Fédération de l'Oise

Fédération de l'Oise
Accueil
 
 
 
 

Un plan de réconciliation nationale par l'égalité républicaine - PCF, 4 juillet 2023

 

 

 

Édito de Fabien Roussel

La mort du jeune Nahel a provoqué une immense émotion et a mis à nouveau en lumière la violence des rapports entre une partie de la police et des jeunes de notre pays.

Et les violences qui ont suivi ont montré que la colère provoquée par cette situation pouvait être détournée au profit d’actes destructeurs à l’encontre de personnes, d’institutions, de biens.

Je le dis avec clarté et fermeté : toutes ces violences sont insupportables et inacceptables. Je considère qu’elles n’ont pas leur place en République. Nos concitoyens ont le droit à la sécurité, à la tranquillité publique.

Elles témoignent de la crise profonde de notre pays, des fractures entre catégories sociales, entre personnes en proie ou non au racisme et aux discriminations, entre modes de vie différents.

Une partie de la France ne comprend plus ce qui se passe dans une autre partie du pays.

La solidarité envers la famille du jeune Nahel et l’exigence d’autres rapports entre une partie de la police et de la jeunesse devraient être fortes et unir le pays. Mais les fractures et la haine déversées par les forces de droite et d’extrême-droite ainsi que les actions violentes et les pillages de commerces par des groupes d’individus, les fermetures de services et les couvre-feux qui impactent lourdement notre vie quotidienne, divisent un peu plus chaque jour la France.

Pourtant, dans les banlieues populaires de nos villes comme dans les communes rurales de notre pays, une même souffrance est là dans la jeunesse, dans le monde du travail, et un même sentiment de relégation, provoqué par des décennies de politiques néolibérales.

Des millions de Françaises et de Français y vivent une situation intenable, frappés par la pauvreté et la précarité, qu’elles résultent de la privation d’emploi ou d’un travail dévalorisé et peu rémunéré, constatant des services publics et des petits commerces disparaître les uns après les autres, des associations n’ayant plus les moyens d’intervenir, une insécurité qui se renforce avec des violences quotidiennes. C’est sur ce terreau commun que les fractures grandissent et que les idéologies les plus dangereuses, xénophobe et islamiste, se développent.

L’heure est venue d’arrêter cette spirale infernale et non de mettre de l’huile sur le feu. La déclaration récente aux accents séditieux de deux syndicats de policiers, qui sème les germes de la guerre civile, doit déboucher sur des sanctions. Et ce n’est pas l’État d’urgence qui règlera la situation mais bien des politiques publiques audacieuses pour les privé·es d’emplois et les salarié·es, les jeunes, des politiques qui unissent nos concitoyennes et concitoyens.

J’appelle à un Grenelle pour l’égalité des territoires et contre toutes les discriminations, rassemblant tous les acteurs et actrices des communes et quartiers concernés, pour qu’enfin une politique à la hauteur des enjeux soit décidée et mise en œuvre avec eux.

Dans cet objectif je verse aujourd’hui au débat un plan de réconciliation nationale par l’égalité républicaine. Comme citoyen, comme élu de la République, c’est l’ambition que je porte pour la France.

Fabien Roussel,

secrétaire national du PCF et député du Nord

 

Introduction

La France est parmi les 10 pays qui produisent le plus de richesses dans le monde et est une puissance diplomatique reconnue. Elle est aussi riche de son histoire, qui a vu se dé- rouler la Révolution française porteuse de valeurs universelles.

Notre République se présente pourtant aujourd’hui comme affaiblie, incapable de faire face à ses principales vocations : faire vivre la démocratie, assurer l’éducation des nou- velles générations, la sécurité et le bien-être de toute la population, répondre aux besoins fondamentaux et aux exigences d’égalité et de justice, de liberté, et de fraternité, faire pro- gresser l’influence de ses valeurs universalistes en France et dans le monde.

Les événements de ces derniers jours ont montré l’urgence de cette tâche indispensable de réconciliation et de transformation sociale et démocratique profonde de notre pays. Les autres peuples regardent, incrédules, l’incapacité de notre pays à surmonter ses difficultés malgré ses atouts, malgré son histoire, malgré ce qu’elle représente dans l’histoire du monde moderne et actuel.

Nous pensons que notre pays a les ressources pour refonder la République en phase avec notre histoire et notre réalité économique. Nous proposons de nous hisser collectivement à la hauteur du défi posé à la France : celui de refonder, dans les conditions d’aujourd’hui, notre République qui est le socle de la vie collective de près de 70 millions d’habitants.

Il est temps de ramener la République là où elle a démissionné depuis des années.

Cela exige d’abord d’engager une politique ambitieuse de tranquillité publique, s’appuyant sur une police républicaine, des gardiens de la paix au service de toute la population et disposant de moyens pour accomplir cette mission, y compris dans la proximité.

