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Rassemblement contre l'antisémitisme, le racisme et pour l'amitié entre les peuples - Beauvais, 12 novembre 2023

Le 12 novembre 2023, une grande marche contre l'antisémitisme était organisée à Paris.

À Beauvais, Thierry Aury, conseiller municipal de la ville et petit-fils de résistant au nazisme, appelait à se retrouver, symboliquement, le même jour, devant la plaque de rue Marguerite et Gaston Cahen, assassiné·e·s comme juive et juif par les nazis à Auschwitz en 1944, pour marquer notre volonté d'agir ensemble contre l'antisémitisme, contre le racisme sous toutes ses formes et pour l'amitié entre les peuples.

Je propose aux citoyennes et citoyens qui le souhaitent de se rassembler dimqnache 12 novembre, à 11 h, à Beauvais, devant la plaque de la rue Marguerite et Gaston Cahen, pour porter ensemble notre volonté d'agir contre l'antisémitisme, le racisme et pour l'amitié entre les peuples.

Notre pays, comme d'autres, connaît une recrudescence d'actes et d'expressions antisémites qui nous rappellent un terrible passé où l'extrême droite au pouvoir en France, avec le régime de Pétain collaborant avec l'occupant nazi, envoya à la mort des milliers d'enfants, de femmes et d'hommes parce qu'ils étaient juifs.

C'est pourquoi, comme petit-fils d'un résistant beauvaisien qui combattit le nazisme et ses « collaborateurs » et comme élu beauvaisien, j'appelle à un rassemblement symbolique et citoyen, sans autre drapeau que celui de la République et celui de la Paix, devant la plaque de la rue Marguerite et Gaston Cahen, couple d'enseignants beauvaisiens, déportés et assassinés à Auschwitz comme juifs.

Par ce rassemblement citoyen, nous pourrons ensemble dénoncer avec force l'antisémitisme, le racisme, les appels à la haine, à l'exclusion, au rejet contre des personnes ou des groupes de personnes en raison de leurs origines, leur couleur de peau, leur religion réelle ou supposée, leur culture.

Toutes les idéologies prônant la supériorité d'un peuple ou d'une religion, tout ce qui alimente la haine et la violence, conduisent toujours au pire.

Plus que jamais, dans ce moment où l'humanité et les êtres humains sont bafoués dans tant d'endroits du monde, affirmons ensemble notre volonté de la paix et de l'amitié entre les peuples, par la justice, l'égalité de droits et le respect mutuel, et notre attachement à faire vivre pleinement et concrètement les principes de la République : liberté, égalité et fraternité. 

Thierry Aury

conseiller municipal de Beauvais, petit-fils de résistant au nazisme

 

Merci à celles et ceux qui ont répondu à cet appel : élu·e·s municipaux·ales et régionaux·ales présent·e·s, aux responsables et militant·e·s de la Ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme (LICRA), de la Ligue des droits de l’Homme (LDH), de l’Association France Palestine Solidarité, organisations syndicales, politiques, associatives, et aux citoyennes et citoyens qui ont tenu à participer malgré la pluie et le froid !

Deux drapeaux flottaient : celui de la République et celui de la Paix. 

 

Texte de l'intervention de Thierry Aury :

J'ai lancé cet appel aux citoyennes et citoyens beauvaisiens qui le souhaitaient, à se rassembler ce dimanche, symboliquement devant la plaque de la rue Marguerite et Gaston Cahen, pour porter ensemble notre volonté d'agir contre l'antisémitisme, toutes les formes de racisme et pour l'amitié entre les peuples.

En effet, notre pays, comme d'autres, connaît une recrudescence d'actes et d'expressions antisémites qui nous rappellent, ici en France, un terrible passé où l'extrême droite au pouvoir, avec le régime de Pétain où se retrouvaient les pires antisémites, collaborant avec l'occupant nazi, envoya à la mort des milliers d'enfants, de femmes et d'hommes parce qu'ils étaient juifs.

Rappelons que certains de ces collaborateurs français des nazis furent, comme le waffen SS Pierre Bousquet, les cofondateurs du FN en 1972 avec Jean-Marie Le Pen, qui lui-même fut plusieurs fois condamné pour des propos antisémites ou minimisant le génocide des juifs par les nazis, ce que l'actuel président du RN, héritier du FN, semble oublier quand il fait mine de ne pas savoir si Le Pen est antisémite !

