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Risques industriels : une question politique, Jean Claude Cheinet

le 12 mai 2014

Les risques industriels peuvent être abordés à travers de multiples aspects ; nous nous intéressons ici à leur traitement dans la législation en France et à travers la nouvelle donne des PPRT (Plans de Prévention des Risques Technologiques).

Les ateliers médiévaux ou les manufactures ont pu provoquer des nuisances mais rarement des risques au sens où la grande industrie a pu en générer dès le XIXe siècle. Les mines avec la catastrophe de Courrières (1906), la sidérurgie et la chimie ont connu maints accidents et des morts trop nombreux.

S’il ne s’agissait que de prendre quelques mesures techniques, nous aurions un beau thème consensuel. Mais les industriels sont pris entre la nécessité de préserver certes leurs investissements en locaux et machines et d’autre part l’urgence à les utiliser au maximum avec le moins de salariés possible pour maximiser le profit. Ce qui conduit à des gestions à risques.

Le risque technologique est au cœur du capitalisme industriel productiviste.

200 ans de lois et règlements

Les fondements sont posés dès la Déclaration des Droits de l’Homme qui place à égalité les droits à la liberté (d’entreprendre), à la sûreté et à la propriété. Certes la liberté de chacun ne doit pas nuire à autrui, ce qui justifie que les usines soient soumises à autorisation de la part de l’administration selon les lois de 1810 puis de 1917. Côtés salariés la loi impose, notamment en 1945, représentants du personnel et CHS (devenus CHSCT ensuite). La loi de 1976, prolongée par les premières directives Seveso (1982 puis 1984), crée des inspecteurs spécialisés et oblige les communes à informer la population de risques potentiels; industriels et pouvoirs publics devant élaborer études de dangers et plans de secours. Ainsi au nom de la défense de la propriété, l’industriel protège ses « secrets de fabrication » et gère comme il l’entend (et selon les lois réglementant le travail) ; mais il ne doit pas porter atteinte à la jouissance de leur droit de propriété par les riverains et voisins. L’état est le garant de cet équilibre dans l’égalité pour tous. Ainsi la responsabilité de l’industriel est une constante de la législation avec l’obligation de limiter les risques à la source ; maîtriser la SÛRETÉ de l’installation et non établir une «SÉCURITÉ » qui ne peut être à 100 % (le risque zéro n’existe pas).

L'aiguillon des principaux intéressés

Toutefois les salariés ont dû dès le début agir collectivement dans leurs entreprises pour faire respecter cette obligation toute théorique, d’autant qu’en cas d’accident ils en sont les premières victimes. La situation d’exploités et de dominés des salariés place l’investissement pour les conditions de travail en variable d’ajustement a priori secondaire et négligée. La longue lutte pour les conditions de travail commence en même temps que l’industrie elle-même. Des lois consacrent cette lutte avec l’institution des délégués élus du personnel et la création des CHS devenus CHSCT. Course de vitesse entre travailleurs et directions d’usines, d’autant que les procédés de fabrication changent et avec eux les produits manipulés. Avec le rôle croissant de l’Union européenne et la circulaire «Reach», on aurait pu penser à une plus grande transparence limitant la dangerosité mais l’inventaire et l’analyse sont confiés aux industriels eux-mêmes ce qui leur permet de manifester un enthousiasme négatif et les rend aussi juges et parties. 2001, la crise, le déclin industriel et l'accident de AZF

La population a été utilisée dans ces luttes à travers les questions environnementales. D’abord par les industriels, comme cette firme de pâtes alimentaires qui, voulant fermer une usine du Nord, a encouragé les associations de pêcheurs de la rivière qu’elle polluait pour isoler ceux qui défendaient l’emploi… et donc la pollution! Ensuite l’argument sert pour vendre des produits réputés « verts ».

Mais l’explosion de l’usine AZF, à Toulouse en 2001, a, par le nombre des victimes et l’ampleur des dégâts en pleine ville, provoqué un choc et un débat mettant à nu forces et faiblesses des acteurs. D’abord les calculs froids des industriels et financiers qui, camouflés derrière leurs filiales et des boucs émissaires, fuient leurs responsabilités pour ne rien payer ; les ambiguïtés terribles des positions de défense de l’emploi au sens interne à l’usine qui dérivent vite vers la défense de l’industriel ; l’irruption des riverains comme acteurs ensuite, lesquels peuvent remettre en question la présence même d’une usine si elle présente un risque; les enjeux politiques aussi avec les récupérations par l’écologie politique ; enfin l’enjeu

idéologique majeur que constitue la possibilité ou non de faire coexister production industrielle et sécurité des populations pour un pays industriel moderne.

Dès lors, déclin et décroissance? que faire dans un pays dont les milieux dirigeants organisent la désindustrialisation?

Un renversement de la tradition législative

Dans l’émotion après l’accident de Toulouse, une commission d’enquête parlementaire a fait des préconisations traduites ensuite dans un projet de loi ; mais avec le retour de la droite au gouvernement en 2002, les industriels ayant fait un lobbying efficace, la loi dite « Bachelot » organise un retournement completde la démarche initiale.

Certes, elle enregistre quelques avancées pour la sûreté en entreprise (CHSCT de site etc...) rien que des procédures que le patronat (seul ?) sait gérer… Mais la création d’un fonds spécial dédié à la réduction des risques à la source et abondé par les industriels disparaît du projet. L’État peut préconiser cette réduction l’industriel mais cela dans des limites «économiquement acceptables» que seul détermine l’industriel. Ainsi la prévention se ramène à des mesures d’urbanisme en cercles concentriques autour du danger (les plans de prévention des risques technologiques PPRT comportant délaissement ou obligation de travaux) pour éloigner la population du risque, mais dont le coût est supporté par l’État, les collectivités locales (30 % chacun), les industriels (30 %) et le reste par les riverains eux-mêmes. L’industriel n’a que 30 % de la dépense générée par le risque qu’il provoque tandis que 70 % sont à la charge de la collectivité et des victimes! On voit vite qu’une réduction du risque à la source (100 % pris en charge par l’industriel) coûte moins que l’ensemble de ces mesures d’urbanisme… mais si on choisit cette dernière solution, l’industriel réduit certes sa dépense brute, et l’ensemble de la collectivité nationale supporte un coût bien plus élevé.

L’affaire est bien bordée ! La « concertation » prévue autour de ces mesures a été ensuite soigneusement circonscrite à quelques avis consultatifs de personnes désignées pour une part ou qui sont sous la pression de leurs employeurs pour les salariés et la Commission de Suivi de Site (CSS) ne peut pas se prononcer sur le seuil de l’«économiquement acceptable». Quant aux élus locaux emmenés par une association « Amaris » d’orientation social libérale, ils se sont le plus souvent contentés de demander la prise en charge des dépenses des riverains – leurs électeurs– par différents dispositifs.

Est-ce conforme à la constitution?

Car liberté, sûreté, jouissance de sa propriété sont à la racine de nos institutions: la Déclaration

des Droits de l’homme est en préambule de la Constitution. Or le danger qui « sort » de l’enceinte de l’usine est une atteinte et à la sûreté et à la jouissance de propriété des voisins.

L’admettre au détriment des victimes potentielles est une atteinte à la liberté d’autrui.

L’obligation de travaux faite à la victime du danger exonère l’industriel des obligations de sûreté de son installation et inverse complètement les responsabilités. Bien plus, en

Commandant et finançant ces travaux, le riverain victime de mise en danger reconnaît sa propre responsabilité et ne pourrait éventuellement plus bénéficier d’indemnités compensatoires en cas d’accident.

Les circonstances particulières de la production de biens socialement utiles expliquent le danger mais ne justifient pas l’acceptation du risque sans un contrôle clair et contradictoire par les parties et les institutions, sous peine d’arbitraire.

L’indemnisation doit être complète et préalable, ce que cette loi ignore tant sur le montant qui reste incertain, que sur son caractère préalable. Ce qui est nié, puisque le riverain doit faire l’avance des frais de travaux qui est éventuellement remboursée ensuite par le biais de crédits d’impôts.

Les principes qui fondent notre Constitution sont ainsi remis en cause.