C’est cette politique qui permettra de faire reculer les comportements délictueux et crimi- nels, les violences comme les incivilités, les trafics de drogue, la traite des êtres humains et la prostitution. C’est cette politique qui s’avère si urgente et nécessaire pour mettre un terme au divorce installé entre une partie du peuple et l’institution policière.

Et il faut aller plus loin car les réponses policières ou judiciaires n’ont jamais suffit à elles seules à éradiquer la violence. Elles sont une réponse nécessaire mais insuffisante.

L’ensemble des politiques publiques que nous portons entend contribuer à traiter le mal à la racine.

Cela implique des mesures d’urgence pour renforcer l’action associative et les initiatives de solidarités, reconstruire des services publics démocratisés et étendus, développer l’insertion professionnelle et l’emploi, notamment en réindustrialisant les territoires, soutenir la culture et revitaliser la démocratie.

Cela suppose aussi de renforcer l’autonomie fiscale des collectivités territoriales et de dé- velopper le logement social.

Cela suppose enfin de cesser de considérer la jeunesse comme un « problème à traiter » car elle est l’une des solutions à la crise qu’affronte le pays. La jeunesse doit devenir une grande cause nationale.

C’est grâce à elle que se font jour des comportements nouveaux dans la société, que les batailles pour l’égalité des droits progressent, que l’on pourra dans le futur mettre fin au patriarcat, faire respecter la dignité humaine autant que nos ressources naturelles.

La République devra, dans le même temps, réaffirmer son engagement laïc.

C’est par l’ensemble de ces mesures qu’il sera possible de rétablir durablement la cohésion de la nation et de réconcilier les Françaises et les Français.

 

1

Une politique progressiste de proximité

pour la tranquillité publique

 

  1. Refonder l’organisation des forces de police et redéfinir leurs missions

Sous prétexte de durcir les dispositifs répressifs face à l’insécurité, en vertu d’une politique du chiffre délirante, et du fait d’une austérité qui assèche les moyens de l’État, le pouvoir en place et ses prédécesseurs ont rendu de plus en plus difficile le métier de policier·e. Les forces de police sont confrontées à de nouveaux défis – comme la montée des incivilités ou délits, les atteintes à l’intégrité des personnes comme des agents publics, l’amplification du trafic de drogue, les violences faites aux femmes ou aux enfants, le dévelop- pement des discriminations et du racisme, le terrorisme – qu’ils doivent relever dans le cadre de la conception républicaine qu’ils ont pour mission de défendre.

Cela passe par :

  • La création d’une police de proximité dotée de 30 000 fonctionnaires et l’ouverture d’un débat national sur le rôle et les missions de la police.
  • La refonte de la formation des agents et l’augmentation de la durée de celle-ci, des moyens pour remplacer les véhicules des agents, les matériels de protection et d’intervention, la rénovation des locaux.
  • Mettre en place un suivi psychologique obligatoire des agents des et organiser des cycles de travail permettant de concilier vie familiale et vie professionnelle.
  • Un nouveau schéma de maintien de l’ordre visant la désescalade.
  • L’abrogation de la loi de 2017 qui élargit la possibilité aux agents de police d’utiliser leur arme et une nouvelle doctrine d’engagement.
  • Les violences et les abus à caractère raciste dans la police ne seront plus tolérés : leurs auteur·e·s seront déféré·e·s devant la justice et pourront faire l’objet de procédures de révocation.
  • Établir un récépissé pour les contrôles d’identité indiquant le fondement légal du contrôle.
  • La création d’une instance indépendante de contrôle de l’activité policière.

 

  1. Élaborer un grand plan de sauvetage de notre justice

La communauté judiciaire est à bout de souffle. Depuis des années, magistrat·e·s, avocat·e·s, greffier·e·s, personnels administratifs alertent et demandent que soient engagées une grande modernisation et une grande démocratisation de la justice, dans le but de la rendre accessible à toutes et tous. Rétablir la confiance, qui s’est délitée, entre la justice – tant en matière pénale que civile – et les justiciables, et répondre aux multiples revendications de la communauté judiciaire appelle une profonde réforme qui doit notamment rompre avec des logiques purement budgétaires et dégager en urgence des moyens humains et matériels.

