Fédération de l'Oise

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du 15 au 27 octobre 2012, 2 semaines de création Fer en Fer proposé par le collectif Zo Prod

le 16 October 2012

du 15 au 27 octobre 2012, 2 semaines de création Fer en Fer proposé par le collectif Zo Prod

Proposé par le collectif Zo Prod, “ Fer en Fer ” se tient jusqu’au 27 octobre dans l’ancienne boyauderie de l’avenue de Paris. Un rendez-vous attendu. Le public pourra assister à de multiples spectacles, films, concerts, performances, mais aussi rencontrer les créateurs au travail dans leurs ateliers et suivre le processus de réalisation d'une œuvre de bout en bout.

Le collectif Zo Prod propose des rendez-vous au public du mercredi au samedi entre 18 h et 21 h pour accéder à l'envers du décor et rencontrer les artistes.
Mercredi 17, cinéma : courts métrages et clips picataves, 21 h.
Jeudi 18 et vendredi 19 : concerts (noise, nanas, rock, punk, électro…) à partir de 21 h.
Samedi 17 : inauguration, dès 18 h avec Les Balles Capone (théâtre de rue).

Suite du programme sur le site : ferenfer.zoprod.com

20121013-Le Monde-Henri Krasucki, les symphonies d'un syndicaliste

le 16 October 2012

20121013-Le Monde-Henri Krasucki, les symphonies d'un syndicaliste

24 octobre, Breuil-le-Sec - Théâtre poélitique proposé par Attac Oise et LDH Creil-Sud-Oise

le 16 October 2012

24 octobre, Breuil-le-Sec - Théâtre poélitique proposé par Attac Oise et LDH Creil-Sud-Oise

Le mercredi 24 octobre 2012 à 20 h 30,

Attac Oise et LDH Creil-Sud-Oise vous convient

à la salle des Fêtes de Breuil-le-Sec

pour assister à une pièce de de théâtre poélitique intitulée

 

« Le monde ne sait plus sur quel pied danser, faisons-le valser ! »

 

Spectacle gratuit !

De l’art et du travail, Jacques Rancière*

le 12 October 2012

De l’art et du travail,  Jacques Rancière*

En quoi les pratiques de l’art sont et ne sont pas en exception sur les autres pratiques.

« Dans l’hypothèse d’une “fabrique du sensible” le lien entre la pratique artistique et son apparent dehors, à savoir le travail, est essentiel. Comment, pour votre part, concevez-vous un tel lien (exclusion, indifférence...) ? Peut-on parler de “l’agir humain” en général et y englober les pratiques artistiques, ou bien celles-ci sont-elles en exception sur les autres pratiques ?

Dans la notion de “fabrique du sensible” on peut d’abord entendre la constitution d’un monde sensible commun, d’un habitat commun, par le tressage d’une pluralité d’activités humaines. Mais l’idée du “partage du sensible” implique quelque chose de plus. Un monde commun n’est jamais simplement l’ethos, le séjour commun qui résulte de la sédimentation d’un certain nombre d’actes entrelacés. Il est toujours une distribution polémique des manières d’être et des “occupations” dans un espace des possibles. C’est à partir de là que l’on peut poser la question du rapport entre l’ “ordinarité” du travail et “l’exceptionnalité” artistique. Ici encore la référence platonicienne peut aider à poser les termes du problème. Au troisième livre de la République, le miméticien est condamné non plus seulement par la fausseté et par le caractère pernicieux des images qu’il propose, mais selon un principe de division du travail qui a déjà servi à exclure les artisans de tout espace politique commun : le miméticien est, par définition un être double. Il fait deux choses à la fois, alors que le principe de la communauté bien organisée est que chacun n’y fait qu’une chose, celle à laquelle sa “nature” le destine. En un sens tout est dit là : l’idée du travail n’est pas d’abord celle d’une activité déterminée, d’un processus de transformation matériel. Elle est celle d’un partage du sensible : une impossibilité de faire “autre chose”, fondée sur une “absence de temps”. Cette “impossibilité” fait partie de la conception incorporée de la communauté. Elle pose le travail comme la relégation nécessaire du travailleur dans l’espace-temps privé de son occupation, son exclusion de la participation au commun. Le miméticien apporte le trouble dans ce partage : il est un homme du double, un travailleur qui fait deux choses en même temps. Le plus important est peut-être le corrélat : le miméticien donne au principe “privé” du travail une scène publique. Il constitue une scène du commun avec ce qui devrait déterminer le confinement de chacun à sa place. C’est ce re-partage du sensible qui fait sa nocivité, plus encore que le danger des simulacres amollissant les âmes. Ainsi la pratique artistique n’est pas le dehors du travail mais sa forme de visibilité déplacée. Le partage démocratique du sensible fait du travailleur un être double. Il sort l’artisan de “son” lieu, l’espace domestique du travail, et lui donne le “temps” d’être sur l’espace des discussions publiques et dans l’identité  du citoyen délibérant. Le dédoublement mimétique à l’œuvre dans l’espace théâtral consacre et visualise cette dualité. Et, du point de vue platonicien, l’exclusion du miméticien va de pair avec la constitution d’une communauté  où le travail est à “sa” place.
Le principe de fiction qui régit le régime représentatif de l’art est une manière de stabiliser l’exception artistique, de l’assigner à une tekhné, ce qui veut dire deux choses : l’art des imitations est une technique et non un mensonge. Il cesse d’être un simulacre, mais il cesse en même temps d’être la visibilité déplacée  du travail, comme partage du sensible. L’imitateur n’est plus l’être double auquel il faut opposer la cité où chacun ne fait qu’une seule chose. L’art des  imitations peut inscrire ses hiérarchies et exclusions propres dans le grand partage des arts libéraux et des arts mécaniques.
Le régime esthétique des arts bouleverse cette répartition des espaces.  Il ne remet pas en cause simplement le dédoublement mimétique au profit d’une immanence de la pensée dans la matière sensible. Il remet aussi en cause le statut neutralisé de la tekhné, l’idée  de la technique comme imposition d’une forme de pensée à une matière inerte. C’est à dire qu’il remet au jour le partage des occupations qui soutient la répartition des domaines d’activité. C’est cette opération théorique et politique qui est au cœur des Lettres sur l’éducation esthétique de l’homme de Schiller. Derrière la définition kantienne du jugement esthétique comme jugement sans concept – sans soumission du donné intuitif à la détermination conceptuelle –, Schiller marque le partage politique qui est l’enjeu de l’affaire : le partage entre ceux qui agissent et ceux qui subissent ; entre les classes cultivées qui ont accès à une totalisation de l’expérience vécue et les lasses sauvages, enfoncées dans le morcellement du travail et de l’expérience sensible. L’état “esthétique” de Schiller, en suspendant l’opposition entre entendement actif et sensibilité passive, veut ruiner, avec une idée de l’art, une idée de la société fondée sur l’opposition entre ceux qui pensent et décident et ceux qui sont voués aux travaux matériels.