Bien plus, en 2013 l’État a poussé les feux pour vite imposer ces mesures de PPRT avant que la directive Seveso 3 n’entre en vigueur (juillet 2015), laquelle réaffirme avec force la responsabilité de l’industriel pour réduire les risques à la source: «Les États membres veillent à ce que l'exploitant soit tenu de prendre toutes les mesures qui s'imposent pour prévenir les accidents majeurs et pour en limiter les conséquences sur la santé humaine et l'environnement».

Rassembler plus largement

Il y a un héritage de défiance entre salariés veillant à leur entreprise et à l’emploi d’une part et riverains soucieux de sécurité de l’autre. Les directions d’usines savent bien en jouer.

Pourtant les riverains sont souvent d’anciens salariés ou ont des salariés dans leurs familles; salariés, riverains, ingénieurs des ICPE (installations classées pour l’environnement), élus locaux n’ont rien qui les oppose et tous les motifs pour agir en commun. Un tel rassemblement est nécessaire pour s’opposer efficacement à la mécanique administrative de cette loi. Encore faut-il en construire les bases. Lorsque ce rassemblement a lieu, industriels et représentants de l’État connaissent un certain malaise à imposer ces mesures. Car il ne s’agit pas de refuser le principe de mesures de prévention des risques autour des usines. Mais il faut arriver à cerner les responsabilités et organiser les priorités: la réduction des risques à la source.

Pour cela la création d’un Fonds spécial alimenté par les acteurs, pourtant prévu dans les préconisations du «Rapport Loos » et sur le modèle du FIPOL créé auparavant pour une question de complexité comparable, qui a été évitée au seul bénéfice de l’industriel, doit être reprise.

La démocratie locale est la clef d’une confiance responsable et tout peut être discuté, notamment le « seuil d’acceptabilité économique » que l’industriel doit justifier.

L’indemnisation préalable des riverains touchés par d’éventuelles mesures n’est que justice.

Les obligations des assurances doivent être clarifiées pour les zones ainsi affectées.

L’enjeu de ce rassemblement reste de savoir si, au prétexte de sécurité, nous organisons la décroissance et le déclin ou si, les risques étant maîtrisés, la grande industrie sera acceptée en France, et si notre pays peut rester un grand pays industriel. Nous faire porteurs de l’idée de maîtrise des risques, c’est être acteurs de ce grand débat et rassembleurs.

 

JEAN CLAUDE CHEINET est membre du comité de rédaction de Progressistes. Il est l’ancien président du CYPRES (Centre d’information pour la prévention des risques majeurs), militant pour la sûreté industrielle.

 

Imagerie médicale et Thales : un potentiel sous-exploité, Jean Luc Maletras et Simone Cassette

le 12 mai 2014

Restaurer une filière française de l'imagerie médicale est un enjeu majeur pour l'amélioration de la santé. L'intervention des salariés de Thales pour en obtenir les moyens s'avère porteuse de l'intérêt général, alliant recherche publique, coopération et savoir-faire industriel.

Thales: un examen radiologique sur deux dans le monde

Un examen radiologique sur deux dans le monde utilise des détecteurs Thales. Les détecteurs sont « les yeux » des systèmes de radiologie. Ils font eux-mêmes partie d’un sous-ensemble permettant de traiter l’image, venant s’intégrer aux équipements de radiologie. Les technologies déployées pour réaliser ces sous-systèmes sont au cœur de la révolution majeure que connaît la radiologie : le passage du conventionnel au numérique. Un bond technologique comparable au passage de l’impression d’un film argentique à la photographie numérique, rendant l’image exploitable en temps réel.

Thales est le seul acteur mondial disposant d’une ligne de produits embrassant la totalité du marché de ces composants, dans le conventionnel avec l’entreprise TED XRIS, et dans le numérique avec l’entreprise Trixell. Les produits Thales équipent d’ailleurs plus de 100000 systèmes dans le monde. C’est un atout majeur alors que s’opère la transition vers le tout numérique. Les systèmes portables et plus ergonomiques de type Trixell, basés sur les détecteurs plans à haute résolution et de grande dimension (systèmes « ArtPix » récemment présentés dans les salons mondiaux) représentent le principal enjeu pour le développement futur de la radiologie.

Des performances de ces technologies, dépend le temps d’exposition des patients aux rayonnements ionisants durant les examens ou les interventions réalisées via l’imagerie interventionnelle. Les perspectives en matière d’échange, de partage d’images médicales, de stockage et d’archivage des données de santé des patients devraient leur éviter les examens redondants et contribuer à leur meilleure prise en charge. La qualité des images, leur résolution, favorisent le diagnostic précoce des tumeurs ou des affections. Autant d’éléments pour améliorer la santé publique, alléger son coût pour la Sécurité sociale, telle l’imagerie nterventionnelle qui se substitue déjà souvent à la chirurgie.

La France à la traîne pour les IRM

L’équipement du territoire français en imagerie médicale est insuffisant. La France accuse aussi un retard important en matière d’IRM, selon les professionnels de l’imagerie réunis au sein d’ISA (Imagerie, Santé, Avenir) : 10 machines par million d’habitants contre 19,5 en Europe et 27 en Allemagne.Et c’est Hitachi (2 500 IRM aux États-Unis) qui convoite le marché français à partir de sa base technique existant dans le pays. D’où un recours au scanner, plus irradiant, même si des recherches sur les sources utilisées promettent d’y remédier. Un effort d’équipement soutenu en IRM est nécessaire. En dépit des plans Cancer successifs, la France, avec un délai moyen d’attente de 32 jours, reste à la traîne. Les inégalités régionales se creusent entraînant un accès à la santé à deux vitesses. Qui ne connaît un cas de personne confrontée à l’angoisse de l’attente d’un examen et de soins ?

Autre retard: les hôpitaux publics peinent à disposer d’un système de gestion informatique des images médicales pour l’archivage, le stockage et la communication, souvent limités au seul usage de l’établissement qui en est doté. « Le dossier papier complété de films de radiologie dans les chemises cartonnées qui s’épaississent au fil du temps et trop souvent s’égarent, est encore d’actualité dans la majorité des établissements ».

Une filière en pleine croissance… avec ou sans nous?

Le secteur de l’imagerie médicale promet une croissance de l’ordre de 4 % par an. Des progrès technologiques considérables y sont attendus, susceptibles de conférer aux opérateurs des avantages certains sur un marché mondial évalué à 30 milliards d’euros.

Le marché de l’imagerie « conventionnelle » reste actif du fait du passage progressif au numérique des salles de radiologie existantes. General Electric, Philips, Siemens (qui détiennent 80 % du marché mondial de l’imagerie médicale) et Toshiba cherchent actuellement à se positionner en France sur le long terme avec des plateformes intégrées « clés en main » par des partenariats publics privés (PPP). Les grosses structures hospitalières se sont déjà équipées en équipements General Electric, permettant ainsi à ce groupe américain de dicter sa loi en France. La compatibilité ou l’interopérabilité des machines et des logiciels est un élément clé de la mise en place du système numérique pour éviter des gâchis coûteux.

Cette orientation consistant à créer des super-plateaux techniques sur lesquels les médecins se retrouvent opérateurs sans possibilités d’adapter les technologies en fonction de leurs besoins n’est pas la bonne voie. Elle permet au privé de verrouiller toute possibilité à nos hôpitaux d’évoluer pour de nombreuses années et de rentabiliser au maximum – pour les sociétés prestataires – les fournitures sans tenir compte des besoins réels des établissements. Si le regroupement de moyens de haute technicité est un impératif, ne faut-il pas aussi répartir sur le territoire, des moyens plus légers mais performants ? Et ce au plus près des patients pour l’aide au diagnostic ou le suivi, évitant l’hospitalisation (et donc parfois de longs déplacements) ou une longue attente pour accéder à ces plateformes.

Répondre aux besoins des professionnels de la santé et des patients

Les professionnels de santé, experts dans leurs disciplines, sont porteurs des besoins des patients ainsi que des attentes de progrès thérapeutiques. Ces besoins et attentes doivent guider la recherche pour déboucher sur des produits et des applications nouvelles apportant des réponses. En imagerie médicale, les besoins qu’ils expriment sont de trois ordres au moins:

maîtrise de la dose sans altération de la qualité de l’image et de la vitesse d’acquisition des données;

traitement de l’image permettant en particulier une reconstruction 3D rapide ;

mise en place et déploiement de systèmes d’information, d’échange, d’archivage et de partage des données numérisées (notamment d’images) au sein des hôpitaux et de la chaîne de prise en charge et de suivi du patient.