Et Marine Le Pen, elle-même, navigue depuis toujours, avec une série de tristes personnages, totalement antisémites et parfois admirateurs de Hitler, comme Chatillon ou Lousteau.

Comme beaucoup, nous ne sommes donc pas dupes du prétendu relookage du RN qui serait devenu le meilleur ami des juifs de France alors qu'il a seulement changé de priorité dans ses obsessions racistes, en privilégiant la haine contre les Arabes et les musulmans.

C'est pourquoi, comme petit-fils d'un résistant beauvaisien qui combattit le nazisme et ses « collaborateurs » et comme élu beauvaisien, il me semblait important d'appeler à se retrouver aujourd'hui, devant la plaque de la rue Marguerite et Gaston Cahen, couple d'enseignants beauvaisiens, déportés et assassinés à Auschwitz comme juifs, et de rappeler que, dans notre pays, l'antisémitisme politique a été porté depuis toujours par l'extrême droite.

À cet instant, je veux rappeler qui étaient les Cahen :

Gaston, diplômé de l’École des langues orientales, ancien directeur-fondateur de l'Institut français de Sofia, avait été professeur d'histoire au lycée Félix-Faure de 1926 à jusqu'à sa retraite anticipée en 1936 pour cause de cécité. Socialiste et libre-penseur, il fut l'auteur de nombreux articles dans des revues et journaux progressistes comme la Grande Revue.

Marguerite était institutrice et avait été révoquée par Vichy dans le cadre des lois anti-juives, en octobre 1940 et tous deux furent contraints de porter l'étoile jaune.

Quand ils sont arrêtés le 5 janvier 1944, à leur domicile (rue du Mont-Capron à Beauvais dans une maison qui a été détruite lors de l'ouverture de l'avenue Jean-Moulin) dans le cadre d'une rafle de 51 « juifs » en Picardie, Gaston Cahen a 67 ans, il est aveugle et Marguerite a 51 ans.

Ils sont internés à Drancy puis déportés vers Auschwitz par le convoi n° 66 du 20 janvier 1944 et leur mort, certainement par gazage, est enregistrée le 25 janvier 1944.

Leur fils, Pierre-Louis, qui avait 23 ans en 1944, était alors engagé dans la Résistance, dans un maquis près de Toulouse. Dans une lettre publiée dans le courrier des lecteurs du Monde le 4 janvier 1994, il écrivait notamment qu'« il n'avait pour héritage que sa seule mémoire ».

Leur mort abominable comme celle de millions d'autres juifs d'Europe, nous rappellent à quoi peuvent conduire les idéologies porteuses de haine, de racisme et de xénophobie.

Et parmi toutes les formes de racisme, il faut être sans concession contre celle qui s'exprime par l'antisémitisme, un antisémitisme qui, il faut en être conscient, s'est exprimé ou s'exprime parfois, bien au-delà des frontières de l'extrême droite.

Un antisémitisme qui parfois se nourrit ou du moins utilise comme prétexte, cette situation de guerre sans fin au Proche-Orient, avec l'injustice faite au peuple palestinien privé d'un État et interdit d'existence depuis 75 ans et la passivité voire parfois la complaisance de la communauté internationale vis à vis de la politique de colonisation des gouvernements israéliens et leur mépris du droit international.

Donc il faut être très clair : il est tout à fait légitime de pouvoir s'opposer voire condamner la politique du gouvernement israélien, et ce n'est pas être antisémite que de pouvoir le faire.

D'ailleurs des centaines de milliers d'Israéliens étaient ces derniers mois dans la rue pour dénoncer avec force la politique de Netanyahou.

Nous ne confondrons jamais le peuple israélien avec ces dirigeants du moment - c'est valable d'ailleurs pour tous les peuples et tous les pays du monde.

Et surtout, nous ne confondons pas l'ensemble des Juifs de France et du monde, qu'il soient d'ailleurs de confession juive ou simplement de culture juive, avec la politique israélienne.

Même si nous savons que l'histoire fait qu'une partie des Juifs de France a de la famille, des amis en Israël et est donc particulièrement sensible à ce qui se passe là-bas, et par exemple a ressenti beaucoup d'émotion, comme nous tous au demeurant, après l'attaque sanglante des commandos du Hamas le 7 octobre.

