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20150511-L'Huma-Bernard Lamirand « Sécurité sociale : la lutte continue ! »

Lien vers l'article de L'Humanité du 11 mai 2015 • « Sécurité sociale : la lutte continue ! »

 

À l'occasion des 70 ans de la sécurité sociale, une tribune de Bernard Lamirand, animateur du comité d’honneur national Ambroise Croizat.

Depuis soixante-dix ans, la sécurité sociale fait partie de notre vie de citoyen. Elle fait aujourd’hui partie de notre identité, ce fut longtemps un modèle pour les gouvernements progressistes de la planète. C’est en effet, un enjeu de société et son devenir définira le monde dans lequel nous vivrons demain : société de partage et de solidarité ou société de plus inégalitaire. Depuis sa création, elle a toujours été la cible des attaques patronales.

De tout temps les hommes ont cherché à se prémunir contre les maladies, les épidémies…

La charité, l’entraide, le secours, la bienfaisance furent les premiers moyens pour se soigner.

Ce besoin de sécurité sociale va s’exprimer de plus en plus avec la révolution industrielle.

La mutualité et les caisse de secours seront les premières formes d’une organisation collective de la santé . L’invention d’un système de solidarité va naitre face aux maladies professionnelles et les accidents du travail et les déplorables conditions de travail.

Le patronat voit le danger de ce monde du travail qui s’organise.

Le paternalisme social va se développer et tenter de contrer le syndicalisme naissant : caisses d’entraide, cercles d’entreprise, dames patronnesses se mettent en place. En France, le maitre des forges Schneider, au Creusot, à la fin du XIXe siècle, organisera son entreprise sous la providence patronale. On nait, on travaille, on meurt avec Schneider.

L’ État sera obligé de légiférer, en 1898, avec une loi qui fera obligation aux entreprises de prendre en charge, par des assurances privées, les accidents du travail. Les compagnies d’assurance feront leur beurre avec cette loi qui ne reconnaitra pas la l’invalidité, les durées d’hospitalisation ou d’arrêt de travail.

La naissance de la Sécurité sociale

C’est en Allemagne, au XIXe siècle, que le chancelier Bismarck, pressés par la montée des idées sociales institue dan son pays un système d’assurances sociales collectif.

D’autres projets naitront par la suite, ils s’inspireront de l’exemple allemand. Ainsi, le New-deal aux Etats-Unis, inscrira, dans les années 1930, l’intervention de l’état concernant la protection sociale qui sera mise à mal sous les années Reagan.

L’avancée vers une sécurité sociale moderne viendra d’un Anglais William Beveridge qui appellera à constituer l’universalité de la sécurité sociale. Pour lui toute la population doit être concernée. Il considère l’indigence comme un scandale dans les sociétés modernes. Il proposera donc de l’éliminer en constituant des prestations contre les différents risques. Le rapport Beveridge va influencer toutes les constructions de sécurité sociale dont celle de la France à la libération.

En France, la Sécurité sociale vient à maturité avec la libération du pays en 1945. Avec une CGT comptant 5 millions d’adhérents et un parti communiste recueillant plus de 28 % des suffrages, le rapport des forces est du coté des salariés plutôt que du patronat qui s’était rangé du coté de la collaboration vichyste.

Le Conseil National de la Résistance sera le grand inspirateur d’un plan de sécurité sociale qui allait ainsi naitre dès la Libération. Sous l’exigence de dirigeants CGT de l’époque, en particulier Ambroise Croizat,  Georges Buisson et Henri Raynaud, une première ordonnance met en place le 4 octobre 1945 le régime général de la Sécurité sociale. Puis, c’est Ambroise Croizat, ministre communiste et secrétaire général de la Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT qui sera le véritable artisan politique de sa mise en place, de son fonctionnement, de son organisation démocratique. l’acte qui l’inscrit définitivement dans la loi portant généralisation de la Sécurité sociale fut votée à l’Assemblée nationale constituante le 22 mai 1946. Dans des délais extrêmement court, dans un pays ravagé par la guerre, Croizat entouré de militants et de Pierre Laroque, haut fonctionnaire et membre du conseil d’état, vont se dépenser sans compter pour construire l’assurance maladie mais aussi la retraite et les allocations familiales. Dès sa mise en place, elle est attaquée notamment par les professions agricoles, commerçants, artisans, professions libérales et ils firent en sorte, après le départ des ministres communistes du gouvernement en 1947, d’empêcher toute application concrètes de cette universalisation. Mais la Sécurité sociale était sur pied dirigée et gérée par les travailleurs et leurs organisations syndicales. Des élections démocratiques furent imposées.