S’y ajoutent les perspectives des outils de simulation 3D pour la formation des professionnels de santé ou la simulation d’interventions chirurgicales complexes ou encore pour tester irtuellement l’effet des thérapies.

Thales, un vivier d’expertises de haute technologie à exploiter

Une variété de métiers Thales peut vite contribuer à l’amélioration des principaux éléments de l’imagerie médicale: le développement de nouvelles sources de rayons X, l’acquisition rapide des images, le stockage, la géolocalisation, la gestion et le partage de ces données en toute sécurité. Les perspectives ouvertes par les nouvelles technologies telles que la réalité augmentée, la robotique et les nanotechnologies peuvent accroître la qualité des prestations, la sécurité et le confort tant du personnel médical que des patients. Les applications sécurité et défense de Thales font appel à toutes ces capacités, pourquoi ne pas les utiliser pour aller enfin vers de vraies technologies duales, du militaire au civil ?

Le « pilotage » industriel du médical évolue vite : hier, les grands groupes de l’électromécanique étaient les fers de lance (tables orientables, rotation des sources et détecteurs), demain ce sera le tour des grands groupes et PME de l’électronique : les places se jouent aujourd’hui. Mais aucune entreprise française n’est dans la course, le dernier maillon, ayant été cédé à General Electric en 1987 par Thomson-CSF.

Or, de nombreuses start-up issues de la recherche ont émergé, à la merci des grands groupes étrangers déjà cités, dont l’objectif est d’utiliser les résultats de la recherche subventionnée.

Le rachat de ces start-up constitue une solution pour leur pérennité mais il est dommageable que les inventions françaises irriguent l’économie des autres pays !

Thales peut constituer un pivot industriel fort autour duquel se consoliderait ce tissu ntrepreneurial. La forme d’un tel partenariat reste à trouver (pourquoi pas en s’associant à EADS qui développe de la robotique?) en accord avec l’État. Les pôles de compétitivité Systematic, Medicen et Cap Digital se sont associés dès 2010 pour traiter le thème TIC (technologies de l’information) et de la communication et Santé. L’imagerie numérique constituait l’un des axes prioritaires. Thales peut-il ignorer cet engagement ? Au-delà des images, la gestion et la protection des données personnelles sont un enjeu considérable.

Des garanties doivent être fournies pour assurer une protection rigoureuse du secret médical et interdire la possibilité de discriminations préjudiciables aux personnes.

Les exemples de surveillance numérique indue montrent que le risque de récupération de données personnelles est loin d’être exclu. Or des masses de données sont produites et devraient être mises à disposition des chercheurs et des autorités sanitaires. À ce niveau, des outils puissants et des méthodologies issus du domaine de la Défense ne peuvent-ils pas être mis au service du stockage, de la protection et de la circulation (accès et circuits sécurisés) des données médicales ?

Un projet fédérateur aux implications immenses

Au-delà de l’analyse des moyens techniques, la CGT de Thales a engagé des discussions avec les ministères, les professionnels de la santé et des responsables de CHU. Son projet reçoit un bon accueil parce qu’il correspond à une vraie attente de partenaires orphelins d’un fédérateur de la filière « imagerie médicale » en France. Cependant, chez Thales, un tel projet doit être soutenu au premier chef par les salariés, pour élargir le périmètre du « cœur de métier » qui prévalait auprès de la direction du groupe. Sa position a évolué sur les possibilités d’intervention dans le domaine du numérique. Aller plus loin en analysant le potentiel echnologique afin d’identifier de nouvelles applications pour le médical (nouvelles sources et capteurs intégrés par exemple) et développer ainsi le secteur des technologies civiles est un objectif hautement souhaitable et réalisable.

*Jean Luc Maletras est consultant à Geris (cabinet Thales)

et Simone Cassette est chercheur à Thales recherches et technologies.

À voir : le projet du syndicat CGTThales sur www.imageriedavenir.fr

Législation europénne : comment sont régulées les coopérations entre entreprises, Alexis Coskun

le 12 mai 2014

Par exception au dogme concurrentiel, les coopérations entre entreprises sont en réalité une concession au besoin impératif de l'appareil productif européen de rester dans la course mondiale.

La question des coopérations industrielles en Europe est extrêmement importante à l’heure de la mondialisation. Il existe en effet une compétition féroce entre entreprises internationales pour la conquête de nouveaux marchés et notamment dans les secteurs à haute valeur ajoutée et de haute technologie. De plus, aujourd’hui, l’organisation mondiale des forces productives est dans un processus de régionalisation, à l’image des constructions interétatiques comme l’ASEAN (Association des nations de l’Asie du Sud-Est) ou l’ALENA (Accord de libreéchange nord-américain) qui se structurent comme des blocs de coopérations et d’échanges régionaux plus ou moins intégrés.

Contrairement à une idée largement répandue, le secteur industriel, que ce soit au plan national, européen ou mondial, est loin d’occuper une place secondaire dans la valeur totale des échanges économiques. Par exemple, à l’échelle européenne, 80% des exportations et des dépenses de recherche et développement sont liées à la production industrielle, ces données renforçant la nécessité d’une étude consacrée à ces grandes filières.

Pour comprendre la manière dont sont organisées les coopérations entre entreprises dans le cadre de l’Union européenne, il faut impérativement inscrire notre réflexion dans le cadre général qui préside à ces rapprochements.

Les vertus supposées d'un ordre concurrentiel extensif

Nous avons choisi de nous appuyer sur le concept développé par la doctrine juridique et économique de « l'ordre concurrentiel ». Une telle notion correspond à la tendance prégnante de l’UE à étendre les mécanismes de marché et les règles de concurrence qui lui sont afférentes à un nombre toujours plus important d’activités économiques, mais aussi sociales qui, longtemps, avaient été exclues de la régulation économique. De la même manière, ce concept doit s’entendre de la prégnance des règles de concurrence et de leur habilité à organiser et réguler la majeure partie des relations économiques au sein de l’Union européenne. Résumant l’approche, Michel Rainelli souligne que l’ordre concurrentiel correspond à deux mécanismes: « l’extension de la sphère du marché et plus généralement à la pénétration des valeurs liées au marché dans des sphères qui lui étaient étrangères, comme certains services publics. La seconde relève d’une croyance renouvelée dans les capacités des marchés à atteindre par eux-mêmes un équilibre, que toutes choses égales par ailleurs, l’intervention publique ne pourrait que perturber »(1). Une rapide digression sur l’importance de la concurrence comme toile de fond du fonctionnement de l’Union européenne n’est pas seulement nécessaire du fait de la présence forte dans les Traités, des règles de régulations économiques. Les coopérations entre entreprises, qui occupent le cœur de la présente contribution, s’inscrivent en effet complètement dans ce cadre.

Une prohibition théorique des ententes et positions dominantes

Dans l’Union européenne les coopérations entre entreprises dépendent du droit de la concurrence et sont divisées en deux grandes catégories : les accords verticaux (entre deux acteurs de la chaîne de production situés à des niveaux différents) et horizontaux (entre deux concurrents directs). L’article de référence qui concerne les accords entre entreprises est l’article 101 du Traité sur le Fonctionnement de l’Union Européenne. Il dispose que : « sont incompatibles avec le marché intérieur et interdits tous accords entre entreprises et toutes pratiques concertées qui sont susceptibles d'affecter le commerce entre États membres et qui ont pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l'intérieur du marché intérieur (...) ». Sont principalement visés, l’imposition de prix d’achats et de ventes, le contrôle ou la limitation de la production, la répartition des marchés et des sources d’approvisionnement, l’application de conditions défavorables aux concurrents, notamment dans les prestations fournies à d’autres entreprises. L’article 102 du TFUE (Traité sur le Fonctionnement de l’Union Européenne) recèle également une place non négligeable dans le traitement des ententes puisqu’il prohibe toute position dominante individuelle ou collective qui constituerait un abus et serait donc contraire aux règles de concurrence.

