Le 7 juillet dernier, le Tribunal administratif d'Amiens a déclaré illégale la fermeture de la maternité de Creil, car non conforme au Schéma régional de santé, donnant six mois à l'Agence régionale de Santé (ARS) pour se mettre dans la légalité : soit modifier le schéma régional de santé, soit réouvrir une maternité à Creil.
Le Comité de défense et de promotion de la Santé et des Hôpitaux publics de Creil et de Senlis, qui a mené une farouche lutte contre la fermeture de la maternité de niveau 3 dans ce bassin de vie qui en a tant besoin, relançait la mobilisation ce jeudi 22 septembre, journée d'action nationale dans la Santé à l'appel de la CGT, pour exiger la réouverture d'une maternité à Creil.
Une centaine de personnes, salarié·e·s, retraité·e·s, de la santé, militant·e·s syndicaux·ales, élu·e·s, habitant·e·s du Bassin creillois ont répondu à l’appel du Comité de défense. Les militant·e·s communistes étaient préésent·e·s nombreux·euses pour défendre un service public hospitalier accessible à toutes et tous : retour d'une maternité de niveau 3 à Creil ; plus de moyens matériels et financiers pour l'hôpital ; de meilleures conditions de travail pour le personnel soignant, « premier·ère·s de cordée », « héros et héroïines du quotidien » : revalorisation du salaires et recrutement de personnes qualifiées pour combler le manque de personnel.
Seules notre détermination, notre volonté dans la mobilisation pourra faire fléchir l'ARS dans le sens de la réouverture d'une maternité à Creil : ne lâchons rien et rendez-vous pour les prochaines initiatives !
Tribunal administratif d'Amiens
Communiqué de presse du 7 juillet 2022
Le tribunal administratif annule l’arrêté de transfert de la maternité de Creil vers Senlis et donne à l’administration un délai de six mois pour régulariser la situation
Le tribunal administratif d’Amiens estime que l’arrêté de transfert de la maternité de Creil vers Senlis méconnaît le schéma régional de santé. Il juge toutefois, compte tenu des impératifs de santé publique et de continuité des soins, que cette annulation doit être différée dans le temps. L’agence régionale de santé dispose ainsi d’un délai de six mois pour modifier le schéma régional de santé afin de permettre la délivrance d’une autorisation de transfert de la maternité qui lui soit conforme, ou pour organiser un retour de la maternité sur le site de Creil.
Par un arrêté du 8 janvier 2019, la directrice de l’agence régionale de santé des Hauts-de-France a autorisé le transfert des activités de soins en néonatologie avec soins intensifs et de réanimation néonatale du site de Creil vers le site de Senlis, au sein du groupe hospitalier public du Sud de l’Oise. La communauté d’agglomération Creil Sud Oise et la commune de Creil ont contesté cet arrêté devant le tribunal administratif d’Amiens.
Le tribunal a jugé que cet arrêté n’est pas compatible avec le schéma régional de santé, document contraignant qui doit être respecté en cas de délivrance d’une autorisation. En effet, ce schéma prévoit actuellement deux maternités pour la zone de Creil-Senlis et n’envisage pas la suppression d’une des deux implantations. Le tribunal a en revanche écarté les autres arguments de la communauté d’agglomération Creil Sud Oise et la commune de Creil.
Eu égard aux impératifs de santé publique et de continuité des soins, le tribunal a estimé qu’il convient de différer au 6 janvier 2023 l’annulation de la décision autorisant le transfert de la maternité. Ceci doit permettre à l’agence régionale de santé de remédier à l’illégalité censurée par le tribunal. Celle-ci pourra soit modifier partiellement le schéma régional de santé, pour délivrer ensuite une nouvelle autorisation de transfert de la maternité de Creil, soit prendre les mesures nécessaires à une reprise de l’activité sur le site de Creil.
La modulation dans le temps des effets d’une annulation
Sur cette question, voir notamment la décision d’Assemblée du Conseil d’Etat, 11 mai 2004, Association AC ! et autres, n° 255886 et suivants.
L'annulation d'un acte administratif implique en principe que cet acte est réputé n'être jamais intervenu. Toutefois, s'il apparaît que cet effet rétroactif de l'annulation est de nature à emporter des conséquences manifestement excessives en raison tant des effets que cet acte a produits et des situations qui ont pu se constituer lorsqu'il était en vigueur que de l'intérêt général pouvant s'attacher à un maintien temporaire de ses effets, il appartient au juge administratif de prendre en considération, d'une part, les conséquences de la rétroactivité de l'annulation pour les divers intérêts publics ou privés en présence et, d'autre part, les inconvénients que présenterait, au regard du principe de légalité et du droit des justiciables à un recours effectif, une limitation dans le temps des effets de l'annulation. Il lui revient d'apprécier, en rapprochant ces éléments, s'ils peuvent justifier qu'il soit dérogé à titre exceptionnel au principe de l'effet rétroactif des annulations contentieuses et, dans l'affirmative, de prévoir dans sa décision d'annulation que, sous réserve des actions contentieuses engagées à la date de celle-ci contre les actes pris sur le fondement de l'acte en cause, tout ou partie des effets de cet acte antérieurs à son annulation devront être regardés comme définitifs ou même, le cas échéant, que l'annulation ne prendra effet qu'à une date ultérieure qu'il aura déterminée.
Article de Loïc Pen paru dans Oise Avenir n° 1378 du 26 août 2022
La maternité de Creil est fermée depuis janvier 2019 suite à une décision de transfert de ses activités sur Senlis.
Le 7 juillet 2022, le tribunal administratif d’Amiens a invalidé l’arrêté de transfert de la maternité de Creil à Senlis. Cet arrêté n’était en effet pas conforme au Schéma régional de Santé (SRS) qui prévoit une maternité sur chaque site du Groupement hospitalier du Sud de l’Oise (GHPSO), groupement issu de la fusion des hôpitaux de Creil et Senlis.
La fermeture de la maternité de Creil est donc illégale. Le tribunal laisse six mois (au plus tard début janvier 2023) à l’Agence régionale de Santé (ARS) pour se mettre en conformité avec le SRS.
C’est une victoire importante, mais elle n’est qu’une étape dans l’objectif de la réouverture.
Désormais l’ARS peut :
Si la population du Bassin creillois ne se manifeste pas pour en faire un débat politique sur les choix de santé, l’ARS traitera la décision du tribunal comme un simple problème administratif.
Les arguments ne manquent pas :
Cette bataille intervient dans un contexte de crise de tout le système de santé : cet été le dernier SMUR de notre bassin de vie, celui de Creil, est resté fermé la nuit pendant un mois faute de médecins ! Cela entraîne des pertes de chances pour des prises en charge en urgence absolue. Ces SMUR sont remplacés par des équipes non médicalisées, avec un ambulancier et une infirmière, en charge d’apporter les premiers secours en attendant un médecin d’un secteur voisin (Clermont, Beauvais ou Compiègne). Mais Compiègne a vu aussi des périodes sans équipe de SMUR, faute de personnels, et la situation se tend à Beauvais.
Notre mobilisation peut tout changer.
Les autorités sont en difficulté pour expliquer les résultats de leurs politiques désastreuses, les populations prennent conscience de la dégradation de leur système de santé et sont disponibles si un espoir de changer la situation apparaît. La décision du tribunal administratif matérialise cet espoir.