L’art redevient
un symbole du travail

Cette suspension de la valeur négative du travail est devenue au XIXe siècle l’affirmation de sa valeur positive comme forme même de l’effectivité commune de la pensée et de la communauté. Cette mutation est passée par la transformation du suspens de “l’état esthétique” en affirmation positive de la volonté esthétique. Le romantisme proclame le devenir-sensible de toute pensée et le devenir-pensée de toute matérialité sensible comme le but même de l’activité de la pensée en général. L’art ainsi redevient un symbole du travail. Il anticipe la fin – la suppression des oppositions – que le travail n’est pas encore en mesure de conquérir par et pour lui-même. Mais il le fait dans la mesure où il est production, identité d’un processus d’effectuation matérielle et d’une présentation à soi du sens de la communauté. La production s’affirme comme le principe d’un nouveau partage du sensible, dans la mesure où elle unit dans un même concept les termes traditionnellement opposés de l’activité fabricatrice et de la visibilité. Fabriquer voulait dire habiter l’espace-temps privé et obscur du travail nourricier. Produire unit à l’acte de fabriquer celui de mettre au jour, de définir un rapport nouveau entre le faire et le voir. L’art anticipe le travail parce qu’il en réalise le principe : la transformation de la matière sensible en présentation à soi de la communauté. Les textes du jeune Marx qui donnent au travail le statut d’essence générique de l’homme ne sont possibles que sur la base du programme esthétique de l’idéalisme allemand : l’art comme transformation de la pensée en expérience sensible de la communauté. Et c’est ce programme initial qui fonde la pensée et la pratique des “avant-gardes” des années 1920 : supprimer l’art en tant qu’activité séparée, le rendre au travail, c’est-à-dire à la vie élaborant son propre sens.
Je n’entends pas dire par là que la valorisation moderne du travail soit le seul effet du mode nouveau de pensée de l’art. D’une part le mode esthétique de la pensée est bien plus qu’une pensée de l’art. Il est une idée de la pensée, liée à une idée de partage du sensible. D’autre part, il faut aussi penser la façon dont l’art des artistes s’est trouvé défini à partir d’une double promotion du travail : la promotion économique du travail comme nom de l’activité humaine fondamentale, mais aussi les luttes des prolétaires pour sortir le travail de sa nuit  de son exclusion de la visibilité et de la parole communes. Il faut sortir du schéma paresseux et absurde opposant le culte esthétique de l’art pour l’art à la puissance montante du travail ouvrier. C’est comme travail que l’art peut prendre le caractère d’activité exclusive. Plus avisés que les démystificateurs du XXe siècle, les critiques contemporains  de Flaubert marquent ce qui lie  le culte de la phrase à la valorisation du travail dit sans phrase : l’esthète flaubertien est un casseur de cailloux. Art et production pourront s’identifier au temps de la Révolution russe parce qu’ils relèvent  d’un même principe de repartage du sensible, d’une même vertu de l’acte qui ouvre une visibilité en même temps qu’il fabrique des objets. Le culte de l’art suppose  une revalorisation des capacités attachées à l’idée même de travail. Mais celle-ci est moins la découverte de l’essence de l’activité humaine qu’une recomposition du paysage du visible, du rapport entre le faire, l’être, le voir et le dire. Quelle que soit la spécificité des circuits économiques dans lesquels elles s’insèrent, les pratiques artistiques ne sont pas “en exception” sur les autres pratiques. Elles représentent et reconfigurent les partages de ces activités. »

Extraits de Le partage du sensible. Esthétique et politique, La Fabrique, 2000, publiés avec l’aimable autorisation de l’auteur.

*Jacques Rancière est philosophe. Il est professeur émérite à Université de Paris VIII

 

La Revue du projet, n° 20, octobre 2012
 

« Le Paris-Villette doit vivre »

le 12 October 2012

« Le Paris-Villette doit vivre »

Après plusieurs mois de discussions infructueuses, la Ville de Paris vient d’annoncer brutalement la fin des subventions municipales au Théâtre Paris-Villette.
 
Depuis plus de 25 ans, Patrick Gufflet et son équipe y mènent une intense politique de découverte de langages, de créations théâtrales et interdisciplinaires. Loin des sentiers battus de l’avant-garde consensuelle ou de la « réponse à la demande », le Théâtre Paris-Villette est parvenu à constituer un pôle de référence dont témoigne la découverte en son sein de nombreux artistes comme Joël Pommerat, Claire Lasne, Benoit Lambert, Yasmina Reza, Arnaud Meunier, Jean-Paul Delore, Pierre Meunier, Isabelle Lafon… parmi tant d’autres.
 
Ajoutons qu’il a toujours su développer une action exigeante de rencontre avec les publics de l’Est parisien, des collégiens et lycéens du XIXe arrondissement ou de communes de la proche périphérie, et qu’il s’est imposé comme un « lieu-ressource » non seulement pour les artistes en peine de trouver leur espace de représentation, mais aussi pour nombre de théâtres d’Ile-de-France et d’ailleurs en quête de nouvelles formes et de nouveaux talents. C’est en outre, parmi les rares lieux de culture vivante de cet arrondissement de 190 000 habitants, le seul exclusivement dédié à la création théâtrale d’aujourd’hui, qui disparaîtrait. L’argument de la « faible fréquentation » ou du ratio subventions / fréquentation invoqué par la tutelle doit être apprécié à cette mesure.
 
À bien des égards, ce lieu est unique à Paris. Mais ce qui lui arrive s’inscrit dans un contexte, malheureusement préoccupant : c’est ainsi que le Théâtre du Lierre s’est vu privé de son outil de travail dans le XIIIe arrondissement, là aussi après plus de trente ans d’un travail exigeant et novateur au service des artistes et des habitants de cet arrondissement si mal pourvu ; que le Théâtre de l’Est Parisien (TEP), établissement public de l’état, pionnier de la première « décentralisation dramatique » dans le XXe, s’est vu rayé d’un trait de plume par le précédent gouvernement sans un battement de paupière de la Mairie de Paris ; que le Lavoir Moderne Parisien, qui accomplit lui aussi un travail original depuis plus de vingt-cinq ans dans un quartier populaire et multiculturel du XVIIIe, a été brutalement abandonné par la Mairie de Paris…
 
Dans tous les cas, la responsabilité de l’État et de la Ville est conjointe. À chaque fois, l’argument budgétaire invoqué est particulièrement dérisoire en regard des moyens dont dispose Paris, qui de toutes les grandes villes de France est celle qui consacre la plus petite part de son budget aux arts et à la culture, au prétexte que l’État concentre dans la capitale un budget culturel important, ce qui est vrai, mais n’exonère nullement la collectivité parisienne de sa responsabilité vis-à-vis de ses habitants, des équipes artistiques qui ont choisi d’y travailler, et du développement culturel des quartiers.
 
Le Parti communiste français exprime son plus entier soutien à toute l’équipe du Paris-Villette comme aux artistes de cette saison, qui ont unanimement décidé d’assurer la programmation du théâtre sans certitude d’être rémunérés pour leur travail.
 
Il exige que la Mairie de Paris garantisse dans un premier temps le financement de la programmation et du fonctionnement de la saison 2012-2013. Avec les élus au Conseil de Paris du PCF et du PG, il invite l’ensemble des groupes de la majorité municipale à se ressaisir et à redonner au Théâtre Paris-Villette les garanties de pérennité dont il a besoin, simplement pour vivre.
 
 
Alain Hayot, délégué national à la culture du Parti communiste français
Igor Zamichïei, secrétaire de la Fédération de Paris
 
Paris, le 12 octobre 2012.