La coopération : exception « compétitive » tolérée, mais restreinte

A titre liminaire il faut donc souligner que la coopération entre entreprises n’est possible dans le cadre européen qu’aussi longtemps qu’un tel accord ne soit pas considéré comme portant une atteinte sérieuse à la concurrence. Des dérogations à un tel principe existent, tant que toute concurrence n’est pas éliminée, et l’étude des exemptions à ce contrôle strict des accords entre entreprises européennes nous permet de comprendre quelques éléments saillants de la stratégie industrielle européenne. Deux mécanismes existent et doivent ici être présentés: une entente définie comme anti- concurrentielle peut être exemptée de l’application de l’article 101 s’il est établi que l’accord en question permet des « gains d’efficience » substantiels, notamment lorsque la coopération entre les firmes entraîne « une diminution des coûts de transaction et de distribution des parties et (tend à) assurer à celles-ci un niveau optimal d’investissements et de ventes »(2).

La seconde option permet à des accords considérés comme étant porteurs d’une atteinte à la concurrence de s’appliquer, il s’agit des règlements d’exemption par bloc. L’étude de tels règlements est intéressante car elle permet véritablement de voir comment, au travers de la matrice du droit de la concurrence, l’Union européenne et plus précisément la Commission, qui bénéficie de compétences exclusives en la matière, peut orienter les objectifs de politique économique de la conclusion des accords entre entreprises. Ainsi, les principaux règlements d’exemption par catégories sont destinés aux accords de transfert de technologie et de recherche et développement. Ces deux textes sont destinés à faciliter la mise en commun des efforts de renforcement technologique, et le partage entre entreprises, y compris parfois concurrentes, des recherches bien souvent coûteuses.

Les possibilités d’exempter les accords entre entreprises des règles d’airain de la régulation concurrentielle sont donc fortement restreintes, notamment par des seuils précis qui oscillent classiquement entre 20 et 30% de parts de marchés des entreprises parties à l’accord et qui empêchent toute possibilité d’exemption pour des entreprises dépassant ce seuil, afin de lutter contre les abus collectifs de position dominante.

L’explication économique sous-jacente d’un tel choix réside dans la volonté de dirigeants européens, convaincus de la théorie des avantages comparatifs, chère à l’économiste Ricardo, de la nécessité de spé- cialiser l’appareil industriel européen dans les produits à haute valeur ajoutée et de haute technologie, afin d’atteindre une compétitivité internationale forte.

Ce serait une erreur de penser que la doctrine européenne en matière de concurrence constitue un « laisser- faire » complet. Bien au contraire, la concurrence est conçue comme étant un moyen, extrêmement puissant certes, d’assurer l’allocation optimale des richesses et partant, la compétitivité industrielle de l’Union européenne. Un tel processus est certes contestable et à mon sens inefficace, mais il faut en prendre conscience pour comprendre la manière dont est ordonnée la conduite de l’appareil productif européen et donc des accords entre entreprises.

Via le droit de la concurrence, l’Union européenne dessine une stratégie bien précise de la coopération entre firmes destinée à construire la compétitivité internationale du continent : des coopérations restreintes dans le temps et ciblées, principalement dans le cadre des hautes technologies et des coopérations, et qui doivent rester figées dans les règles du marché.

En réalité les grandes collaborations industrielles européennes, qu’il s’agisse d’Ariane ou d’Airbus sont d’abord et avant tout le fruit de la collaboration entre États directement.

Ce qu’il faut retenir de la conception européenne actuelle des accords entre entreprises, notamment pour ce qui concerne le domaine industriel, c’est tout d’abord une extrême méfiance envers ceux-ci. Ils ne sont possibles que s’ils ne remettent pas en cause les règles de concurrence, véritables lignes directrices idéologiques de l’organisation de l’appareil productif à l’échelle du continent.

ALEXIS COSKUN est doctorant à l’Université de Strasbourg.

(1) Michel Rainelli, L’ordre concurrentiel : approche d’un économiste, Mélange en l’honneur d’Antoine Pirovano, pp14-22.

(2) Règlement N°1/2003 du 16 décembre 2001 relatif à la mise en oeuvre des règles de concurrence prévues aux articles 81 et 82 du traité.

Erasmus : pour une mobilité étudiante véritablement démocratisée en Europe, Jérémy Roggy

le 12 mai 2014

Au sein de l’Union Européenne, la mobilité étudiante choisie est encore loin d’être démocratisée. À ce titre, il est essentiel de la promouvoir, aussi bien pour les formations des étudiants, que pour le progrès social, scientifique et industriel.

Bien loin de l’image de «l’Auberge espagnole » que les libéraux aiment à ressasser, la mobilité étudiante en Europe peut constituer un levier d’émancipation pour les étudiants, tout comme elle peut permettre le progrès social et scientifique en Europe.

L’exemple le plus emblématique de la mobilité étudiante dans l’Union européenne est de loin le programme Erasmus. Ce dernier permet entre autres aux étudiants en formation initiale d’effectuer un stage, un semestre voire une année universitaire entière dans un établissement d’enseignement supérieur dans un autre pays membre de l’Union Européenne. Cette mobilité présente à coup sûr des avantages importants en permettant aux étudiants d’acquérir de nouvelles connaissances, de nouveaux savoirfaire qui s’inscrivent dans leur projet d’études. De fait, une telle mobilité peut à première vue promouvoir la coopération scientifique en Europe.

Pourtant, seuls quelques centaines de milliers d’étudiants, soit 3 % des étudiants européens, bénéficient actuellement de ce fameux programme Erasmus. Le nouveau programme de mobilité, Erasmus+, risque bien d’accentuer cette tendance avec le financement de master à l’étranger par des prêts bancaires. S’installer à l’étranger ne se fait pas aussi facilement pour ces étudiants et ce, alors que l’austérité met à mal les services publics partout en Europe, notamment pour se loger. Pour prendre le cas de l’Espagne, les étudiants non-boursiers ne pourront plus prétendre à l’aide du ministère de l’Education pour le programme

Erasmus, et cette même aide est désormais restreinte à un seul semestre. Dans ce cadre, les étudiants européens des classes populaires risquent bien d’être mis hors-jeu à des degrés variés, avec cette logique d’austérité qui veut faire contribuer les étudiants pour financer leurs propres études.

Ce même programme Erasmus s’inscrit dans un cadre européen de concurrence, pour faire correspondre les formations et la recherche universitaires aux besoins immédiats de « l’économie de la connaissance ». En effet, la volonté affichée du patronat est de baisser le «coût» du travail, et l’autonomie des établissements, réalisée dans toute l’Europe, va dans ce sens. Avec des enseignements qui ne répondent qu’aux attentes du patronat local, les formations perdent à la fois leur cohérence, leur ambition et leur cadrage à l’échelle nationale et européenne. Pourtant, la cohérence des formations est essentielle pour proposer aux étudiants d’entrer dans le monde du travail dans de bonnes conditions, et notamment de reconnaître leurs qualifications dans les conventions collectives. La perte de cette cohérence conditionne ainsi grandement sur la première embauche des étudiants : ceux-ci sont toujours plus confrontés aux périodes de chômage et de précarité avant d’accéder à l’emploi stable. Dans le domaine de la recherche, l’exigence de brevetage des acquis dans le cadre des coopérations scientifiques donne un poids nouveau à quelques multinationales. Elles imposent leur vision court-termiste à la recherche, et cela se traduit par la course à l’innovation et la précarisation toujours plus accrue des jeunes chercheurs. Il est essentiel de promouvoir une mobilité vraiment démocratisée, qui ne vise pas à apporter des compétences restreintes aux étudiants comme cela se fait actuellement avec les crédits ECTS(1)qui morcellent les formations pour faire perdre leur cohérence. Une mobilité pensée pour apporter des qualifications solides et élargies aux étudiants, pour leur assurer une stabilité dans l’emploi et leur projet de vies partout en Europe.

