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Patrice Carvalho : hommage à Maurice Leprêtre - Thourotte, 15 janvier 2016

Dicours prononcé par Patrice Carvalho à l'occasion des obsèques de Maurice Leprêtre le 15 janvier 2016 à Thourotte

 

Hommage à Maurice Leprêtre

Roger vient de retracer, à grands traits, le parcours de Maurice.

Comme beaucoup d’entre vous, présents ce matin, je perds un ami, un camarade de combat, un être cher, un homme de bien.

Toutes celles et tous ceux qui l’ont côtoyé se souviendront de lui, comme d’une personnalité discrète, peu soucieuse de se mettre en valeur, plus à l’aise dans l’ombre que dans la lumière, mais toujours au service des autres. 

Maurice rassemblait deux qualités humaines essentielles : l’humilité et la détermination.

Elles ne sont pas contradictoires. Maurice a su les conjuguer et nous transmettre une leçon de vie.

L’humilité, sans doute a-t-il commencé à l’acquérir à Thourotte, en 1942, quand les Allemands chassent sa famille du Havre.

Il faut alors s’installer dans une ville inconnue, sans lien avec ses habitants, à la ferme de Chantereine, un endroit qui n’était pas des plus accueillants.

Pourtant, Maurice grandira ici, s’y intégrera. Il bâtira sa maison de ses propres mains et je me rappelle avoir pu compter sur lui lorsque j’ai engagé des travaux dans la mienne, car la solidarité, Maurice connaissait et pratiquait.

Il aurait sans doute fait un élu de qualité au service des Thourottois. Il a pourtant toujours refusé d’être candidat à quelque élection que se fût.

Humilité encore ! Humilité toujours !

Ce n’était, bien sûr, pas de l’indifférence, car il était présent et actif dans la vie de la cité et au service des autres, mais à sa place de simple citoyen.

Humilité, certes, mais détermination. Fermeté sur les convictions et les engagements.

En 1951, il entre chez Chantereine et y fera toute sa carrière jusqu’à la retraite.

Il sera un militant syndical, puis politique actif.

En 1968, c’est lui qui ira planter le drapeau rouge sur la cheminée de Saint-Gobain au terme d’une longue occupation de l’usine.

Cet engagement, il l’avait en commun avec son frère Marcel, disparu en 1974, qui fut, lui aussi, un militant syndical, secrétaire général du comité d’entreprise et le premier, au cours d’une grève, à avoir coupé la feuille de verre et ainsi interrompu la production.

Maurice fut de toutes les mobilisations, présents durant les piquets de grève, mais aussi toutes les campagnes électorales dans les tâches les plus besogneuses : la distribution de tracts dans les boites aux lettres, à la porte des entreprises ou sur les marchés et le collage des affiches.

Il me revient avec Maurice bien des souvenirs d’enfance. Nous étions une famille nombreuse aux revenus modestes. Les fins de mois étaient difficiles et mes parents évitaient les dépenses.

Aussi Maurice et son épouse, Manuela, nous tricotaient des pulls. Manuela était en charge de la confection des manches, Maurice du reste.

Je me souviens d’un col roulé anthracite que j’aimais beaucoup et que je ne quittais pas.

Mais à sa livraison, il fallait attendre car Manuela fumait et la laine était empreinte de l’odeur de la fumée.

Il fallait donc patienter avant de pouvoir s’en vêtir, le temps de l’imprégnation se dissipe.

Autant de flashs qui me viennent en mémoire et qui illustrent ses liens qui se créent, d’autant plus forts et authentiques, que Maurice incarnait cette force et cette authenticité.

L’humour, fut aussi un autre trait de la personnalité de Maurice, dans une proximité avec son humilité.

L’humour, c’est un moyen de prendre ses distances avec le réel, de se distancier, de dédramatiser, de privilégier le sang froid sur l’emportement et l’excès.

Maurice aura donc été cet homme attachant, qui vous donne une idée des rapports humains apaisés mais riches, l’envie d’une société plus juste, plus solidaire, plus fraternelle.

Maurice était un lecteur assidu de l’Humanité.

Il me disait souvent que le premier article qu’il lisait à la Une du journal, c’était le billet d’André Wurmser, journaliste et écrivain, qui écrira ces billets célèbres entre 1954 et 1984 et qui s’intitulaient : « Mais… », comme une objection à l’actualité et surtout à la pensée dominante.

 Maurice partageait sans doute l’humour d’André Wurmser, qui écrira, alors que sa fin était proche : « mourir, c’est la dernière chose à faire. »

Oui, Maurice, c’est bien la dernière chose à faire. Mais tu auras tellement bien fait tout ce qui aura précédé.

Merci, Maurice, pour la leçon de vie.

Nous ne l’oublierons pas. Nous ne t’oublierons pas.

À ton fils, à tes petits enfants et arrière-petites enfants, à ta sœur, à toute ta famille, je présente mes plus sincères condoléances.

 

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« Le bonheur est une idée neuve en Europe. » Saint-Just (révolutionnaire français, 1767-1794)