Accéder à l'arbitraire du signe, Jack Ralite*

le 12 October 2012

Accéder à l'arbitraire du signe, Jack Ralite*

Exercer l’art avec plus de justice sociale dans une société plus démocratique. Agir dans les venelles vers l’émancipation est le contraire de la financiarisation.

Le 1er août 2007, dans sa lettre de mission à Christine Albanel, ministre de la culture, le président Sarkozy
lui recommandait entre autres une démarche : veiller à ce que les crédits ministériels du spectacle vivant aillent bien à des œuvres correspondant aux demandes de la population.
Le nouveau président de la République engageait là une politique où « l’œuvre d’art est affaire du suffrage universel ». Cette question traverse l’histoire du théâtre et interdit, en tout cas mutile, une véritable politique de création artistique singulièrement de création théâtrale, démarche impliquant l’obsédante question du public.
Je souhaite évoquer une expérience vécue au delà de ce que disait Jean Vilar de la programmation du Festival d’Avignon qu’il avait créé en 1947 : « Je rêve de mettre en scène des œuvres théâtrales dont le public quand il les rencontrera ne sait pas encore qu’il va les aimer ».

Être ouvert aux voix et voies inconnues

Il y a quelques années, je suis saisi d’une demande d’un sculpteur de se voir prêter le temps d’une exposition une sculpture achetée par la ville d’Aubervilliers en 1947 au Salon d’automne. Maire d’Aubervilliers, je n’avais jamais vu cette œuvre, ni su même qu’elle existait. Le sculpteur m’envoie le document d’achat de son travail par la ville. Je me suis mis à chercher et après beaucoup d’interrogations d’habitants d’Aubervilliers à la Libération, j’ai retrouvé non pas la sculpture, mais sa mémoire et le sort qu’elle avait connu. Elle représentait « la maternité ». Mais la forme en était audacieusement nouvelle et le quartier où elle avait été installée devant une école maternelle ne l’accepta pas. Le traitement de la femme heurtait les habitants et le maire d’alors décida de la déposer dans un petit jardin intérieur d’un établissement scolaire où elle serait protégée, mais inaccessible à la vue. Le temps passa et l’œuvre fort belle, taillée dans un tissu de plomb, fut petit à petit abîmée par les intempéries, certaines soudures lâchant et différentes parties tombant sur le sol connurent le sort dramatique des ordures ménagères. Le regard hermétique au nouveau et sans tendresse devant des formes inconnues avait condamné la sculpture. Ce fut la mort d’une statue.

Lors de son prix Nobel, Saint-John Perse parla de la poésie comme d’un « luxe de l’inaccoutumance ». Jean-Luc Lagarce disait « une société, une cité, une civilisation qui renonce à sa part d’imprévu, à sa marge, à ses atermoiements, à ses hésitations, à sa désinvolture… est une société qui se contente d’elle-même ». Elle refuse l’inattendu, le nouveau, l’étrange, (ajoutez un « r » et ça fait étranger), elle s’immobilise, s’ossifie, perd sa fraîcheur, sa fragilité, son feu. « Dès qu’un art se fige il meurt » disait Jean Vilar en 1952, ajoutant en 1966 : « Le chemin du milieu est celui qui ne mène pas au festival d’Avignon ».
D’ailleurs en 1967, il réinventa le Festival d’Avignon, en rompant avec les programmes devenus habituels, en mêlant au théâtre la danse, le cinéma, le chant, la littérature, il appliqua avec audace cette idée d’Aragon « se souvenir de l’avenir ». Je me rappelle d’une de ses boutades expliquant son renoncement au TNP qui était son œuvre : « Les spectateurs en étaient arrivés à s’applaudir eux-mêmes ». Il y a là une règle d’or et il n’est pas d’époque où il ne faille se mettre debout et enrager pour défendre cette façon de voir : être ouvert aux voix et voies inconnues. « Provoquer, surprendre, réveiller, irriter même, liberté de création », telle était la pratique de Vilar. On est loin de « la culture comme œuvre de bonne volonté individuelle », « du consommateur roi », de « la culture unanimiste ».
C’est alors que Jean Vilar me chargea de réunir les responsables politiques élus par les collectivités et les artistes travaillant et créant dans les communes. Le débat eut lieu les 27 et 28 juillet 1967, il fut vif, il n’y eut pas de pensées molles, mais des pensées drues. C’était un affrontement entre le réalisme de nomenclature et le réalisme expérimental. C’était une illustration de la remarque d’Aragon : « Il n’a jamais suffi à l’art de montrer ce qu’on voit sans lui » et du propos d’Apollinaire : « Quand l’homme a voulu imiter la marche il a créé la roue qui ne ressemble pas à une jambe ». En fait, la création qui est une vue, une réflexion, une transposition, une découverte de la réalité, est dans un premier temps reçue comme blasphémateur de cette réalité.
Et ce qui se passait en 1967 n’est pas effacé aujourd’hui. Il y a même aggravation à proportion de l’envahissement des programmes fabriqués par les industries culturelles marchant à la rentabilité, allant au nombre, fabriquant ce qu’on appelle « la culture de masse ». Aujourd’hui la vie artistique est agressée par ce phénomène que j’ai rencontré à l’état pur et naïf dans une ville du 93, Blanc-Mesnil, où quelques rares responsables de cette ville trouvaient que le théâtre local n’ayant pas plus de 50 % d’habitants de la ville dans sa fréquentation n’était pas justifié et qu’il fallait voir autrement. Au cours de la réunion pour examiner notamment cet argument, j’ai posé la question : « Combien avez-vous d’abstentionnistes aux élections dans votre ville ? ». Réponse : 50 % environ. Moi : « Alors vous avez décidé de supprimer le suffrage universel ? ». Un rire salvateur conclut cet épisode.

L’esprit des affaires l’emporte sur les affaires de l’esprit

Mais l’idée est tenace et revient sans cesse. Elle est renforcée par l’envahissement du marché dans le domaine culturel, par sa financiarisation et par des fatalités qui pour avoir une nuance comique sont très opératives : Le visiteur du soir de l’Élysée, Alain Minc, n’a-t-il pas dit : « Le marché est naturel comme la marée » ? Et Alain Madelin : « Les nouvelles technologies sont naturelles comme la gravitation universelle ». Or, le marché et les nouvelles technologies sont des inventions humaines pour s’en servir. En les chosifiant, leurs laudateurs les naturalisent et dans un même mouvement font de leurs inventeurs – des hommes et femmes – des êtres subsidiaires, des invités de raccrocs. C’est le monde à l’envers, c’est l’esprit des affaires l’emportant sur les affaires de l’esprit. C’est le « chiffrage » des « gestionnaires » culbutant le « déchiffrage » des « créateurs », c’est la financiarisation qui pénètre tout et impose son vocabulaire. Tout cela a des répercussions sur le travail des créateurs, des publics et au lieu de contribuer à les faire se rencontrer, les éloignent les uns des autres. Le travail dans ce domaine comme dans tous les autres est malade du management, ceux qui le font y respirent mal et voient prolonger cette mauvaise respiration dans le temps des loisirs rendant difficile la rencontre entre créations et publics. Il n’y a pas de perfusion culturelle à l’extérieur du travail malade.
On ne nous parle que d’utilité (avec l’espérance d’en faire de l’utilisable), que de compréhensible (après avoir abîmé la faculté d’étonnement, de penser, d’imaginer de chacune, chacun), que d’économie (sous direction du ciel bancaire et des jeux ténébreux du profit). On ne nous parle en fait que de médiocrité comme si c’était le destin obligé des hommes et des femmes alors que l’on devrait se parler et agir selon la belle expression du peintre chilien José Balmès : « en se compromettant avec la personne humaine ».