À ce titre, il est plus qu’essentiel de créer de nouveaux leviers pour démocratiser cette mobilité. Tout d’abord, en créant des fonds européens et nationaux qui permettent le financement nécessaire d’allocations de mobilité, adaptées dans un premier temps aux réalités sociales des étudiants. Ensuite, avec la création d’un service public européen qui aide les étudiants à s’installer dans le pays d’accueil, mais aussi l’assurance de logements, d’un accès aux soins médicaux et aux transports gratuits ou peu chers, pour eux comme pour les étudiants du pays d’accueil. Enfin, il est primordial de rompre avec cette logique délétère de concurrence, de compétence, et de professionnalisation accrue. Plus que jamais, il s’agit d’assurer un véritable cadrage pédagogique pour ces programmes de mobilité, aussi bien pour les formations que pour les stages. Ceux-ci doivent se voir assurer une cohérence pédagogique marquée par un financement public conséquent qui promeut les conventions entre établissements d’enseignement supérieur et entre laboratoires dans une logique claire de coopération. Une coopération forte qui vise à promouvoir l’accès à l’enseignement supérieur, peu importent les origines sociales des étudiants, et qui fait de l’accès libre à la connaissance un fondement essentiel. Et ce, afin de se libérer des diktats du patronat européen, pour permettre le progrès social et scientifique en Europe.

 

Jérémy Roggy est étudiant. Il est responsable Erasmus au Conseil National de l'UEC (Union des Étudiants Communistes).

(1) ECTS: European Credit Transfert System. Une année universitaire validée dans son intégralité permet d’obtenir 60 crédits ECTS, crédits répartis entre chaque module

Peuples d'Europe, unissons-nous ! Anne Sabourin

le 12 mai 2014

Anne Sabourin est candidate aux élections européennes sur la liste d’Ile de France conduite par Patrick Le Hyaric. Elle nous livre ici une réflexion sur l’impérieuse nécessité d’unité dans les luttes et de coopération entre organisations de travailleurs et de citoyens devant le mur dressé partout par nos oppresseurs.

Depuis l’éclatement de la crise en 2008, la situation de l’emploi s’est considérablement dégradée en Europe. Plus de 26 millions d’Européens sont au chômage, soit 10 millions de plus qu’en 2008. Sept millions et demi de jeunes Européens ne travaillent pas, ne suivent pas d’études ou de formation. Mais la priorité de l’Union européenne demeure la protection des intérêts des marchés ! Les politiques d’austérité détruisent les services publics, les salaires baissent au nom de la nécessaire réduction du « coût du travail », la pauvreté et la précarité se développent vitesse grand V. Dans le climat de dépression qui s’abat sur tous ceux qui veulent le changement, voici quelques raisons d’espérer.

Face au rouleau compresseur de l’austérité, les peuples, les travailleurs des secteurs privés et publics ne sont pas restés sans voix. Nous avons assisté dans la dernière période à un regain des luttes de masse, des grèves générales, des journées d’action syndicale. C’est vrai surtout dans le sud de l’Europe, mais c’est de plus en plus vrai ailleurs, y compris dans les Balkans et les pays nordiques. Des convergences nouvelles sont apparues dans l’action entre organisations syndicales, mouvements sociaux, associations de chômeurs.

En Espagne par exemple, le 22 mars dernier, des « colonnes » syndicales d’enseignants, de mineurs, de métallos, de chômeurs, de jeunes « indignés», de personnes menacées d’expulsions locatives, des mouvements féministes ont convergé depuis tout le pays vers Madrid pour, ensemble, marcher « pour la dignité ». Près d’un million de personnes ont ainsi battu le pavé.

La recherche d’actions coordonnées au niveau européen se développe. Le 4 novembre 2012 a eu lieu une grève générale coordonnée dans 6 pays et des journées d’actions syndicales dans 22 autres. En juin2013, l’Altersummit d’Athènes a réuni des représentants de plus de 100 syndicats, réseaux, mouvements, personnalités politiques de gauche, tous engagés dans la recherche de solutions européennes, tous solidaires dans la crise. À l’appel de la Confédération Européenne des Syndicats, le 4 avril dernier, plus de 80000 syndicalistes de tous les pays de l’UE ont manifesté « contre l'austérité, pour des investissements, des emplois de qualité et pour l'égalité » à Bruxelles. Si la CES, créée en 1973, a pour activité principale le lobbying et le dialogue avec les institutions de l’Union européenne en tant que « partenaire social européen», elle a évolué depuis le début de la crise. Elle a, pour la première fois, combattu publiquement un traité européen: le fameux traité budgétaire rédigé par Nicolas Sarkozy et Angela Merkel. Sa Secrétaire générale, Bernadette Ségol, multiplie les interventions publiques portant une exigence claire de sortie des politiques d’austérité. Elle déclarait ainsi début avril: «Notre message est simple mais c’est un message que les responsables européens ne veulent pas entendre. Notre message est que leurs politiques en réponse à la crise financière ne suffisent pas et ont en réalité aggravé la crise sociale et économique. Notre message est que l’austérité ne fonctionne pas. L’Europe a besoin d’une nouvelle voie». Pour les élections européennes, la CES interpelle les candidats-es en demandant la mise en place de programmes d’investissement équivalents à 2 % du PIB européen «pour faire face à la crise de l'emploi». Ce qui converge parfaitement avec les mesures d’urgences pour une sortie de crise portées par le Parti de la gauche européenne et son candidat à la Présidence de la Commission européenne, Alexis Tsipras, qui parle d’un « nouveau Plan Marshall pour l'Europe ».

Malgré les difficultés, il y a d’innombrables forces critiques qui résistent en Europe et cherchent des solutions progressistes à la crise. Le PGE s’est engagé, lors de son congrès de décembre, à travailler d’arrache pied à offrir des espaces de dialogue pour accélérer leur unification autour d’axes essentiels pour permettre de tourner la page de l’Europe libérale et ouvrir la perspective de sa refondation. Il y a une disponibilité de tous les côtés, chacun ayant bien conscience, face aux forces auxquelles nous sommes confrontés, de la nécessité de dépasser nos limites. Il y a de l’espoir. N’oublions pas que ce sont les peuples qui font l’histoire! Unissons-nous!

Anne Sabourin est membre de l’exécutif du PGE.

Extrait du communiqué de Marie-Christine Vergiat – députée européenne Front de gauche – membre de la commission culture et éducation - Bruxelles 26/06/2013 « (...)je regrette profondément que, malgré l’opposition d’un certain nombre de parlementaires et notamment de la GUE/NGL, un mécanisme des prêts paneuropéens pour les étudiants de master intitulé Erasmus Master se voit introduit pour la première fois dans ce nouveau programme (....) L’Union européenne ne tire aucune leçon de la situation des États-Unis où l’endettement des étudiants s’élève à plus d’un trillion de dollars et risque de jeter dans la misère des milliers d’étudiants incapables de rembourser leurs prêts. C’est donc un risque lourd sur le droit d’accès à un enseignement supérieur gratuit et de qualité pour tous. Au moment même où nombre d’État membres réduisent leurs bourses et augmentent les frais d’inscription, c’est un signal fort envoyé par l’UE que de vouloir privilégier des prêts bancaires plutôt que des aides publiques directes aux étudiants. Ce sont donc à terme les étudiants des milieux les plus défavorisés qui risquent de faire les frais de ce choix politique car ils se verront privés du droit à des études supérieures faute d’avoir accès aux prêts bancaires. »

Noves et Paluds. A ceux qui ont donné leur vie pour la liberté

le 12 mai 2014

Noves et Paluds. A ceux qui ont donné leur vie pour la liberté

Jeudi 8 mai, la commune a commémoré la victoire des Alliés sur l'Allemagne nazie.

Jeudi 8 mai, à l'appel de la municipalité, plusieurs manifestations de commémoration de la victoire sur le nazisme se sont déroulées aux monuments aux morts, des Paluds de Noves et de Noves, ainsi qu'à la stèle de la Résistance à Noves, où des gerbes ont été déposées.

Aux Paluds, c'est l'Adjoint au Maire, Pierre Ferrier, qui a officié la cérémonie devant le monument aux morts où l'Harmonie des Enfants de Laure, après la sonnerie aux Morts, a interprété La Marseillaise, comme peu après à Noves.

Après un défilé dans les rues de Noves, le Maire, Georges Jullien, a rappelé « le sacrifice de tous ceux qui ont donné leur vie pour notre liberté, de tous ceux qui ont combattu l'envahisseur, de tous les prisonniers de guerre, et de tous les Novais qui sont morts pour la France ». Il a demandé que soit observé à leur mémoire un instant de recueillement.

