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Intervention d'Hélène Balitout lors du Débat d'orientation budgétaire (DOB) - Conseil départemental de l'Oise, 17 décembre 2015

 

Monsieur le Président, mes chers collègues, Mesdames et Messieurs,

Avant d'intervenir très directement sur les sujets propres à l'assemblée départementale aujourd'hui, je souhaite dire un mot du contexte électoral, démocratique et politique de ces derniers jours.

Les citoyens et la population française comme nous l'avons vu lors des élections régionales abandonnent massivement le vote. C'est le cas notamment des classes populaires, des jeunes et des électeurs traditionnels de la gauche, hélas.

Cette abstention conduit à une concentration importante des voix du Front national, dont l'électorat se mobilise fortement. La situation est critique et bouleverse le paysage politique, même si les leviers démocratiques et politiques sont encore assez importants pour empêcher la victoire du Front national au deuxième tour.

De mon point de vue, après les résultats des Européennes, des Départementales et des Régionales, rien ne pourra plus être comme avant. Les formes d'engagements, les débats politiques, le rapport aux citoyens et aux populations, tout doit conduire au changement et à l'innovation.

Je souhaite à cet égard remettre quand même quelques pendules à l'heure, et rappeler les causes profondes de la crise politique et démocratique qui ne cesse d'exploser.

Je suis en colère. Je suis en colère pour toutes les raisons qui font que les citoyens se détournent de la citoyenneté.

Cette colère, elle est dirigée contre les gouvernements qui se succèdent pour garantir la continuité de l'austérité et contre les promesses de changement non tenues et même honteusement trahies par François Hollande. Elle est dirigée contre les puissances bancaires et financières qui étouffent l'activité économique. Elle est dirigée contre ce gouvernement qui continue d'appliquer l’asphyxie budgétaire mortifère alors que le pays compte plus de 5 millions de chômeurs, plus de 2 millions de bénéficiaires du RSA, que le chômage et la précarité tuent chaque année 14 000 personnes et que plus de 3 millions de personnes souffrent du mal logement.

À vous qui par votre adhésion, votre soutien à des gouvernements dont les politiques ont abouti à un tel résultat, je souhaite dire : ça suffit ! Du fond du cœur, ça suffit ! Les citoyens français en bavent au quotidien comme jamais.

C'est pour ces raisons que nous sommes des adversaires résolus de l'austérité. Imposée de Paris, imposée de Bruxelles. Ce dogme est une folie furieuse qui plonge notre pays et l’Europe dans une situation sociale, politique, démocratique et économique intenable.

Le rapport que l'assemblée départementale examine aujourd'hui porte dans ses aspirations la trace de ce dogme : il faudrait sabrer dans les rémunérations des agents, réduire leurs effectifs, diminuer les dispositifs sociaux. C'est pourtant l'évidence à en crever les yeux que cette politique ne produit que du malheur. Le service public est diminué, l'emploi public est menacé alors que tant de nos concitoyens en sont privés et les possibilités de l'activité sont entravés générant des pertes d'emplois et un chômage aggravé.

Les syndicats vous ont d'ailleurs alerté, et vous alerte encore sur ses conséquences inquiétantes. La force de leur mobilisation très suivie dans les services oblige toute l'assemblée à la prendre en compte. Les agents connaissent mieux que nous la collectivité. Ils y sont souvent présents depuis bien plus longtemps que nous, au quotidien. Ils ont le droit au respect et leurs attentes doivent être entendues.

J'en profite d'ailleurs pour exprimer mon soutien aux organisations syndicales dans les combats qu'elles mènent contre l'austérité et ses conséquences concrètes sur le service public. En respectant leur liberté et leur totale indépendance qui n'est plus à prouver, notre groupe leur redit sa solidarité.

Le dogme de l'austérité, qu'elle soit locale ou nationale diffuse dans l'ensemble de la société ses modes et ses outils. Il a son jargon, ses bons apôtres et ses consultants en tous genres. Nous sommes la seule force politique qui refuse cette logique là. Nos parlementaires votent contre les lois d'austérité nationalement, et nous les combattons localement. Notre voix est originale et unique, y compris dans cette assemblée.

Elle est également unique sur l'organisation territoriale, nous qui condamnons le puzzle auquel s'est livré le gouvernement, cassant les communes, cassant les départements pour élargir sans cesse les territoires, pour éloigner sans cesse les centre de décision. Des décisions qui ne sont plus prises là où elles s'appliquent, des décisions hors sol, dans des régions Frankenstein, dans des intercommunalités forcées et illogiques.

Cette bataille contre l'austérité, ce combat contre la loi NOTRe, les élus communistes et républicains les ont menés avec sincérité, cohérence et détermination. Cette gestion contrainte des départements au plan des compétences et des finances nous l'avons toujours combattue. C'est pourquoi nous nous sentons libres aujourd'hui de nous opposer aux mesures d'austérité proposées, qu'elles touchent les agents, les associations ou les familles.