Travailler pour l’art et
sa rencontre avec les publics

C’est un travail inouï. Il ne faut pas avoir peur de dire, de faire, d’être affectueux, de considérer – surtout, dans ces temps de tourmente – que travailler pour l’art et sa rencontre avec les publics c’est faire des investissements de haute mer, des investissements humains et non cette incroyable consigne impérative, cette tyrannie rentabilisatrice extraite du rapport Jouyet-Levy sur « L’Immatériel » remis au ministre de l’économie en 2006 : « Il convient de traiter économiquement le capital humain ».
Pierre Soulage dit : « L’art donne forme à l’inachevé ». Pierre Reverdy écrit : « La science découvre et dévoile peu à peu ce qui est. L’art créé d’un seul coup, d’après ce qui est, ce qui n’était pas », Christa Wolf commente : « Le sentiment éprouvé dans l’expérience artistique nous permet d’imaginer ce que nous pourrions devenir ». Écoutez Aragon : « En entendant chanter Fougères, l’héroïne de La mise à mort, j’apprends, j’apprends à perte d’âme » et Foucault : « On écrit pour se déprendre de soi- même ».
Comment ne pas mêler ces voix de poètes à celles de scientifiques concernant l’homme, la femme, les publics. « L’homme est plein à chaque minute de possibilités non réalisées ». « Les hommes et les femmes peuvent se retrouver une tête au-dessus d’eux mêmes » (Vygotski), « La vie est habituellement en deçà de ses possibilités mais se montre au besoin supérieure à sa capacité escomptée » (Georges Canguilhem), « Au travail contrairement aux apparences on ne vit pas dans un contexte, on cherche à créer du contexte pour vivre » (Yves Clot).
Cette mêlée précieuse est un pouvoir d’agir dans les venelles vers l’émancipation, le contraire de la financiarisation. Elle me fait penser à ce garçonnet, à cette fillette qui apprennent apparemment si facilement à nommer leurs premiers jouets, train, wagon, locomotive avec leur papa, leur maman. Arrive l’école et l’écriture de ces mots. L’enfant est stupéfait que le train qui est long soit désigné par un mot court (5 lettres) et le locomotive qui est courte le soit par un mot long (10 lettres). L’institutrice qui me rapportait cette histoire ajoutait : « Mon travail est d’aider l’enfant à “accéder à l’arbitraire du signe” ».
Dans un rapport de 1987 : Projet pour le Théâtre de la Comédie de Genève écrit par Matthias Langhoff on lit ceci : « Un bon directeur de théâtre ne doit pas mettre ses efforts au service d’une prise de décision majoritaire et démocratique. Son travail tout comme son être doivent être animés par un tel esprit d’ouverture et de curiosité que les décisions qu’il sera appelé à prendre permettront à chaque individu de se développer et de s’épanouir au maximum […] L’art n’est pas démocratisable ; on pourra seulement l’exercer avec plus de justice sociale dans une société plus démocratique […] Les subventions ne sont pas là pour que le théâtre existe mais pour que la population puisse goûter au meilleur théâtre […] ». n

Extraits d’un entretien consacré à Jean Vilar publié dans l’Humanité, reproduit avec l’aimable autorisation de l’auteur.

*Jack Ralite est ancien ministre (PCF) et
maire honoraire d’Aubervilliers. Il a fondé les États généraux de la culture.

La Revue du projet, n° 20, octobre 2012
 

Nouveaux territoires de l’art, un atout pour innover, Michel Duffour*

le 12 October 2012

Nouveaux territoires de l’art, un atout pour innover, Michel Duffour*

Dans ces espaces s’exprime une des tendances fortes de l’art actuel, le désir de faire de l’œuvre un lieu de prédilection de la rencontre entre les hommes.

L’ appellation « nouveaux territoires de l’art » renvoie à des expériences qui ont un fonds commun. Mais ces trois mots, dont je me suis servi avec d’autres chercheurs et acteurs culturels pour nommer des lieux que nous estimions singuliers au regard des institutions existantes, ne sont pas une marque déposée. Qu’on leur préfère d’autres mots – fabriques, lieux alternatifs, espaces intermédiaires – peu importe, puisqu’il s’agit à chaque fois de donner à voir l’originalité et la pertinence d’actes artistiques cherchant à ouvrir des pistes jusqu’alors insuffisamment explorées.

Des expériences novatrices

Ces expériences ne sont pas sans passé. Les pionniers de la décentralisation théâtrale, je pense aux Dasté, Gignoux et autres, demeurent des défricheurs étonnamment jeunes ; c’est un peu cet état d’esprit, toutes proportions gardées, qu’on trouve dans ces nouveaux lieux qui se développent hors des institutions reconnues. Phénomène marginal ? Non. Car ce qui pousse des artistes, le plus souvent dans de jeunes structures ayant moins de comptes à rendre à des tutelles, à faire feu de tout bois pour s’adresser aux publics qu’on voit peu dans les circuits traditionnels, à transgresser les coupures entre disciplines, à explorer des voies neuves d’appropriation et de fonctionnement, devient un phénomène courant. C’est réjouissant et passionnant.

Il est primordial, dans un monde de plus en plus standardisé, de favoriser des espaces qui essaient « autre chose». Mon propos ne s’inscrit pas dans le sillage des procès faits aux scènes labellisées ou au spectacle vivant tel qu’il a été promu par le ministère de la Culture. Un travail gigantesque a été accompli là en un demi-siècle. Aucun autre pays n’a offert autant de résistances aux pressions du marché et le grand nombre d’artistes venus du monde entier pour en bénéficier est une preuve parmi d’autres de la pertinence dont nos politiques publiques ont fait preuve. Mais l’évolution de nos sociétés et le poids des idées libérales ont écorné le rêve d’une « démocratisation de la culture » par le haut et par l’offre qui devait ouvrir, pensait-on, sur un goût croissant de tous pour les créations artistiques les plus exigeantes. Nul n’a démérité mais des passions ont été asphyxiées ; les mouvements d’éducation populaire se sont étiolés.
Un besoin impératif de renouvellement s’est donc peu à peu imposé. Pas à la place de l’existant, mais à côté. C’est un des traits du paysage culturel actuel et c’est en cela que les nouveaux territoires sont un atout exceptionnel. Au cours de mon bref passage au ministère de la Culture, j’avais été interpellé par un écrit de Paul Virilio évoquant ces espaces intermédiaires comme « une sorte de cri pour retrouver la ville, le commun. » Le recensement opéré alors – rapport Lextrait – sur la densité de ces aventures atypiques fut pour moi une découverte. S’il est évident qu’existe parfois un décalage entre les réalités et les discours tenus, le grand intérêt de ces expériences est l’envie qui domine de bousculer la représentation du statut de l’artiste, de sa fonction sociale et des politiques culturelles pouvant en naître. Il existe là, sans que cela soit antagonique à d’autres approches, une des tendances fortes de l’art actuel, le désir de faire de l’œuvre un lieu de prédilection de la rencontre entre les hommes.