Le cortège est ensuite allé se recueillir devant la stèle de La Résistance où Nathalie Bonventure, Adjointe au Maire et membre du Comité national de l'Association nationale des anciens combattants de la Résistance (Anacr), a, à son tour, honoré le sacrifice de tous ceux qui ont engagé le combat contre le nazisme sur le sol national, de tous ceux qui, après avoir été torturés, ont été déportés dans les camps de la mort dont très peu sont revenus, de tous les engagés volontaires, dont 110 jeunes Novais, dans l'Armée de Libération. L'Harmonie des Enfants de Laure clôturait cette manifestation par Le Chant des Partisans.

La Marseillaise, le 12 mai 2014

« REACH* » une réglementation européenne pour la chimie, André Mondange

le 12 mai 2014

*REACH :enregistrement, évaluation, autorisation et restriction des produits chimiques.

 

Une industrie qui pèse 613 milliards d’euros par an et plus d'un million d'emplois. Le règlement européen REACH est une petite révolution qui concerne plus de 30000 substances chimiques. Cette réglementation est une première mondiale pour responsabiliser les industriels. Beaucoup reste à faire cependant.

Certes, la chimie a été trop souvent mise au service de la mort avec les armes chimiques, notamment pendant la première guerre mondiale, mais c’est le fait de la barbarie dont l’homme est capable. La chimie doit être source de vie. Il est absolument nécessaire et juste de rappeler que la chimie est indispensable à la vie et qu’elle intervient dans de nombreux domaines de notre vie quotidienne: santé, bâtiment, automobile. La France en est le deuxième producteur européen et le cinquième mondial. L’industrie chimique a fait d’énormes progrès en termes de sécurité et de protection environnementale, dus aux progrès des sciences et des technologies et aux luttes syndicales, avec les CHSCT (Comités d’hygiène de sécurité et des conditions de travail). La France est certainement un des pays où les normes environnementales et les règles de sécurité sont les plus drastiques, celles-ci contrôlées par la DREAL (Direction régionale de l’environnement de l’aménagement et du logement). Cela n’est pas sans rapport non plus avec le fait qu’existe dans notre pays un syndicalisme de lutte de classes, indépendant de la finance et des pouvoirs politiques. On peut d’ailleurs s’interroger sur un rôle à jouer de l’Europe: une régulation est nécessaire et juste pour les normes environnementales et de sécurité sur tous les territoires européens. Comment se fait-il qu’en Allemagne, premier producteur européen, les PPRT (plan de prévention des risques technologiques) n’existent pas? non faussée avec le souci d’un environnement sain?

Pour ce qui est du reste de la planète, on n’ose vous en parler! il est des continents « attractifs » comme l’Asie où l’industrie chimique se délocalise très volontiers ces dernières années, où il n’existe pas encore de Code du travail, ni de règles de sécurité, ni de normes environnementales contraignantes, de syndicats indépendants, ou d’inspecteurs du travail, et d’organismes de contrôles indépendants. Les stratégies d’actionnaires qui n’ont rien d’industrielles, y règnent en maîtres, et n’ont pour seule éthique que les profits!

Reach: le principe « pas de données, pas de marché »

REACH est un règlement européen dont les initiales signifient « Enregistrement, évaluation, autorisation et restriction des produits chimiques». Il s’applique directement à tous les états membres de l’Union. L’objectif affiché mêle des préoccupations sur la santé humaine et l’environnement, mais aussi une volonté de maintenir la compétitivité des entreprises et de renforcer l’innovation. REACH a institué l’Agence Européenne des Produits Chimiques (ECHA) basée à Helsinki (Finlande) et a créé un processus complexe d’enregistrement, désormais à la charge des entreprises, pour de nombreuses substances chimiques, dont l’impact sur la santé et l’environnement doit obligatoirement avoir été évalué pour bénéficier d’une autorisation de production, d’importation, de vente ou d’utilisation.

La situation avant REACH

REACH était censé atténuer les lacunes de la législation antérieure. Avant 1981, une réglementation s’intéressait aux substances nouvelles de volume supérieur à 10kg l’an (enregistrement obligatoire nécessitant une évaluation), mais les 100000 substances déjà utilisées n’étaient pas concernées. À partir de 1993, une petite minorité de substances jugées préoccupantes pour la santé humaine a fait l’objet d’une « liste prioritaire » pour en évaluer l’impact : 141 substances, pour lesquelles en pratique il n’y a eu que 39 évaluations.

La version finale de reach: un compromis avec les industriels

REACH, adopté fin 2006 et entré en application courant 2007, répond à des préoccupations légitimes et reflète une pression de l’opinion publique bien au-delà des écologistes. Mais sa mise en place n’a pas été simple, le projet ayant d’abord déclenché une levée de boucliers des industriels : REACH allait provoquer une distorsion de concurrence entre les Européens et les autres, favorisant les produits importés de pays moins regardants ; REACH allait coûter aux entreprises pour la réalisation des études d’évaluation sur la santé et l’environnement.

La version finalement retenue a fait la part belle aux doléances des industriels; les polymères (plastiques…), les intermédiaires d’apparition transitoire dans un processus industriel, ont été dispensés d’évaluation. REACH a exclu les produits de quantité inférieure à 1 tonne (une régression pour les produits nouveaux entre 10 kg et 1t!) En pratique, REACH ne concerne plus qu’une fraction, d’environ un tiers à la moitié des substances existantes. Fabricants non européens et importateurs sont logés à la même enseigne que les producteurs européens: l’enregistrement et les coûts associés aux études concernent tout le monde. Ces coûts peuvent devenir un facteur d’élimination des entreprises les plus faibles, ou de celles pour lesquelles le produit chimique concerné n’est pas stratégique (les groupes peuvent avoir des centaines de substances à enregistrer et ils n’engageront pas des dépenses pour toutes). REACH va donc dans le sens d’un « nettoyage du portefeuille » des groupes, surtout pour les substances anciennes, précipitant l’arrêt de productions trop peu rentables ou non stratégiques et la concentration du marché entre quelques mains.

Des dates butoirs pour l’enregistrement

Il existe des dates butoirs, au-delà desquelles les substances connues non enregistrées ne seront plus autorisées, et les substances autorisées ne le seront que pour ceux qui auront fait la démarche de l’enregistrement. Le pré-enregistrement obligatoire a eu lieu en 2008. La date d’enregistrement a été étalée en fonction des volumes et de la toxicité connue des produits :

décembre 2010 pour les quantités supérieures à 1 000 t/an, mais aussi supérieures à 100 t/an pour les produits toxiques ou néfastes pour les organismes aquatiques, et supérieures à 1 t/an pour certains CMR (cancérigènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction)

juin 2013 pour les quantités entre 100 et 1000 t/an

31mai 2018 pour les quantités entre 1 et 100 t/an.

Ces dernières concernent de loin le plus grand nombre de substances, entre 25 000 et 50 000 (contre 3 400 en 2010 et 3 000 en 2013) et impliqueront bien davantage les PME. Or, l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA) a déjà conclu que 61 % des 1130 dossiers évalués sur la seule année 2013 étaient non conformes à une ou plusieurs exigences de REACH. 2018 est donc un défi, et c’est d’ici là que les choix d’abandon de produits par les industriels seront les plus nombreux, ce qu’ils feront assurément payer à leurs propres travailleurs.

Des risques accrus de pratiques anticoncurrentielles

REACH pousse les industriels à mutualiser les connaissances et les études dans des SIEF (forums d’échange d’informations sur une substance). Les associations et ONG peuvent payer pour y participer, mais en pratique cela provoquera surtout des échanges d’informations entre industriels, alors que l’industrie chimique est l’une des industries le plus souvent mise en cause pour « ententes illicites ». Les études d’évaluation ayant un coût auquel tout membre du SIEF doit participer, selon des règles de répartition à définir librement dans chaque SIEF, on ne peut exclure que certains réalisent des études volontairement coûteuses pour barrer la route à des concurrents ou à des associations.