Mais beaucoup de Juifs de France ont aussi exprimé, comme beaucoup d'autres citoyens, leur même émotion devant les terribles bombardements israéliens et les massacres de populations civiles en cours à Gaza, et mon ami Jean-Jacques Pik, d'une Autre Voix juive, ou l'Union juive pour la paix, par exemple, l'ont exprimé tout à fait clairement toutes ces dernières semaines.

Les Juifs de France ne sont en rien responsables collectivement de la politique du gouvernement israélien, et il faut bannir absolument et être sans aucune concession contre toute expression d'antisémitisme et de mise en accusation des juifs.

Rien ne justifie ou n’excuse jamais l’antisémitisme dont l'histoire nous apprend qu'il conduit toujours au pire.

De la même manière, les Français dont les familles sont originaires du Maghreb, de Turquie, du Moyen-Orient, d'Afrique, ceux qui sont de religion ou de culture musulmane, ne sont en rien responsables par exemple, des actes du Hamas le 7 octobre contre des centaines d'Israéliens, femmes, enfants, hommes civils désarmés.

Et il faut s'élever avec force contre la montée du racisme anti-arabe, ou encore de ce que l'on appelle l'islamophobie, ces idéologies portées là-aussi par l'extrême droite, mais malheureusement relayées désormais, en boucle, par des chaines dites d'informations en continu, mais aussi par d'autres médias et par d'autres dirigeants d'autres forces politiques.

Par ce rassemblement citoyen, nous voulons dénoncer avec force l'antisémitisme, mais aussi toutes les formes de racisme, les appels à la haine, à l'exclusion, au rejet contre des personnes ou des groupes de personnes en raison de leurs origines, leur couleur de peau, leur religion réelle ou supposée, leur culture.

Il est insupportable que, dans notre pays, des enfants, des femmes, des hommes puissent avoir peur, ne pas se sentir en sécurité pour leur couleur de peau, leur origine ou leur religion supposée ou réelle.

Toutes les idéologies prônant la supériorité d'un peuple ou d'une religion, tout ce qui alimente la haine et la violence, conduisent toujours au pire.

Il nous faut être particulièrement vigilant dans ce contexte d'une crise profonde, économique, sociale, politique qui frappe notre pays mais aussi toute l'Europe, face à cette utilisation de l'antisémitisme, du racisme, de la xénophobie comme moyens de diviser ceux qui devraient être unis par leur condition sociale, ceux qui devraient être unis pour trouver des solutions progressistes et humanistes aux grands dédis de l'humanité et de la planète.

Nous n'oublions pas qu'en d'autres époques de crise déjà, dans les années 1930, en France, une partie de la grande bourgeoisie qui ne voulait pas voir remettre en cause ses intérêts, porta l'idée que « plutôt Hitler que le Front populaire ! », une idée qui fut mise en oeuvre à partir de 1940, sous l'égide de l'occupant nazi, après la défaite de 1940 que Maurras, idéologue de l'extrême droite et de l'antisémitisme en France, vit comme « une divine surprise ».

Bertold Brecht avait raison quand il disait que « le ventre est encore fécond d'où a surgi la bête immonde ».

Et le combat pour faire reculer durablement cette « bête immonde » nécessite évidemment de s'attaquer à tout ce qui la nourrit, de s'attaquer à la racine des problèmes en faisant reculer durablement au niveau social, économique, politique tout ce qui plonge des hommes, des femmes, dans la détresse, dans la désespérance, dans le repli et peut leur faire oublier qu'ils sont frères, soeurs des autres êtres humains et qu'ils doivent chercher ensemble, de manière solidaire, des solutions durables à leurs problèmes.

Plus que jamais, dans ce moment où l'humanité et les êtres humains sont bafoués dans tant d'endroits du monde, affirmons ensemble notre volonté de la paix et de l'amitié entre les peuples, par la justice, l'égalité de droits et le respect mutuel, et notre attachement à faire vivre pleinement et concrètement les principes de la République : liberté, égalité et fraternité.

Car, comme Jean Jaurès le disait, pour nous « il n'y a qu'une seule race : l'humanité ».

 

 
« Le bonheur est une idée neuve en Europe. » Saint-Just (révolutionnaire français, 1767-1794)