Le patronat, la droite, n’ont jamais digéré cette grande conquête sociale. Ils se sont alors attachés à la dénigrer pour la déconstruire. Ce travail ne fut pas simple. La Sécurité sociale faisait la preuve de sa  supériorité sur les assurance privées dans tous les domaines.

Cette volonté patronale et de la droite de remettre en cause la Sécurité sociale, en particulier l’assurance maladie, vint dès le retour de De Gaulle au pouvoir en 1958.Cette détermination s’exerce particulièrement concernant le financement par la cotisation que ne veut plus supporter le patronat.

En 1965, un véritable catalogue d’exigences patronales est dressé par le CNPF.

Les ordonnances de 1967, dénoncées par le CGT, vont effectuer un véritable transfert des responsabilités puisque, dès lors, c’est le patronat qui va peser sur la Sécurité sociale dans son ensemble.         

L’enjeu de la cotisation sociale

Les difficultés de la protection sociale sont liées fondamentalement à la faiblesse du taux d’emploi et à l’abaissement du niveau des salaires qui vont se manifester encore plus fortement depuis les années 2000. En effet, la partie cotisation va au port commun de la Sécurité sociale, c’est le salaire socialisé. Ces fonds remplissent immédiatement leur rôle de solidarité et répartition. La baisse des cotisation dites patronales comme la baisse des salaires, c’est moins d’argent dans les caisses de la Sécurité sociale et donc plus de profit pour les actionnaires et moins de protection sociale pour les salariés et les retraités.

Pourtant les  besoins grandissent avec l’allongement de la durée de la vie qui ne doit pas être considéré comme une charge mais comme un progrès de société. La prise en charge du handicap, de la dépendance, du vieillissement conduit à revoir l’organisation du système de santé mais cela nécessite de rompre avec des logiques purement financières qui créent des inégalités criantes. L’offensive actuelle pour sélectionner les risques à la charge de la Sécurité sociale est donc grave pour la population. Cette démarche vise essentiellement à faire de la Sécurité sociale un service minimum.

Il est évident que « la sécu » de 1945 a évolué, le droit à la santé est une exigence qui se développe avec les progrès de la médecine et avec l’allongement de la duré de la vie. Une part plus grand du PIB  doit être consacré à la santé, les ressources financières doivent être dégagées à cet effet. Il faut poursuivre le principe de la cotisation des salariés et accroître celui  de l’entreprise.

Il faut donc prendre plus sur la valeur ajoutée (richesses créées par le travail) et intégrer dans l’assiette des  cotisations sociales les revenus financiers des entreprises et des institutions financières qui ne sont assujetties à aucune cotisation sociale.

Redresser « la sécu » ce n’est pas l’enfoncer en réduisant ses ressources, en élaguant des risques, en deremboursant, mais bien en incitant les entreprises à créer des emplois qualifiés et en augmentant les salaires.

Le débat, l’action unie et large, pour un haut niveau de santé est le prix à payer pour ne pas voir disparaitre notre  Sécurité sociale.

Ambroise Croizat  fut ce ministre qui, incontestablement, mis en œuvre le programme du Conseil National de la Résistance qui précisait la nécessité d’un plan complet de Sécurité sociale.

Le 70e anniversaire de la création de la Sécurité sociale devrait  être célébrer comme il se doit, en cette année 2015 pour tous les travailleurs et retraités de France.

Plus que jamais les luttes sont nécessaires pour redonner toute sa vigueur et des valeurs solidaires à notre Sécurité sociale.

 

Bernard Lamirand, animateur du comité d’honneur national Ambroise Croizat

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