Une efficacité réduite en matière de santé et d’environnement

Les substances présentant un danger pour la santé ou l’environnement sont réglementées, mais rarement interdites. Les quelques dizaines de substances « extrêmement préoccupantes » (autorisations plus contraignantes) font l’objet d’une attention particulière. De fait, les substances dangereuses sont maintenues pour peu que les industriels démontrent qu’ils ne peuvent pas les remplacer, qu’ils travaillent sur des substituts (ce qui peut durer longtemps), ou que le risque est géré. Inversement, REACH peut être utilisé par des groupes qui lanceraient un produit de substitution présenté comme moins nocif mais pour lequel on manquerait de recul, pour éliminer d’autorité les producteurs d’une ancienne substance bon marché et imposer au tarif fort leur nouveau produit au consommateur en bénéficiant d’une position de monopole quitte à découvrir ensuite que le produit n’amène aucune amélioration. Un tiers des maladies professionnelles dérive du risque chimique.

Une étape vers la prévention et la maîtrise des risques

Les tentatives européennes de régulation visant à mieux faire connaître l’innocuité ou la nocivité des innombrables substances chimiques industrielles de notre environnement sont louables. Mais elles restent bien insuffisantes au regard de ce qui serait nécessaire pour préserver la santé humaine et l’environnement. Elles sont aussi bien trop conciliantes avec les intérêts des industriels organisés en lobbys efficaces. Tant que l’industrie sera aux mains d’intérêts privés (ou d’intérêts publics préparant un retour au privé), on pourra lui faire confiance pour vider certaines mesures de leur substance, développer des stratégies anticoncurrentielles, faire payer les arrêts d’activité à leur propre personnel et faire payer au consommateur final les coûts liés à REACH ou à la mise au point de produits de substitution.

 

* André Mondange est salarié de l’industrie chimique et syndicaliste.

Espace: pour des politiques publiques à la hauteur des enjeux, Fabien Albert

le 12 mai 2014

Le secteur spatial n'échappe pas aux logiques de rentabilité au détriment de la nécessaire indépendance européenne dans ce secteur clé. Au-delà des enjeux économiques énormes, c'est tout le progrès de la connaissance de l’Univers, façonnant notre vision du monde, notre réflexion philosophique et nos pratiques artistiques, qui est en jeu.

L’essor de l’industrie aérospatiale ouvre des potentialités de développement industriel,

d’innovations sociales et de créations d’emplois sans précédent. Mais tous les moyens ne sont pas mis en œuvre pour y parvenir. Grâce au développement d’un programme spatial né au début des années soixante, la France est devenue en 1965 le troisième pays, après l’Union Soviétique et les États-Unis, à envoyer, de manière autonome, un satellite dans l’espace ; c’est actuellement le seul pays de l’Union Européenne maîtrisant les technologies spatiales depuis les activités lanceurs, jusqu’à la fabrication et l’exploitation de satellites.

À partir de ce savoir-faire, des coopérations européennes ont ensuite pu se développer, comme dans les télécommunications (EUTELSAT) ou encore la météorologie (EUMETSAT). Il en a été de même, plus récemment, avec les programmes Galileo de navigation et GMES de surveillance pour l’environnement et la sécurité, qui marquent l’implication de l’Union européenne (UE) dans le domaine spatial. L’Europe s’est avérée être également l’échelon le plus pertinent pour les programmes d’exploration, comme en témoigne la réussite de l’ATV, vaisseau cargo européen ravitaillant la station spatiale internationale ISS.

Lanceurs, satellites; d’indispensables financements publics

Le domaine spatial européen est cependant marqué ces dernières années par la part croissante prise par le secteur privé et la montée en puissance de concurrents au niveau mondial. Dans ce contexte, les évolutions récentes d’AIRBUS Group(1) (ex EADS), sont inquiétantes. En effet, le rôle des états actionnaires s’est considérablement affaibli (ces derniers ont même abandonné tout droit de vote ou de veto au sein du groupe européen et le capital flottant du groupe avoisine les 70 % aujourd’hui!). Dans ces conditions, la logique financière à l’œuvre a entraîné le secteur dans des plans de restructuration et de suppressions massives d’emplois mettant en péril de développement de la filière.

La France, via le centre spatial guyanais (CSG) et la société Arianespace (en charge de la commercialisation et de l’exploitation des systèmes de lancement spatiaux développés par l’Agence spatiale européenne (ESA), joue un rôle pivot concernant les activités lanceurs (Arianespace représente près de 60 % des lancements mondiaux). Les lanceurs actuellement utilisés sont :

Ariane 5: jusqu’à 10 tonnes en orbite géostationnaire (et 20 tonnes en orbite basse) ;

Soyouz: jusqu’à 3 tonnes en orbite géostationnaire ;

Véga: jusqu’à 1.5 tonnes en orbite basse.

Cependant, ces dernières années, les investissements au niveau européen ne sont pas à la hauteur des enjeux. Avoir choisi de ne conserver qu’un seul et unique lanceur, Ariane 5, était une erreur stratégique regrettable. Ainsi un accord avec les Russes pour l’utilisation du lanceur certes fiable, mais vieillissant, Soyouz a été privilégié pour des raisons budgétaires, à la place d’une mise au point d’une évolution d’Ariane 4, abandonnée. Dans un contexte de plus en plus concurrentiel, avec notamment les lanceurs longue marche chinois et américain SpaceX, il s’avère indispensable pour l’Europe de se doter d’une famille de 3 lanceurs modernes (Ariane 5, Ariane 6, Véga) permettant d’assurer pour un prix intéressant(2) le lancement de tous les types de satellites et par conséquent de garantir son indépendance d’accès à l’espace.

 

Galileo: un outil de développement économique permettant de se libérer de l’emprise américaine du système gps

Le programme Galileo (le « GPS » européen), dont le but est de mettre un terme à la dépendance de l’UE aux systèmes de navigation par satellite sous contrôle militaire, et plus particulièrement au GPS américain. C’est essentiel pour le développement économique européen ainsi que pour son indépendance stratégique. En effet, aujourd’hui, 7 % du PIB de l’Europe repose sur des produits et des services utilisant les signaux de navigation par satellite fournis par le système américain GPS. L’impact économique global du programme Galileo est estimé pour les 20 prochaines années, pour un investissement de l’ordre de 8milliards sur la même période, à environ 90 milliards d’euros (le marché des systèmes de navigation par satellite devrait doubler d’ici à 2020 et atteindre à lui seul 244 milliards d’euros(3)). Ce programme a malheureusement connu de nombreuses difficultés et pris beaucoup de retard: il faudra en effet attendre 2020 (au lieu de 2014 comme prévu initialement), quand les 30 satellites de la constellation seront opérationnels, pour avoir un service de haute précision disponible à tout moment, partout dans le monde. Le projet Galileo a connu ces dernières années de nombreuses difficultés, financières et techniques. Le financement du projet était initialement aléatoire, l’UE ayant privilégié au départ le financement par PPP (Partenariat Public Privé). Fin 2013, le Parlement européen a enfin validé définitivement son financement – public – jusqu’en 2020, du fait notamment de l’incapacité du secteur privé à s’entendre sur la prise en charge du financement à long terme. Par ailleurs, certains choix discutables de l’Union européenne, comme l’attribution du contrat de fabrication des satellites à la société allemande OHB (n’arrivant pas aujourd’hui à tenir ses engagements), plutôt qu’aux sociétés réputées comme Thales Alenia Space et EADS-Astrium auront retardé également la mise en œuvre de ce projet essentiel.

Le développement du secteur spatial, de l’emploi et des multiples compétences et savoir-faire qu’il représente est plus que jamais un investissement d’avenir. Par ailleurs, la puissance publique est la seule qui puisse assurer la pérennité de ce secteur stratégique, dont on ne pourrait se passer par temps de crise. À l’instar de l’exploration de la Terre dans le passé, l’exploration spatiale est un outil formidable permettant de faire progresser les connaissances scientifiques (dans des domaines aussi variés que les matériaux, la biologie, la physique fondamentale), de mieux comprendre certains phénomènes comme les évolutions du climat et même d’être un outil d’aide à la décision dans des domaines aussi divers que ceux de l’agriculture.

Fabien Albert est syndicaliste.

(1) Maison mère d’ASTRIUM (Airbus Defense and Space), qui conçoit, développe et

fabrique des satellites artificiels, des infrastructures orbitales et des systèmes de lanceurs. Il fournit également des services liés à l’espace.

(2) Ce que ne permet pas toujours le lanceur lourd Ariane 5, devant embarquer 2 satellites pour être compétitif.