Les rapports avec les populations

Le choix qui y est fait de travailler sur plusieurs entrées, d’offrir une diversité d’ approches aux populations les plus circonspectes, de jouer sur les croisements entre disciplines, de penser davantage aux rapports avec les populations qu’en ciblage de publics, le choix de faire cohabiter sans tomber dans la confusion le travail artistique avec des activités sociales ou associatives, la volonté enfin sans céder en rien aux exigences de la création, d’écouter et de dialoguer dans un but d’appropriation de l’œuvre me semblent aller à l’essentiel des défis d’aujourd’hui.

Cette approche, qui est menée de manière plus ou moins convaincante selon les lieux, et qui n’est pas absente je le redis des préoccupations de certains de ceux qui oeuvrent au sein des institutions, est une des clés de la « démocratie culturelle ». Il est évident que les
inégalités frappent culturellement l’ensemble du champ social. C’est une plaie intolérable qui mine les rapports entre les individus. Celui qui n’a accès qu’aux show télévisés est diminué dans ses possibilités de penser, d’aimer et de résister. Mais il faut aussi admettre comme point de départ, à moins d’entériner les fossés existants, que chacun a ses représentations culturelles du monde, une sensibilité, des mots pour l’exprimer. On ne peut pas présupposer que les millions de gens qui ne vont ni dans les théâtres, ni dans les bibliothèques seraient incultes, aliénés à la marchandise, voués automatiquement à des stupidités télévisuelles.
Il est donc réconfortant de voir des artistes, et c’est une pratique dominante dans les nouveaux territoires de l’art, s’intéresser aux représentations culturelles que les gens ont d’eux-mêmes et des autres , aux configurations symboliques qui les font agir ou subir, aux pratiques culturelles qu’ils développent en propre. Nicolas Bourriaud, qui fut directeur du Palais de Tokyo à Paris, a développé une belle métaphore sur la  « pluie culturelle » ; constatant que n’importe quel individu est aujourd’hui confronté à une véritable pluie d’objets culturels et de signes, tout projet, pense-t-il, qui veut s’adresser au plus grand nombre, doit s’efforcer, sans renoncement aucun, de ne pas balayer cette « pluie », de construire au contraire des rigoles, des dispositifs pour comprendre et capter les envies et s’en servir. C’est ainsi que des relations se nouent entre des publics nouveaux et des œuvres et que naissent des espaces de dialogue.
Ce désir de refaire avec d’autres la ville, de révolutionner les expériences de travail, offre la possibilité de dépasser une vision réductrice de la culture. La place de cette dernière dans la cité, dans la vie sociale, est désormais le cœur de l’évolution de nos sociétés ; c’est là un enjeu politique fondamental. L’intervention citoyenne a besoin d’échanges, de confrontations, d’un langage créatif et commun. L’ancien maire de Rennes, Edmond Hervé, qui comme président de l’Institut des Villes poursuivit après 2002 le travail pour sauver les territoires de l’art de l’étranglement financier que la droite leur infligeait, affirmait que ces innovations permettaient de réunir les conditions d’une interpellation transversale de l’économique, du social, de l’éducatif et de l’urbain. Les espaces pour inventer du commun, jeter des passerelles entre différentes formes d’expression, sont une exigence pour toute politique émancipatrice. Les nouveaux territoires de l’art sont de solides points d’appui pour relever ce défi. La droite au pouvoir n’en est pas venue à bout. Ces lieux de résistance aujourd’hui relèvent la tête et attendent avec raison les moyens de remplir leurs missions. n

*Michel Duffour a été secrétaire d'État PCF au Patrimoine et à la Décentralisation culturelle de 2000 à 2002.

La Revue du projet, n° 20, octobre 2012
 

La culture dans l'entreprise : quel dialogue possible ? Jean-Michel Leterrier*

le 12 October 2012

La culture dans l'entreprise : quel dialogue possible ? Jean-Michel Leterrier*

Si nous l'avions oublié l'actualité se ferait fort de nous rappeler que l'opposition Capital/ Travail est toujours à l'œuvre, mais si derrière ce couple infernal, l'incidence économique est d'emblée reconnue, elle ne doit pas cacher que la question culturelle est bel et bien, elle aussi décisive.

L a reconnaissance de la culture au sein de l'entreprise fut longtemps contestée par le patronat, même si la création des comités d'entreprise en 1945 constitua une rupture décisive.
Pour autant les relations entre le monde de l'entreprise et celui de la culture ne furent pas un long fleuve tranquille, loin s'en faut, tant cette reconnaissance porta et porte toujours de rudes coups aux politiques de gestion patronale. Cette histoire pourrait se résumer en cinq phases.

La construction du syndicalisme

Première phase, c'est à l'aube des années 1850, au tout début de la grande industrialisation, que le patronat, afin de sédentariser une main-d'œuvre qu'il juge trop mobile, organise autour de l'entreprise une véritable toile d'araignée tentaculaire « les œuvres sociales patronales ». Le patron qui est aussi souvent le maire et le député, régente de « la naissance au cimetière » la vie des habitants : stade de foot, harmonie municipale, fanfare, caisse de solidarité, école professionnelle, hôpital, mutuelle… Tout est géré, organisé, subventionné et surtout contrôlé par le patron.
C'est contre cette mainmise paternaliste que va se construire le syndicalisme, et ceci n'est pas la moindre des exceptions culturelles françaises. Les premiers syndicats de métier vont très vite revendiquer la gestion des affaires qui les concernent en créant eux-mêmes leurs propres caisses de solidarité, leurs mutuelles, leurs clubs sportifs... En proposant au sein des universités populaires dès leurs premières années à la fin des années 1880, des cours d'économie politique, de philosophie, d'histoire, des ateliers d'arts plastiques, de théâtre, des conférences avec des intellectuels, des écrivains, des lectures collectives...
En 1895, année de sa création, la CGT, née de la fusion des Fédérations de métiers et de la Fédération nationale des Bourses du travail, trouve dans sa corbeille de naissance une riche tradition de gestions sociale et culturelle. Ce mouvement va encore s'amplifier jusqu'aux années 1936, des fédérations telle celle des métaux se dotent d'un solide patrimoine, sanatorium, centre de loisir, polyclinique, centrale d'achat, bibliothèques…
La victoire du Front populaire signe un retournement du rapport de forces tout en marquant la fin de cette première phase.

La création des comités d’entreprise
C'est dans la Résistance, dans le programme du CNR, puis à la Libération, que se construit la seconde phase. Les grandes nationalisations, la création de la Sécurité Sociale, des caisses vieillesse et retraites, puis celle des CE transfère enfin le pouvoir aux salariés...
Dans les entreprises les « œuvres sociales » sont « rétrocédées » à partir de 1945 aux comités d'entreprise. Ceux-ci vont s'employer en quelques années à substituer à la notion « d'œuvres sociales » celle « d'activités sociales et culturelles ». Derrière ce glissement sémantique se donne à lire une farouche volonté de s'affranchir des concepts d'assistanat, de caritarisme, de paternalisme, et de creuser une conception de la culture émancipatrice, héritière des « Lumières ». De la « Bataille du livre » au soutien de l'aventure du TNP de Jean Vilar, les CE innovent, construisent. Ils se dotent d'un patrimoine important dans le tourisme social, invitent des artistes et aident à la création de nombreuses œuvres artistiques. Mais les obstacles patronaux sont toujours nombreux, bibliothèque de Renault Billan­court déménagée en une nuit, il faudra attendre 1982 pour que le bibliobus du CE Peugeot Montbéliard puisse enfin pénétrer dans l'entreprise.