Le choix entre augmenter les impôts et réduire les interventions est la conséquence des politiques menées, entre autres, sous Nicolas Sarkozy et sous l'actuel gouvernement. Nous n'en sommes ni comptables, ni responsables, et si la gestion du département est diablement difficile au plan budgétaire il faut vous en prendre aux politiques nationales que vous avez soutenues de 2007 à 2012 pour les uns et de 2012 à aujourd'hui pour les autres.

Sur le fond du rapport et sur les orientations proposées, on ne constate pas d'ambitions particulières pour l'avenir ni de politiques fondamentales nouvelles. Des retraits et des abandons oui, mais aucune politique structurante nouvelle pour le territoire. Le soutien au Canal Seine-Nord est poursuivi, de même que la politique d'équipement du Très Haut Débit.

À ce stade, seules les caméras de surveillance et les armes aux polices municipales dont personne ne veut, même pas Caroline Cayeux, sont à mettre au compte de votre gestion. Il y a aussi la lutte contre la fraude au RSA. Aujourd'hui pourtant le problème des départements ce n'est pas la fraude au RSA, ni les caméras et les armes, ce sont les fermetures d'entreprises et de services publics qui augmentent le chômage et renforcent la désertification.

Il est fondamental à cet égard de proposer une gestion départementale qui passe par le renforcement des services publics, l'augmentation de l'aide aux populations, notamment âgées et dépendantes. C'est ce que nous avions demandé dès l'installation de la nouvelle assemblée, avec l'objectif de convaincre.

Le 20 avril, nous avions demandé à ce qu'une enveloppe conséquente soit débloquée pour accompagner les maisons médicales de santé pluridisciplinaires et les EHPAD publics, notamment dans les cantons ruraux. Nous avions sollicité le traçage de zones par ordre de priorité en fonction de la démographie médicale, des revenus de la population et du taux de chômage de la population.

Nous pensions particulièrement à l’accueil des personnes âgées dépendantes à la nécessaire augmentation des places en maison de retraite, et à l’augmentation des moyens consacrés à l’aide à domicile pour laquelle nous pensons toujours utile de construire un service public départemental d’aide à la personne. Politiques sur lesquelles nous attendons des financements et des mesures concrètes.

Nous avions déclaré priorité numéro une la réponse au fléau de la désertification médicale et exigé une mise en commun des efforts du Conseil départemental, de l’intercommunalité, de l’ARS et des communes, pour élaborer des réponses incitatives à l’installation des jeunes médecins.

Voilà les priorités politiques et budgétaires que nous avions proposées, entre autres urgences.

Je n'oublie pas, car nous sommes de bonne foi, notre exigence d'une enveloppe spécifique pour répondre au difficile renouvellement des infrastructures d’assainissements auquel vont être confrontés les petites communes.

Oui, sur ce point, nous avons réussi à convaincre l'assemblée et nous pouvons nous en satisfaire, nous avons été entendus, il faut le reconnaître honnêtement. Il reste toutefois que des situations restent problématiques, et il faudra sortir des syndicats d'assainissement d'une immense panade financière comme mon collègue Sébastien Nancel en avait fait la démonstration.

Il reste aussi que les communes et les maires vont tôt ou tard ressentir les effets de l'austérité engagée par le département. Vers qui les associations privées de subventions vont-elles se tourner ? Le Maire. Vers qui les agents publics privés de leur emploi vont-ils se tourner ? Le Maire. Vers qui les citoyens excédés par l'état des routes vont-ils se tourner ? Le Maire. Vers qui les usagers dans l’impossibilité de payer une facture d’électricité vont-ils se tourner ? Le Maire. Les maires seront en première ligne de l'austérité. De manière de plus en plus concrète.

C'est pourquoi nous n'acceptons pas la baisse du FDSL, ni la réduction des crédits réservés aux tutelles, ni le déclassement à la charge des communes de routes départementales, ni la réduction de l'aide aux regroupements scolaires intercommunaux, notamment.

Voilà un bien sombre et triste tableau d'ensemble.

Tout n'est pas perdu bien entendu, et nous pouvons sortir par le haut de la crise politique et démocratique dans laquelle on nous a plongé.

Depuis 30 ans l'ascension du Front national a été favorisée, sinon produite, par les renoncements et les compromissions d'une droite qui s’extrémise et d'un PS qui se droitise, délaissant tous les deux les classes populaires.

La lutte contre le FN commence ici, par les décisions que nous prenons, par nos votes.

Les élus communistes et républicains en ont bien conscience et vont faire entendre, encore et encore, un autre son de cloche que l'austérité dans cette assemblée et parmi nos concitoyens.

Merci.

 

 
« Le bonheur est une idée neuve en Europe. » Saint-Just (révolutionnaire français, 1767-1794)