(3) http://ec.europa.eu/commission_2010- 2014/tajani/priorities/satellitenavigation/ index_fr.htm

(4) Certains opérateurs de satellites européens ont opté, pour certaines mises en orbite, pour les services de concurrents d’Arianespace, ce qui a provoqué un certain émoi.

L’Agence Spatiale Européenne (ESA) compte 20 États membres. Elle coordonne les ressources financières et intellectuelles de ses membres, et peut ainsi entreprendre des programmes et des activités qui vont largement au-delà de ce que pourrait réaliser chacun de ces pays à titre individuel. Que fait l’ESA? L’ESA a pour mission d’élaborer le programme spatial européen et de le mener à bien. L’agence travaille également en étroite collaboration avec des organisations spatiales hors d’Europe de manière à ce que les bienfaits de l’espace profitent à l’humanité entière.

L’ESA fonctionne sur la base d’un retour géographique, c’est-àdire que la somme versée par un État membre est approximativement affectée à l'industrie spatiale de ce pays dans le cadre des développements effectués. Le budget européen est relativement faible puisqu’il représente l’équivalent du prix d’un ticket de cinéma par citoyen d'un État membre de l'ESA. Aux États-Unis, les investissements consacrés aux activités spatiales civiles sont presque quatre fois plus élevés.

Budget : 4,28 milliards d’euros (2013)

Effectifs : 2 000 personnes ( 34 000 en incluant les prestataires et sous-traitants)

 

Réformer la gouvernance de l’ESA ? Quelques pistes progressistes :

Pour que l’Union Européenne puisse retrouver une politique spatiale ambitieuse, les agences doivent reprendre la main sur les industriels privés et se doter de règles de solidarité comme :

- Alors qu’ils ont très largement profité d’années « bénies » pour remonter d’importants dividendes à leurs actionnaires, les industriels doivent aujourd’hui participer, y compris sur fonds propres, à relancer la politique spatiale européenne. Si ceux-ci n’acceptent pas cette responsabilité, alors les États devront envisager de renationaliser nos entreprises, comme cela s’est fait dans le secteur bancaire de certains pays.

- Comment envisager la garantie d’avenir de l’E.S.A. sans obtenir des États membres l’obligation de lancement de leurs satellites institutionnels par la famille de lanceurs européens(4) ? Une directive allant dans ce sens doit être mise en place rapidement Une charte de coopération industrielle devrait être mise en place afin d’endiguer une profitabilité sans cesse accrue et opposée à une industrie stratégique avec la nécessité d’investissements lourds constants.

Contrôler l’usage des financements publics

Les financements viennent en large majorité des États membres. Ainsi il serait intéressant, qu’à l’instar de la DGA (Direction Générale de l’Armement), ces derniers aient un droit de regard sur les marges brutes réalisées par les industriels percevant des financements publics européens et que l’ESA puisse contrôler les fonds qu’elle verse aux industriels de l’Espace sur les produits qu’elle leur commande. En effet, l’argent public investi doit servir l’investissement, l’emploi, la formation, l’innovation et en aucun cas ne doit servir à augmenter les dividendes servis aux actionnaires des sociétés concernées.

L'astronomie, une solide tradition française et européenne, Daniel Le Lay

le 12 mai 2014

L'astronomie prend au XVIIe siècle une place très importante parmi les sciences.

Louis XIV se laissera convaincre de l'utilité de la construction d'un Observatoire important à Paris : la nécessité de faire des progrès en navigation, afin d'exploiter au mieux les colonies, la concurrence avec l’Angleterre, qui construit alors Greenwich, sont des arguments forts. La maîtrise du temps, sera aussi une des missions de l'institution créée. Depuis cette époque la recherche française est restée au meilleur niveau dans le monde. L'importance de celle-ci fera qu'elle pèsera lourd et longtemps dans le développement des sciences et techniques, de leur enseignement et plus généralement dans le développement de la culture scientifique dans notre pays. L'activité compte plusieurs centaines de chercheurs dans de nombreux laboratoires mais aussi de très nombreuses associations et participants « amateurs ».

Du fait des équipements nécessaires, importants tant en dimension qu'en technicité, elle a impliqué dès cette époque le développement d’ingénierie de pointe dans différents domaines, la fabrication d'équipements importants par des industries de différentes spécialités contribuant ainsi à leur développement. Outre le Radiotélescope de Nançay, le télescope 193 de l'Observatoire de Haute Provence, Le télescope Bernard Lyot installé à 2878 m d'altitude à l'observatoire du pic du Midi de Bigorre, les chercheurs disposent des équipements gérés par l'ESO (Observatoire Européen Austral).

L'ESO a été créé en 1964 à l'initiative de la France, de l'Allemagne, des Pays bas, de la Suède. Elle est la première organisation intergouvernementale pour l'astronomie en Europe et l'observatoire astronomique le plus productif au monde. Elle compte aujourd'hui 15 pays membres, sur 2 continents. L'ESO gère trois sites d'observation au Chili : La Silla, Paranal et Chajnantor. L'ESO développe actuellement le très important projet de "E-ELT" (European Extremely Large Telescope) : un télescope possédant une base composée d’un maillage de miroirs, le principal étant de la classe des 40 mètres, observant dans le visible et l'infrarouge. Entre autres objectifs : les exoplanètes (environnement et dimension proches de ceux de la Terre). Les équipements modernes, tels ceux gérés par l’ESO au Chili, intègrent de nouveaux systèmes opto-mécaniques et opto-électroniques ainsi que des systèmes extrêmement précis de contrôle et de pilotage d'équipements lourds. De nombreux industriels, de nombreux ingénieurs et scientifiques, français et européens, de spécialités diverses interviennent dans la conception et la réalisation de ces équipements : entre autres la fabrication des miroirs.

L'ESO est le partenaire européen (en coopération avec le Japon et les États- Unis) d'ALMA (Atacama Large Millimeter/submillimiter Array), un radiotélescope géant observant les ondes millimétriques, installé dans le désert d'Atacama dans le nord du Chili. Celui-ci est composé de 66 antennes d'un diamètre compris entre 7 et 12 mètres qui peuvent être écartées de 16 km à 150 m et qui fonctionnent en interférométrie.

Daniel Le Lay est ingénieur

CERN : un exemple de coopération scientifique au dela de l'Europe, Ivan Lavallée

le 12 mai 2014

En 2014 le Centre Européen de Recherche Nucléaire (CERN) a 60 ans. Il est fondé en 1954 par 12 pays européens en dehors des alliances politiques ou militaires en pleine guerre froide.

C’est un centre européen certes, mais qui accueille des chercheurs de toutes nations.

C’est le plus grand centre au monde de recherche sur les particules, c’est là que fut découvert le boson de Higgs dont nous avons évoqué l’enjeu dans un numéro précédent.

Le CERN comprend toute une chaîne d’accélérateurs de particules, mais si c’est un centre de recherche sur les particules, c’est aussi un centre de recherche-développement en d’autres dimensions. Ainsi, les recherches depointe qui y sont menées nécessitent la mise au point d’outils nouveaux. Parmi ces innovations, on notera le world wide web en 1989 avec le langage html et un outil de gestion de documents électroniques permettant aux chercheurs de partager leurs expériences.

Le CERN emploie environ 2500 travailleurs à plein-temps et accueille 6500 scientifiques du monde entier, représentant 500 universités et 80 états. Les états membres du CERN de plein droit sont actuellement 21, ils contribuent au budget de l’organisation et disposent d’un siège et d’une voix au conseil scientifique qui définit tous les programmes. Avec un budget de quelque 700millions d’euros auquel la France participe pour 111millions et 15,34%. Il existe un statut d’état observateur qui permet d’assister aux réunions du conseil et d’avoir accès aux dossiers et documentations, sans toutefois avoir un droit de vote. Ces états participent de leur côté au financement des programmes de recherche, en particulier des expériences dont ils sont partie prenante. Parmi les états et organisations observateurs, on notera la Commission européenne, l’Inde, le Japon, la Russie, la Turquie, les USA, et l’UNESCO.

De nombreux États, au nombre de 29, parmi lesquels l’Afrique du Sud, l’Argentine, l’Australie ou la Chine… qui ne sont ni membres ni observateurs participent à des programmes de recherche de l’organisation

 

 

 

 
 
 
 
 
 
« Le bonheur est une idée neuve en Europe. » Saint-Just (révolutionnaire français, 1767-1794)