Introduction du concept « culture d’entreprise » et mécénat culturel

Une troisième phase s'inaugure à l'orée des années 80, le patronat tente de reprendre la main en déployant le concept de « culture d'entreprise ». Slogan qui cache, en fait, deux opérations de nature distincte, la première d'ordre idéologique a pour finalité la recherche d'un consensus au sein de l'entreprise, « nous sommes tous sur le même bateau », « nous devons ramer ensemble », « nous partageons les mêmes valeurs », « l'entreprise est une communauté culturelle ». Les syndicats ne seront pas dupes et cette opération idéologique sous couvert de caution culturelle fera long feu. La seconde, rendue possible par de nouvelles dispositions législatives, permet aux entreprises, en fait aux employeurs, de faire œuvre de « mécénat culturel » et de bénéficier en retour d'allégements fiscaux substantiels. Il va s'en dire qu'un certain nombre d'entreprises profiteront de cette ouverture sans que le comité d'entreprise, pourtant décisionnaire en la matière depuis la loi de 1946, ne soit consulté ni même informé. La Fondation Renault Art Industrie, par exemple qui rassemble la plus grande collection d'œuvres du peintre Vasarely n'a jamais fait l'objet d'une information devant le CE et n'a donc encore moins été présentée aux salariés de l'entreprise qui en sont pourtant en quelques sortes les copropriétaires.

La culture au travail

La quatrième phase s'ouvre dans les années 1990, lorsque la CGT met en avant le double concept de « la culture au travail ». Double parce qu'il s'agit tout à la fois de revendiquer et de faire reconnaître l'action culturelle menée par les CE et dans le même temps d'affirmer que le travail, en tant que tel, est en lui même producteur de culture. Ainsi l'entreprise est tout à la foi « réceptacle » de culture grâce à l'action culturelle mis en œuvre par les CE, tout en étant dans le même mouvement, un « foyer », un « creuset », de culture parce que le travail est lui même culture. Cette affirmation est au cœur des batailles syndicales d'hier et d'aujourd'hui.
En effet, le patronat a toujours tenté, et longtemps réussi, à déconnecter le travail de la culture, à extraire la culture du travail. Le Fordisme, le taylorisme, hier, la parcellisation des tâches, le télétravail, la précarisation des tâches, tout fut fait, tout est fait pour briser le collectif de travail.
Le combat pour tenter de faire reconnaître « le travail réel » et non le « travail prescrit » reste un combat culturel de premier ordre.

Le défi d’aujourd’hui

Nous entrons aujourd'hui dans une cinquième phase en forme de défi lancé aux comités d'entreprise, à savoir tenir les deux bouts de la culture « au » travail et de la culture « du » travail.
La tâche est rude pour les syndicats qui doivent se battre sur les deux fronts, d'une part, développer des activités sociales et culturelles émancipatrices qui se démarquent du consumérisme ambiant, qui se singularisent en suscitant la citoyenneté, la lucidité, en provoquant le pluralisme des idées, des images, des imaginaires, c'est à dire en agissant à « contre courant » des média et de la société de consommation, ce qui n'est pas tâche facile.
L'autre front, lui aussi est plus que décisif, il s'agit de la bataille pour le contenu, les conditions et l'exercice du travail. Il faut rendre celui-ci davantage qualifiant, davantage épanouissant ...Il n'y a pas de fatalité en la matière...
Les deux combats sont liés, et plus que jamais interdépendants, pas de loisirs et de pratiques culturelles épanouissants sans travail qualifiants. L'usage de ce temps que l'ont dit improprement « libre » est modelé, aspiré, hanté par la sphère du travail.
Aujourd’hui les CE sont doublement menacés, directement par les fermetures de sites, les délocalisations, les suppressions d'emplois et indirectement par eux-mêmes s'ils cèdent à la facilité, s'ils s'alignent sur les demandes consumérismes, ou redistribuent leur subventions en chèques lire, et autres chèques de tous ordres. Bref s'ils perdent leur singularité, leur spécificité, leurs raisons d'être, les CE sont aussi menacés par eux-mêmes.
C'est donc un double combat qu'ils doivent mener, celui pour la bataille de l'emploi, de son contenu, de sa qualité, de sa « plus-value » sociale et culturelle. L'autre combat concerne la qualité et la singularité des activités sociales et culturelles qui doivent être, devenir, ou redevenir, des activités au service de l'épanouissement des salariés, des outils au service d'une pleine et riche citoyenneté.
Le dialogue culturel dans l'entreprise c'est le dialogue, le métissage entre ces deux réalités culturelles. Le patronat l'a bien compris qui cherche à faire entrave au bon fonctionnement du CE (la très grande majorité des CE perçoit beaucoup moins de 1% de la masse salariale) et qui fait pression pour « déculturer » cette expérience majeure qu'est le travail. Ceux qui aujourd'hui, se gaussent ou caricaturent l'action des comités d'entreprise, seraient bien inspirés d'aller voir ce qui se passe dans le travail, car quand le travail est malmené la culture toujours en souffre.

*Jean-Michel Leterrier est syndicaliste et essayiste.

La Revue du projet, n° 20, octobre 2012
 

La culture à l’ère métropolitaine, Nawel Bab-Hamed*

le 12 October 2012

La culture à l’ère métropolitaine, Nawel Bab-Hamed*

Comment prendre en compte l’art et la culture dans les politiques territoriales, réinterroger le rapport droit commun/droit spécifique, repenser les morphologies et les périmètres des géographies prioritaires.

L ors de cette dernière élection présidentielle, un vif débat avait animé le Front de gauche sur la question de la politique de la Ville. Il y avait ceux qui prônaient la disparition du ministère de la politique de la Ville au nom de l’universalité du traitement social des citoyens et il y avait ceux qui prônaient la prise en compte des identités sociales et spatiales et culturelles dans leurs rapports à la ville. Mais tous avaient pour objectif une politique qui « pense le changement au lieu de changer le pansement ». Le projet d’une VIe République venait englober cette finalité en posant la question de l’horizontalité de l’intervention de l’État qui permettrait aux citoyens de « prendre le pouvoir » sur leur parcours de vie. Une part non négligeable de ce débat concernait les politiques culturelles : Démocratie ? Démo­cratisation ? Il s’agit, historiquement, d’une prise en compte de l’art et de la culture dans les politiques territoriales. L’action culturelle fut progressivement mobilisée par l’action publique au côté des droits fondamentaux (emploi, logement, santé, éducation, mobilité) pour veiller  à l’égalité qui fonde notre République.
Les géographies prioritaires ren­dent certes visibles bien plus qu'ailleurs les situations d'exclusion et de précarité sociale et culturelle, mais celles-ci ne représentent qu'une partie de l’iceberg. De plus, nous sommes dans une phase où  la logique structurelle de l'intervention publique change.  L’Europe de l’austérité rend les acquis sociaux de plus en plus vulnérables et opère un décrochage social durable. Parallè­lement, avec les réformes territoriales, l’effort est centré non pas sur la réduction de l'écart entre des quartiers prioritaires et le reste de la ville, mais sur l’interconnexion des centralités entre elles. C'est un « nouvel ordre » dans l'organisation de l'espace urbain qui s’opère : conception discontinue des territoires, mise en réseau des élites et des technopoles, spécialisation fonctionnelle des territoires, interdépendance sélective. Nous sommes à l’ère métropolitaine.

