réquisitoire.

Pourquoi poursuit-on la C.G.T. ?

Laval rappelle les campagnes de naguère, l'antipatriotisme, l'antimilitarisme, le sou du soldat.

Que faisait donc alors le gouvernement ? Et pourquoi a-t-il engagé cette action à propos d'une grève ? La grève n'est-elle pas un droit absolu ?

Ce n'est pas la C.G.T. qui a décidé la grève des cheminots ; elle l'a appuyée, soutenue, comme elle le devait, parce que c'est sa tâche essentielle de guider le prolétariat dans son action, quelquefois même de l'apaiser. Mais le but lui-même de la grève : la nationalisation, n'est-il pas licite ? C.G.T. et gouvernement ont fréquemment discuté ; ce dernier a même proposé d'en faire un essai sur la ligne de Grenoble à La Mure.

Laval étudie ensuite la constitution du Conseil Économique du Travail. Le gouvernement l'a connu, s'est entretenu avec lui. Il fut fondé après la guerre, au moment où la C.G.T. voulut étudier l'œuvre de reconstruction économique de la nation.

Dans une éloquente péroraison, Laval adjure les juges de ne point écouter la suggestion du Parquet : dissoudre la C.G.T. Ce serait se dresser contre la classe ouvrière et renoncer à la tradition de liberté qu'est la nôtre.

Le discours de Paul–Boncour

Pendant plus de deux heures, Paul–Boncour va plaider en droit. Mais, à chaque moment, le ton s'élève, l'orateur atteint le problème social dans sa complexité et sa profondeur ; cette histoire du droit de grève, du droit d'association qu'il développe, le conduit à envisager l'avenir, l'entraîne à indiquer le droit de demain, à esquisser la société nouvelle.

Pas de moyens oratoire, au sens vulgaire du mot. C'est une éloquence intérieure, contenue, qui vient de la hauteur de la pensée, de la précision, de l'élégance, de la vigueur même de la forme. Et l'émotion, nuancée, discrète, est plus communicative par la pureté de sa source et la distinction de l'expression.

Le discours de Paul-Boncour sera certainement publié. J'essaierai ici de le résumer brièvement sans le trahir ; les lecteurs de l’Humanité se reporteront bientôt au texte complet.

L'orateur s'attache à démontrer que rien, dans les lois ni la Constitution, n'autorise les poursuites.

La grève est un droit absolu, quelles que soient sa raison et son origine. Et ce n'est que parce qu'elle a soutenu la grève des cheminots que la C.G.T. est aujourd'hui menacée.

A-t-elle violé les lois de 1864 et 1884 ?

Paul–Boncour se reporte aux discussions parlementaires et fait de frappantes lectures.

Émile Ollivier défendît, en 1864, le droit de grève dans tous les cas.

Quant à Waldeck-Rousseau, il ne mettait point de limite à l'activité organisée de la classe ouvrière à qui, même si elle paraissait menacer l'ordre social, on doit toujours faire confiance.

Et ce droit peut-il être fragmenté ? Cette action ne doit-elle être que poussière ? Waldeck-Rousseau prévoyait déjà et admettait, il défendait même contre la droite du Sénat, l'organisation d'une sorte de syndicat suprême, ce que représente la C.G.T.

Étendant sa pensée, il se refusait à limiter son champ d'action, lui permettant de s'intéresser à toutes les grandes questions sociales.

Ainsi, illimitée dans son étendue, l'action de la C.G.T. peut-elle être aujourd'hui condamnée dans son objet ?

Paul–Boncour réfute le passage du réquisitoire qui traite de la nationalisation.

Est-ce un crime de la proposer ? Elle est dans l'ancien programme de certains républicains, dans le fameux programme de Saint-Mandé, dont M. Millerand est le père. N'y a-t-il point là comme une suprême immoralité de le voir poursuivre l'enseignement qu'il a donné ?

La fin du discours fut un magnifique éloge de la classe ouvrière et de sa vigoureuse clairvoyance, un tableau coloré de ses plus chères aspirations.

Son droit et son devoir l'obligent à construire cette société nouvelle que la légalité ne peut atteindre ni détruire.

Quand Paul-Boncour a terminé, c'est dans le silence que la salle se vide.

Aujourd'hui, plaidoiries d'André Berton, d'Ernest Lafont et de René Bloch.

 

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Une victoire des syndicalistes minoritaires

Monmousseau, Tommasi et Dudilieux sont élus secrétaires de l'Union des Syndicats

Hier soir, dans la salle de l'avenue Mathurin–Moreau, au cours de la réunion extraordinaire du Comité général, ont eu lieu les élections des trois secrétaires et des membres de la Commission exécutive de l'Union des Syndicats de la Seine.

Monmousseau, Tommasi et Dudilieux ont été nommés secrétaires de l'Union.

Voici les résultats : Monmousseau, 100 voix ; Tommasi, 99 voix ; Dudiieux, 95.

