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Hommage de Thierry Aury à Chantal Leblanc - Abbeville, 5 mai 2015

 

Hommage de Thierry Aury, secrétaire régional du PCF Picardie

 

Cher Claude, Chère Haydée, Chère Muriel, et toute la famille,

Chers amis, chers camarades,

Merci de me donner l’occasion à mon tour, de dire combien Chantal Leblanc, a compté dans notre vie, dans nos luttes, dans nos espoirs d’un monde et d’une société meilleurs !

Et je voudrais apporter ici le témoignage de la sympathie de tous les communistes de Picardie et plus largement de ceux de France au nom de Pierre Laurent qui ne pouvait être parmi nous aujourd’hui mais partage notre tristesse à tous.

Nous venons d’entendre « le Chiffon rouge » chanson créée en 1977 par Michel Fugain et qui a ponctué depuis tant de nos rassemblements, de nos manifestations, devenu un véritable hymne des Jeunesses communistes et plus largement de toutes les luttes sociales, une chanson dont les paroles symbolisent si bien des traits essentiels du parcours de Chantal : 

 

Si tu veux vraiment que ça change et que ça bouge, lève-toi il est temps 

Car le monde sera ce que tu le feras, plein d’amour, de justice et de joie.

 

Chantal s’était levée il y a bien longtemps déjà, dès sa jeunesse, et est restée jusqu’à ses derniers jours, une femme debout, une femme qui avait pris sa vie en mains et appelait toutes ses sœurs et tous ses frères humains à en faire autant. Elle semblait mettre en œuvre ces vers d’Eluard : 

 

Nous fuirons le repos nous fuirons le sommeil

Nous prendrons de vitesse l’aube et le printemps

Et nous préparerons des jours et des saisons

À la mesure de nos rêves.

 

J’avais 17 ans et j’étais étudiant à Amiens quand Chantal a été élue députée et l’image de cette femme, jeune, combative, bousculant tous les conformismes, y compris en voulant rentrer en jean à l’Assemblée Nationale, de cette militante accédant aux plus hautes responsabilités tout en restant simple et accessible à tous, était enthousiasmante, pour les jeunes communistes que nous étions.

Et il est finalement assez incroyable qu’après tant d’années, ce soit cette image qui soit restée dans tant de têtes car Chantal était demeurée cette jeune femme, chaleureuse, d’une modestie formidable malgré tous les mandats et responsabilités exercés, profondément fidèle à son idéal d’un monde et d’une société débarrassée de toutes les exploitations, les oppressions, les dominations.

Alors que certains ont voulu oser cette comparaison insupportable entre les discours de l’extrême droite et les tracts du PCF des années 1970, je veux dire haut et fort que le Parti communiste des années 1970, c’était aussi des femmes, des militantes comme Chantal Leblanc, à la pointe de tous les combats pour la libération humaine et faisant entrer au Parlement la voix du peuple de cette circonscription ouvrière d’Abbeville où elle gagna au fil des années un respect unanime.

Je veux dire aussi, alors qu’une série de scandales et d’affaires éclaboussent malheureusement un certain nombre de dirigeants politiques et alimentent l’idée du « tous pourris » et pire encore l’idée qu’il n’y aurait finalement aucun engagement sincère et désintéressé dans la vie politique mais aussi syndicale et associative, que nous devons, nous devrons tous conserver précieusement et faire connaitre l’image et l’exemple de Chantal, cette femme intègre, droite, honnête et franche, qui rendait au mot « politique », toutes ses lettres de noblesse et surtout son sens profond, de l’action pour l’intérêt commun, pour l’amélioration de la vie de la cité humaine.

Mais, et c’est  certainement une grande leçon à retenir, Chantal ne s’est jamais considérée « au-dessus des autres », « différente des autres » mais est toujours demeurée au milieu des autres.

Et quand aux Législatives de 1981, malgré un très beau résultat, en progrès sur 1978, elle fut devancée - petite ingratitude de l’histoire pour celle qui avait tant œuvrée au changement - c’est naturellement qu’elle avait repris son travail de psychologue, devant même travailler plus loin de chez elle qu’auparavant puisqu’on ne lui avait pas réattribué – mesquine revanche - son poste antérieur !

Oui, c’est vraiment un bonheur d’avoir pu côtoyer Chantal et d’avoir fait des bouts de chemin militants avec elle, tant elle représentait le meilleur de ce que nous attendons d’un élu, d’un responsable, d’un militant.

Ce meilleur, c’était aussi ce rapport simple avec les autres : Chantal, c’était toujours, dans le débat public comme dans les réunions internes du Parti, le parler-vrai, direct, sans détours, ni arrière-pensées, mais jamais non plus de manière tonitruante, jamais « béni oui-oui » mais faisant toujours appel à l’intelligence et à la réflexion, et à tout ce qui pouvait faire progresser le débat collectif, avec comme seul objectif, l’intérêt général. 

J’avais toujours plaisir à la rencontrer, à échanger avec elle et beaucoup de souvenirs me reviennent : comme en 2010 lors de cette campagne - pas simple ! - des Régionales où je conduisais la liste du Front de gauche en Picardie. Il faisait froid, il pleuvait mais Chantal m’avait accueilli les bras ouverts, avec son formidable sourire et sa chaleur humaine, et nous étions allés aux portes des entreprises et des supermarchés, où elle m’avait présenté à celles et ceux très nombreux qu’elle connaissait.

Cet engagement permanent aux côtés des autres, et sur toutes les causes qui lui semblaient la peine d’être défendues, ce fut aussi sa participation active à l’action contre ce projet des « 1000 vaches » où, avec Michel Guillochon et d’autres, elle perçut rapidement combien il symbolisait un monde où la folie de la recherche de la rentabilité financière à n’importe quel prix, transformait les fermes en usine et les vaches en machines à produire de la merde !

Elle avait contribué à l’engagement de tout le PCF, de ses parlementaires, du journal l’Humanité sur cette question - et nous étions retrouvés encore il y a quelques mois, à Amiens, pour soutenir les militants de la Confédération Paysanne, injustement poursuivis pour leur opposition à ce projet, et je sais qu’elle sera avec nous le 17 juin prochain, à Amiens, pour les soutenir encore. 

Comme elle sera avec nous, dans tous les combats que nous allons continuer de mener, pour faire vivre ce beau mot d’ordre qu’on aurait cru écrit pour elle : « l’humain d’abord », pour la dignité et l’épanouissement de chaque être humain, ici et sur toute la planète, pour construire ce « monde plein d’amour, de justice et de joie » auquel, comme Chantal nous aspirons toutes et tous. 

Et pour conclure, je voudrais vous lire ces quelques vers du dirigeant communiste vietnamien Ho Chi Minh, héros de l’indépendance de son pays, mais lui aussi à la modestie et la simplicité légendaire.

Et ce sera aussi un clin d’œil à ce combat contre la guerre au Vietnam par lequel Chantal, avec Claude, vint au communisme :

 

La borne kilométrique

Rien de grand, d’extraordinaire,

D’impérial ou de princier :

Rien qu’un modeste bloc de pierre

Au bord de la chaussée.

Les gens te demandent la route

Pour ne pas s’égarer,

Tu montres à chacun la route,

La longueur du trajet.

Ce n’est pas rien, petite pierre !

Nul ne pourra t’oublier.

 
« Le bonheur est une idée neuve en Europe. » Saint-Just (révolutionnaire français, 1767-1794)