Compétence en matière de culture des pôles métropolitains

Selon le titre d’un colloque organisé par l’association des maires des grandes villes de France, les métropoles sont au « tournant des politiques culturelles ».
Dans les statuts des  pôles métropolitains officiellement arrêtés au  1er juin 2012, la culture fait partie des compétences énumérées par l’article 20 de la loi RCT du 10 décembre 2010 puisqu’il s’agit de coopération intercom­munale « en vue d’actions d'intérêt métropolitain en matière de promotion de l'innovation, de la recherche, de l'ensei­gne­ment supérieur et de la culture ». Il apparaît aussi dans les rapports communautaires,  la volonté  de faire émerger le sentiment d’appartenance métropolitain. Ainsi, le modèle métropolitain inspire, pendant que le modèle européen expire mais le modèle de « la concurrence libre et non faussée » reste le même.
Les politiques culturelles engagées sur un territoire en processus de métropolisation ont l’obligation d’être structurantes.  Elles se trouvent face à un double enjeu : celui de la cohérence avec d’autres stratégies publiques, et celui du déploiement des projets culturels pour des territoires plus étendus et plus hétéroclites.
Pourtant cette nouvelle compétence est quasiment occultée du débat démocratique actuel sur les métropoles. Plus exactement, le monde culturel est mis devant le fait accompli puisque cette compétence est confinée dans une approche utilitariste, dépendante du développement économique, inscrite dans les « pôles de compétitivité », liée à l’attractivité financière et touristique des grandes villes, déclinée dans les industries créatives au côté de la mode et du design. La promotion des activités culturelles aurait donc pour but
d’attirer les investissements économiques,  l’implantation d’entreprises, l’attraction touristique et le renouvellement de sa population. Quelles classes sociales attire-t-on ainsi ? dans quelles conditions s’insèrent-elles localement ?
À l’évidence, la métropolisation des politiques culturelles engage le changement d’échelle qui réinterroge le rôle des équipements et manifestations d’intérêt métropolitain. Elle vise à mutualiser les coûts, à réguler les concurrences internes d’une part et se mettre en concurrence avec ceux des autres métropoles nationales, européennes et internationales d’autre part. Ainsi, le transfert des grands équipements à l’échelon métropolitain pose des questions fondamentales : quelles mises en réseau pour quelles dynamiques culturelles structurantes ? pour quelle identité des territoires ? Est-il envisagé des coopérations entre centralités et périphéries ? Quelle conception de la proximité ? Quelle serait la valeur ajoutée du modèle métropolitain ?
Au plan local, les politiques culturelles doivent appréhender ce nouvel échelon puisqu’il nous conduit à réinterroger le rapport droit commun/droit spécifique, et, par là, à repenser les morphologies et les périmètres des géographies prioritaires.
L’ensemble de ces projections nous oblige  à penser l’art autant par le prisme de la complexité sociale et spatiale de cette nouvelle configuration en marche, qu'en termes culturel et financier.
Nous devons, donc, aller au-delà du « mythe fondateur » de ce nouveau territoire promis : mener une politique culturelle c’est se donner les moyens de prendre connaissance des enjeux et anticiper sur les nouvelles politiques culturelles  des grandes villes régionales, du quartier à la métropole, en posant la question précise de ce que pourra être l'aide à l’expérimentation, à la création, à la diffusion, qu’il s’agisse de professionnels ou d’amateurs.
Si la gauche partage  le postulat que l’art se pense à la fois dans sa relation avec la société qui le produit et dans les relations sociales qui se jouent à travers lui, le réduire à un instrument de pouvoir ou le limiter à « l’accès à l’art » (faisant fi de l'influence de la société sur son expression) serait fatalement destructeur voire autocratique. Alors, il devient urgent d’identifier démocratiquement les enjeux culturels contemporains et de verser au débat politique  les finalités et les garde-fous de ce processus de métropolisation de l’intervention artistique dans la  « Métro-Cité ».  n

*Nawel BAB-HAMED, est conseillère municipale (PCF) déléguée à la culture de la mairie du 1er arrondissement de Lyon.

La Revue du projet, n° 20, octobre 2012
 

Quand je serai grand, je serai intermittent ! Jean-Jacques Barey*

le 12 October 2012

Quand je serai grand, je serai intermittent ! Jean-Jacques Barey*

L’intermittence en soi ne saurait suffire à déterminer un « statut ». Elle n’est qu’une adaptation d’un mode particulier d’exercice du travail à la situation générale.

Nous avons tous rencontré un jour un enfant qui nous a dit : « Quand je serai grand, je serai comédien ! ». Ou danseur, ou pianiste, ou même ingénieur du son ou costumier(e). Je n’en ai pas encore rencontré qui m’ait dit : « Quand je serai grand, je serai intermittent ! ».

Pourtant, et notamment depuis une dizaine d’années et le conflit de 2003 consécutif à la « réforme » des annexes 8 et 10 de la convention UNEDIC et la signature d’un nouveau protocole entre le patronat et les organisations syndicales de salariés, les luttes intenses de l’été 2003 ont fait entrer le mot dans la langue, sans autre précision. L’intermittent est devenu la figure obligée du travailleur du spectacle. Si bien qu’il n’est pas rare, y compris chez les intéressés eux-mêmes, d’entendre parler du « statut d’intermittent » : « Je viens enfin d’obtenir mon statut… », formule qui signifie que le salarié a enfin réussi à travailler suffisamment longtemps pour entrer dans le système, et y demeurer. On entend plus rarement dire : « J’ai enfin obtenu mon statut de précaire »…
Le terme est devenu comme un référent identitaire, en quelque sorte en creux. Ce n’est pas le moindre des paradoxes que de voir ce régime spécifique d’assurance-chômage tenir lieu de « carte d’identité professionnelle » à ses bénéficiaires ! Un genre de « statut de l’artiste » par défaut en quelque sorte.
Il y a au moins deux grandes familles d’artistes : les interprètes et les auteurs. Les premiers sont comédiens, danseurs, musiciens instrumentistes, artistes de variétés… Les seconds sont écrivains, compositeurs, plasticiens… Ils sont auteurs. On les qualifie souvent de « créateurs ». Nul ne conteste que les uns et les autres soient des travailleurs, désireux de vivre de leur métier, de gagner correctement leur vie, de bénéficier d’une couverture sociale décente. Il n’en reste pas moins que nous avons affaire à deux statuts très différents : le statut de salarié et le statut d’auteur.
Toutes les batailles des travailleurs du spectacle, depuis des décennies, visent à ce que leurs droits sociaux soient les mêmes que ceux des autres travailleurs, ou qu’ils y tendent, qu’il s’agisse du droit à un contrat de travail, à une protection sociale digne, à une formation professionnelle continue, à des congés payés… bref, à des droits communs à ceux des autres salariés. L’intermittence en soi ne saurait suffire à déterminer un « statut ». Elle n’est qu’une adaptation d’un mode particulier d’exercice du travail à la situation générale.