Les candidats de la liste majoritaire ont obtenu respectivement : Passerat, 71 voix ; Capocci, 70 voix ; Cézan, 69 voix.

L'événement est extrêmement important, et on ne peut douter qu'il n'ait sur l'ensemble du mouvement ouvrier français une influence considérable.

Il n'est pas inutile de rappeler à la suite de quelles circonstances le bureau de l'Union a été amené à donner sa démission. Outre qu'il avait été mis en minorité par le dernier congrès, il se trouvait dans l'impossibilité de se représenter, puisque, en vertu des nouveaux statuts, les secrétaires ne sont plus désignés par leurs syndicats respectifs.

D'autres part, le mandat de la Commission exécutive arrivait à expiration à la fin de l'année ; le moment était donc venu de procéder à son renouvellement.

Deux liste étaient en présence : la liste des Comités syndicalistes révolutionnaires (C. S. R.), dont la déclaration, nette et sans équivoque, préconisait le retour aux méthodes syndicalistes d'avant la guerre, ainsi que l'adhésion à l'Internationale syndicale de Moscou, et la liste « majoritaire », qui faisait sien le programme réformiste des dirigeants actuels de la C.G.T.

Les délégués étaient donc prévenus : ils savaient qu'ils avaient à prendre parti soit pour le syndicalisme révolutionnaire et communiste, soit pour le réformisme syndical. La thèse des C. S. R. remporte la victoire, tandis que celle du Bureau confédéral est battue.

Grâce a l'organisation des C. S. R., les minoritaires ont vu grossir leurs effectifs depuis le Congrès d'Orléans, où, on s'en souvient, 591 syndicats s'étaient prononcés contre le rapport moral de la C.G.T. Le vote d'hier donne à la minorité une force matérielle et morale telle qu'il n'est pas défendu de penser qu'en septembre prochain, au Congrès confédéral de Lille, la minorité pourrait bien devenir majorité.

Un autre point, dès aujourd'hui, doit retenir notre attention. En désignant Monmousseau pour le poste de secrétaire général de l'Union, le prolétariat organisé de la Seine a voulu protester contre l'inculpation dont Monmousseau est l'objet et, partant, se solidariser non seulement avec lui, mais avec tous les inculpés du pseudo-complot ourdi par les policiers et les juges du Bloc National.

La besogne qu'auront à accomplir les nouveaux secrétaires et la nouvelle Commission exécutive est d'importance. Avant tout, il leur faudra procéder au regroupement des forces ouvrières, dispersées depuis les grèves de mai. Une propagande nettement révolutionnaire, une préparation méthodique des cadres, un renforcement de l'action quotidienne leur permettront de rendre au syndicalisme toute sa force d'attraction. Mais le nouveau bureau est composé d'hommes qui savent ce qu'ils veulent et qui sont résolus à ne rien négliger pour atteindre l'objectif qu'ils se sont assigné. Toute la sympathie du prolétariat les suivra dans leurs œuvres.

On trouvera en dernière heure, à la troisième page, les résultats des élections de la Commission exécutive.

 

 

- « L’Unité que nous voulons » par Varine [(l’Unité,) Est-ce le droit de Delory, de Jules Uhry, de fraterniser avec les ministres et les généraux de la République bourgeoise, tourmenteuse de la République prolétarienne russe, chienne enragée de l'Europe ?]

- « le vote des Fédérations », avec les mandats en Ardèche, Aude, Cantal, Cher, Charente-Inférieure, Deux-Sèvres, Haute-Marne, Haute-Saône, Indre, Morbihan, Saône-et-Loire, Vendée

- extrait du PV de la séance du 16 décembre du groupe socialiste au Parlement », avec réaction à la résolution votée lors du congrès de la Fédération de la Seine [J. Uhry demande si dans l'interpellation de demain, Cachin parlera en communiste ou en accord avec le groupe. - J. Parvy. - Cachin parlera suivant son tempérament et il exprimera, soyez-en sûrs, la pensée du groupe.]

- « la dictature bourgeoise : 50 jours de prison pour avoir vendu une brochure », suite à la condamnation de Briard par le tribunal de Dieppe

- « la CGT devant le tribunal - la journée des plaidoiries » [Son droit et son devoir l'obligent à construire cette société nouvelle que la légalité ne peut atteindre ni détruire.]

- « une victoire des syndicats minoritaires : Monmousseau, Tommasi et Dudilieux sont élus secrétaires de l’Union des Syndicats » de la Seine [Les délégués étaient donc prévenus : ils savaient qu'ils avaient à prendre parti soit pour le syndicalisme révolutionnaire et communiste, soit pour le réformisme syndical.]

 

le 17 December 2020

 
 

Il y a cent ans : L'Humanité au jour le jour

 
 
« Le bonheur est une idée neuve en Europe. » Saint-Just (révolutionnaire français, 1767-1794)