Cette réforme inclura :

  • La justice et l’accompagnement des mineur·e·s seront dotés de 25 000 magistrat·e·s, éducatrices et éducateurs.
  • La création d’un véritable code de l’enfance, regroupant tous les textes au civil comme au pénal, et non un code réduit à la justice pénale des mineurs ; le recrutement de juges spécialisés et l’augmentation du nombre d’éducateurs et des moyens de la PJJ.
  • La simplification des procédures pénales et civiles.
  • Le remplacement du Conseil supérieur de la magistrature par un Conseil supérieur de la justice, garant de l’indépendance des magistrats et magistrates.
  • La mise en place de tribunaux spécifiques pour les violences faites aux femmes.
  • L’institution carcérale fera l’objet d’un effort particulier, afin d’en renforcer les moyens et de la rendre plus humaine. La prison républicaine doit être le lieu non seulement de la mise hors d’état de nuire des délinquants et des criminels, mais aussi celui de la réinsertion.
  • Toutes ces mesures supposeront qu’un véritable dialogue voit le jour avec tous les professionnels du droit, dans le cadre de véritables états généraux co-organisés et respectueux de la séparation des pouvoirs, laquelle est la garante d’une justice dé- mocratique préservant les droits et libertés des citoyennes et des citoyens.

 

2

Un plan pour l’égalité républicaine

dans toutes nos communes

 

  1. Investir 10 milliards pour nos communes dont 1 milliard d’euros pour le plan d’urgence proposé par les maires dès 2020

  • Un fonds d’urgence pour les associations œuvrant pour la jeunesse et les publics en difficulté. Co-piloté par les villes, il sera doté d’une enveloppe annuelle de 100 millions d’euros. Suppression de la taxe d’habitation pour les locaux des associations.
  • Un fonds de 200 millions d’euros pour la création de comités locaux de solidarité dans les villes les plus pauvres. Consacrés à l’aide d’urgence (détresse sociale, grande pauvreté, aide alimentaire...), ces moyens permettront de renforcer les marges de manœuvre des acteurs de terrain.
  • Un fonds de soutien à la création de maisons médicales et de centres de santé dans les villes pauvres ou en voie de paupérisation. Celui-ci sera doté, dès son lancement, de 200 millions d’euros.
  • Un fonds de 120 millions d’euros pour la mobilisation des acteurs de l’emploi.
  • Création de 7 000 postes aidés « médiation et tranquillité publique » (ASVP, médiateurs) dans les quartiers prioritaires.
  • Développement d’un plan national de lutte contre l’illettrisme et l’illectronisme dont l’objectif sera de diviser par deux le nombre de personnes en situation d’illettrisme d’ici 2025.
  • Lancement de 200 plateformes de mobilité dans les villes les plus enclavées (territoires urbains et ruraux).
  • Renforcement des programmes d’éducation aux médias et au numérique dans le secondaire (collèges et lycées).
  • Généralisation des clauses d’insertion (soit portées par les entreprises elles-mêmes, soit déléguées à un acteur de l’économie sociale et solidaire) dans tous les marchés publics et particulièrement dans le cadre de Paris 2024.

 

  1. Renforcer les moyens des communes et développer le logement social

  • Le maintien des quartiers en politique de la ville dont le nombre d’habitant·e·s est inférieur à 1 millier.
  • La fin de la baisse des dotations aux collectivités et leur indexation sur l’inflation.
  • La création d’un fonds spécial sur l’investissement pour rebâtir mieux, intégrer dans les constructions des normes durables pour embellir les quartiers.
  • Une dotation spéciale aux collectivités sur le fonctionnement : c’est essentiel pour soutenir l’action des agents publics locaux en première ligne face à la crise.
  • Renforcer l’autonomie fiscale des collectivités territoriales à l’opposé de la politique menée ces dernières années et du processus d’assises des finances publiques qui débouche sur un plan d‘austérité pour les collectivités et ignore les demandes des maires et l’exigence d’un pacte financier sur la durée entre l’État et les collectivités.
  • Supprimer la ponction de 1,5 milliard d’euros faites aux bailleurs sociaux dites RLS et ramener la TVA à 5,5 % sur le coût total de la construction.
  • Soutenir la construction de logements sociaux en rétablissant l’aide à la pierre et soutenir les maires bâtisseurs qui respectent la loi SRU.

 

  1. Développer les services publics de proximité

Le service public est la richesse de la nation, de celles et ceux qui n’ont d’autre protection que la solidarité collective.

Nous proposons :

  • Un fonds de développement des services publics de proximité permettant l’accès pour chaque usager à un bouquet de services publics à proximité de chez lui : ceux-ci répondront aux besoins de la vie quotidienne, avec des horaires adaptés aux attentes de cha- cune et de chacun. Il sera reconnu aux élu·e·s locaux et nationaux un pouvoir de contrôle et d’analyse de la couverture des besoins de la population par les services publics.
  • La précarisation des personnels cessera (plus d’un million de non titulaires présentement) et les agents bénéficieront d’un pouvoir renforcé d’intervention.
  • Un plan d’embauche massive et de hausse des rémunérations dans la fonction publique pour garantir les missions du service public : création de 500 000 emplois et revalorisation d’au moins 30 % du point d’indice.