Blocages et impasses de l’intermittence

Pierre-Michel Menger dans son dernier ouvrage (Les intermittents du spectacle, sociologie du travail flexible), nous donne les derniers chiffres disponibles : en 1992, les « intermittents » étaient 61 583. En 2007 ils étaient 137 307 (soit 223 %). Pendant ce temps le volume de travail mesuré en milliers d’équivalents-jours, est passé de 4 947 à 9 157 (soit 185 %) : le volume d’emploi croît beaucoup plus lentement que le nombre de travailleurs concernés. Un autre chiffre est encore plus paradoxal : le nombre des contrats de travail, dans cette même période, croît de… 460 % ! Comment interpréter cela ? Plusieurs raisons :
• Un nombre croissant de jeunes gens souhaite exercer un métier artistique. On peut s’en réjouir. Mais l’offre de travail ne suit pas. Ces activités sont étroitement tributaires de l’intervention publique. Or, à part la réelle progression des budgets culturels des collectivités, progression qui elle-même se ralentit brutalement, les budgets culturels stagnent.
• Les employeurs, profitant de l’aubaine du CDD d’usage, en profitent pour morceler à l’infini, à des fins d’ « optimisation » des plannings, les contrats de travail, d’où la croissance exponentielle de ces derniers.
• La « permittence » n’a pas été jugulée. Qu’est-ce donc ? Il suffit de déclarer comme « intermittents » des salariés travaillant
à l’année, à temps plein, chez un employeur unique. En effet pourquoi salarier quelqu’un 7 jours sur 7 si l’ASSEDIC peut en prendre en charge 4 ? C’est cynique ? Oui. C’est possible, sinon permis. On trouve ça partout, y compris chez les sociétés de l’audiovisuel public, les centres dramatiques nationaux, voire certains théâtres de villes même communistes.
La résorption de cette crise chronique est un casse-tête dont personne ne voit la sortie. Il est pourtant rapidement possible, au prix de quelques mesures réglementaires simples, de corriger ces dérives. On peut interdire l’usage du régime des annexes 8 et 10 pour certaines fonctions par essence permanentes. On peut aussi pénaliser de façon dissuasive les entreprises qui abusent du système, par exemple en jouant sur les taux de cotisations (un genre de bonus-malus), ou sur les subventions publiques. Il suffit d’un peu de volonté politique.
Enfin, on ne sortira pas durablement des « crises » qui affectent le régime de l’intermittence en se bornant à résorber des abus, resserrer encore le champ d’application ou réduire les prestations. Nul n’ignore que la consolidation du régime, depuis 1983 et ensuite, a concouru à faciliter l’entrée dans les professions du spectacle de nombre de jeunes professionnels, a permis à des centaines d’équipes artistiques, notamment dans le spectacle vivant, de se professionnaliser, et a par conséquent mis sur le marché du travail des milliers de jeunes artistes et techniciens. On ne saurait contester une telle dynamique, qui a correspondu à une période d’accroissement important des budgets culturels de l’État, puis des collectivités territoriales. Aujourd’hui la part de l’intervention publique (État, toutes administrations et collectivités territoriales, tous niveaux confondus) est d’environ 14 Md€, soit moins de 0,7 % du PIB, quand la dépense culturelle totale (pouvoirs publics, entreprises et particuliers) est de l’ordre de 80 Md€, soit 4 % du PIB environ. Notons au passage que la plupart de ces nouveaux emplois, avec la complicité des tutelles, ont largement profité de l’effet d’aubaine des annexes 8 & 10, et fort peu à l’emploi durable. Un directeur de CDN me racontait, alors qu’il procédait à la création d’un atelier de construction de décors pour son théâtre, et créait dans un premier temps deux emplois permanents de techniciens qualifiés, qu’il s’était fait tirer les oreilles par la DRAC (direction régionale de l’action culturelle) au prétexte qu’il aurait pu recourir à l’intermittence…

Quelles solutions ?

On ne réformera pas durablement l’intermittence si on ne revisite pas à fond les conditions d’exercice des métiers. On ne peut plus longtemps supporter que l’augmentation du volume de travail, réelle ces trente dernières années, se traduise par une augmentation plus grande encore du chômage et de la précarité. Il est inacceptable que l’intermittence, mode d’exercice inévitable, quoique non exclusif, des professions du spectacle, soit devenue une absence de choix.
Le « non-travail » d’un artiste interprète ou d’un collaborateur de création, technicien ou autre, n’est pas une période d’inactivité. Le danseur poursuivra l’entretien de son corps, plusieurs heures par jour ; le pianiste continuera à faire ses gammes ; le metteur en scène mettra à profit cette période de calme pour lire des textes ou réfléchir à son prochain projet ; l’éclairagiste, le machiniste ou le technicien du son se formera, visitera les salons professionnels, testera les nouveaux matériels ; etc. Le « chômage » des travailleurs du spectacle est le plus souvent une période d’intense activité. On estime que le « nouveau protocole » de 2003 a provoqué l’éviction du métier de plus de 20 000 professionnels par an, parmi les plus fragiles, même si le choc a fini par se lisser à la longue. Qui peut oser dire que c’est un « progrès » ?
Après avoir analysé les blocages et les impasses du système, force est de constater qu’on n’en sortira qu’en créant de l’emploi permanent. Dans l’audiovisuel, la résorption de la précarité devra porter sur tous les métiers qui n’ont aucune vocation à être « intermittents », et dans le spectacle vivant on développera les politiques dites de « permanence artistique ». Cela passe par un accompagnement suivi des pouvoirs publics, y compris financièrement. Si les études sur les « Pratiques culturelles des Français » de ces dernières décennies font apparaître une relative stagnation des publics, notamment du spectacle vivant, il est clair que les expériences de « permanence artistique » se sont toutes traduites par un élargissement durable des publics et créatrices d’emploi. Reste à consolider ces créations d’emploi en les rendant en grande partie pérennes. Exemple quasi-unique en France : le TNP de Villeurbanne, où Christian Schiaretti, poursuivant l’expérience engagée lorsqu’il était directeur de la Comédie de Reims, a reconstitué une troupe permanente, aujourd’hui composée de 14 artistes. Quelques Centres dramatiques et chorégraphiques commencent timidement à s’engager sur ce chemin.
Le seul gisement d’économies en matière d’intermittence est dans la création d’emplois permanents. Développer une politique audacieuse d’emploi permanent, artistique et technique, dans le spectacle, des milliers d’artistes et de techniciens sortiront par le haut du système, verront leur emploi consolidé, leur travail pérennisé et leur fonction sociale confortée. Les citoyens-spectateurs, actuels ou potentiels, verront les équipes artistiques de leur territoire en situation d’assumer leur fonction de « laboratoire du symbolique » et de « partage du sensible » au service de l’ensemble du peuple.
*Jean-Jacques Barey est opérateur culturel. Il est co-animateur du collectif Culture du PCF.
 

 
 
 
 
 
 
« Le bonheur est une idée neuve en Europe. » Saint-Just (révolutionnaire français, 1767-1794)