 

  1. Investir pour le climat dans les quartiers populaires

  • L’État ne soutient absolument pas la rénovation des logements sociaux, ce qui crée une discrimination évidente par rapport aux logements privés aidés via MaPrimeRenov. Nous proposons la création d’une MaPrimeRenov logement social, qui soit gérée par l’ANAH, et qui apporte un financement par logement au moins équivalent à MaPrimeRenov Copropriétés.
  • Création d’un Fonds Vert spécifique pour les quartiers populaires, dotés de 400 millions d’euros par an pour aider à la rénovation énergétique des bâtiments publics et de 100 millions d’euros par an pour aider à la végétalisation des quartiers.
  • Ouverture de la prime à la conversion aux véhicules d’occasion de Crit’Air 1 et doublement du budget de l’État pour les primes à la conversion, pour réduire les émissions de particules fines.
  • Création d’une enveloppe spécifique de l’État pour le Fonds Vélo de 100 millions d’euros par an pour les quartiers populaires, suppression de l’obligation d’une part de 30 % du financement pour les maîtres d’ouvrage pour les investissements utiles pour le climat dans les quartiers populaires.

 

3

Un pacte pour la jeunesse

qui engage la nation

 

  1. Construire un service public national de la protection de l’enfance et aider les familles

  • Renforcer la protection et le suivi des jeunes au sein et à l’issue du parcours ASE (interdiction des sorties sèches de l’ASE, automaticité de la garantie jeune jusqu’à 21 ans, extension des contrats jeunes majeurs jusqu’à 25 ans).
  • Un dispositif de prise en charge des mineur·e·s non accompagné·e·s financé à la hauteur des besoins et juridiquement contraignant.
  • L’action publique sera pleinement mobilisée en faveur de la prévention et de l’action contre les violences sexuelles sur les mineures.
  • La Protection maternelle et infantile (PMI) se verra renforcée pour accompagner, prévenir, dépister, soigner tous les enfants.
  • La luttee contre le harcèlement scolaire et lecyber-harcèlement sera décrétée grande cause nationale et un plan de lutte contre l’incitation à la violence sur les réseaux sociaux sera lancé.
  • Le repas à un euro maximum pour les familles aux plus faibles ressources sera généralisé dans tous les établissements scolaires.
  • La limitation du travail en horaires décalés pour permettre aux parents de disposer de plus de temps avec leurs enfants.
  • Un réel service public de la petite enfance avec des modes de garde pour chaque enfant, permettant ainsi aux parents un retour à l’emploi dans les meilleures conditions.

 

  1. Avoir la jeunesse la mieux formée et une école qui émancipe

  • Aucune fermeture de classes à la rentrée scolaire.
  • Recrutement en L3 de 10 000 enseignants en urgence pour la prochaine rentrée, formés durant deux ans jusqu’au concours.
  • Augmenter le temps scolaire pour que tous les devoirs soient faits à l’école.
  • Mise en place d’un plan pour la santé mentale des jeunes, avec des infirmiers et médecins scolaires dans chaque établissement.
  • La sélection à l’entrée de l’université sera supprimée : les réformes du lycée et du baccalauréat seront abrogées, et « Parcoursup » sera supprimé.
  • La possibilité de passer le bac professionnel sera étendue à quatre ans, au lieu de trois actuellement.
  • Une rémunération minimum au smic sera garantie aux alternant·e·s.
  • Un revenu, fixé à 850 euros par mois, pour tous les étudiants et toutes les étudiantes, sera mis en place.
  • Déconstruire les stéréotypes de genre, les représentations et l’orientation genrées des métiers.

 

  1. Zéro jeune au chômage

  • Il sera mis un terme aux contrats précaires afin d’en finir avec la surexploitation des jeunes et des femmes.
  • Un plan de lutte contre les discriminations à l’embauche et au logement sera élaboré.
  • Le nouveau service public de l’emploi et de la formation proposera à chaque jeune éloigné·e du travail une formation qualifiante rémunérée.
  • Un plan pluriannuel d’embauches dans la fonction publique sera mis en œuvre.
  • L’ensemble des aides publiques aux entreprises sera conditionné à l’embauche de jeunes en contrat à durée indéterminée (CDI) et à la formation professionnelle.

 

  1. Un statut social pour les jeunes

  • Un droit au logement sera rendu effectif, avec la construction de logements Crous destinés aux étudiant·e·s.
  • Le droit à la mobilité deviendra effectif, afin de faciliter l’accès à la formation, à l’em- ploi et aux loisirs.
  • Les pratiques sportives et culturelles des jeunes seront développées.
  • Des maisons de la jeunesse seront créées dans les communes, sous l’égide du ministère de la Jeunesse.

 

 
« Le bonheur est une idée neuve en Europe. » Saint-Just (révolutionnaire français, 1767-1794)