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Les rapports du syndicalisme à la politique - Nogent-sur-Oise, 28 novembre 2014

 
 

Espace Marx60 - Bernard de La Sala a conclu le cycle des conférences-débats de l'année 2014 par une nouvelle formule, avec deux intervenants au lieu d'un seul. Le thème abordé s'y prêtait particulièrement : les rapports du syndicalisme à la politique.

Ce sont ainsi

  • un militant syndical : Philippe Martinez, secrétaire général de la fédération CGT Métallurgie
  • et un militant politique : Thierry Aury, secrétaire départemental de la fédération de l'Oise du PCF

qui ont débattu à l'invitation d'Espace Marx60 le vendredi 28 novembre 2014 à Nogent-sur-Oise.

Sur cette page internet, vous sont présentés photos, vidéos, compte-rendu succinct de cette rencontre interrogeant deux champs du militantisme, ainsi que des documents associés.

 

Conférence-débat

 

 

Histoire des rapports entre syndicats et partis politiques, en France et dan​s le monde

Vidéo 2 : Philippe Martinez (CGT)

Vidéo 3 : Thierry Aury (PCF)

Vidéo 4 : réactions de Philippe Martinez et Thierry Aury suite aux interventions de l'assistance

 

Philippe Martinez « La CGT, le syndicat le plus indépendant au monde »

La différence essentielle, selon Philippe, entre les syndicats de l'Europe du Nord et la CGT en France est leur rapport aux partis politiques. En Europe du Nord, les syndicats sont nés avant les partis politiques et créent, pour que les luttes sociales aient des débouchés en tant qu'alternatives politiques à celles menées par les libéraux, leur parti politique. Ainsi du Parti travailliste en Angleterre ou du SPD en Allemagne. Il n'est pas rare de voir un dirigeant syndical devenir le président du parti ou accéder à des responsabilités au niveau gouvernemental, comme l'actuel Premier Ministre en Suède, Stefan Löfven.

En France, la Confédération Générale du Travail (CGT), syndicat historique dont a va fêter les 120 ans en 2015, succède aux premiers syndicats corporatistes professionnels. Avec la révolution d'Octobre et la conception de Lénine (le syndicat subordoné au parti), les débats au sein de la CGT entre les réformistes et les révolutionnaires sont vifs et la CGT se scinde avec la création de la CGTU qui s'affilie à l'Internationale syndicale rouge. Les autres syndicats français naissent bien après dans le XXe siècle : la diversité syndicale n'est pas absente des autres pays, se vivant au sein du syndicat lui-même, à l'exemple IG Metal.

Pour Philippe, « la CGT est le syndicat le plus indépendant du monde ». On ne verra pas un membre du gouvernement au Congrès de la CGT en 2015 à l'occasion de ses 120 ans. Depuis les années 1990, avec les départs de Louis Viannet et de Bernard Thibault des instances du PCF, elle a également coupé un lien avec cette organisation à l'histoire complémentaire. Ainsi d'Ambroise Croizat, syndicaliste CGT, communiste et qui participera en tant que ministre à la mise en place du programme du Conseil national de la Résistance « Les jours heureux » avec la naissance de la Sécurité sociale.

 

Thierry Aury « La CGT et le PCF, des objectifs communs »

Thierry note tout d'abord, à la lecture des préambules des statuts de la CGT et du PCF, les similarités entre les deux textes, qui présentent des objectifs communs de transformation de la société.

L'histoire entre les syndicats et les partis politiques est en fait l'histoire de ces 150 dernières années, avec une coupure en 1914 et la Première Guerre mondiale. En 1864, le droit de grève est instauré par la loi Ollivier, un appel pour des candidatures ouvrières à l'élection complémentaire de février (Manifeste des soixante) est rédigé et se tient le congrès constitutif de la Ire Internationale.

Le poids de la Révolution française est présent dans notre pays, avec des couches populaires qui s'expriment tout au long du XIXe siècle. La République qui s'impose est défendue avec plus ou moins de méfiance par le mouvement ouvrier, la bourgeoisie et ses formes politiques s'en parant au détriment des droits sociaux. Pour Jules Guesdes qui crée en 1879 le Parti ouvrier français, le politique doit primer.

En 1917, avec la Révolution d'Octobre, un grand espoir naît. Lénine a des liens avec les syndicalistes révolutionnaires en France. La CGT sera constitutive du rassemblement populaire de 1936, inspirant le programme alors réalisé suite aux grèves et à la victoire politique. Elle sera aussi présente en 1945 dans le Conseil national de la Résistance.

 

Réactions aux interventions de l'assistance

Philippe présente la diversité du syndicalisme, qui n'est pas une forme homogène, même au sein de la CGT. Ainsi des périodes historiques que sont la Première Guerre mondiale et la Révolution d'Octobre, 1936 ou la Seconde Guerre mondiale qui ont permis l'expression de cette diversité. Il nous entraîne ensuite en Espagne où les syndicats bénéficient aujourd'hui de droits alors donnés au seul syndicat autorisé sous la dictature de Franco.

Thierry indique que le PCF est présent dans les luttes quotidiennes, immédiates et ne se projette pas seulement dans un avenir lointain.

 

La charte d'Amiens

Peut-on être syndicaliste et membre d'un parti politique (et inversement) ?

Vidéo 5 : Thierry Aury (PCF)

Vidéo 6 : Philippe Martinez (CGT)

 

Thierry Aury « Les syndicaliste communistes plutôt dans l'unité »

Le Congrès de la CGT de 1906 se tient à Amiens, soit un an après la création de la SFIO qui regroupe les différentes organisations politiques socialistes. Dans le contexte, les congressistes interrogent le rapport de la CGT aux partis politiques et adoptent, en fin de congrès, un texte court nommé depuis « La charte d'Amiens ». Depuis, tous les syndicats s'y réfèrent. La CGTU fait ainsi modifier les statuts de l'Internationale syndicale rouge (ISR) dans le sens d'une autonomie par rapport à l'Internationale communiste, condition de son adhésion. En France, il n'y a pas de lien organique entre partis politiques et syndicats, ce qui n'empêche pas les relations entre eux.

Pour Thierry, les syndicalistes communistes ont dû faire face à des positions politiques anti-communistes à plusieurs reprises dans la CGT : création « forcée » de la CGTU, exclusion de dirigeants communistes en 1939, formation de Force ouvrière… alors qu'ils étaient généralement dans une démarche unitaire.

 

Philippe Martinez « Faire de la politique, mais pas au service d'un parti politique »

Le problème de la charte d'Amiens, c'est que chacun l'interprète à sa façon, met en avant la partie qui l'arrange.

Philippe dit qu'un syndicaliste doit faire de la politique et il regrette que les militants syndicaux de la CGT, dans leur majorité aujourd'hui, aient la même vision dévaluée de la politique que la société française dans son ensemble. Un syndicat doit inspirer des lois, mais il n'a pas vocation à gouverner un pays. Pour changer la société, il faut mener la lutte des classes, il faut affronter. Il cite une période où, à Renault-Billancourt, il y avait 20 000 syndiqués CGT et 7 000 adhérents PCF… Un syndicaliste CGT peut être membre de n'importe quel parti, à l'exclusion du Front national : « La CGT défend des valeurs intangibles sur lesquelles on ne discute pas. »

 

Quels rapports entre le PCF et les syndicats, dont la CGT, notamment dans la crise actuelle ?

Vidéo 7 : Thierry Aury (PCF)

Vidéo 8 : Philippe Martinez (CGT)

Vidéo 9 : interventions de Bernard Lamirand (président d'Espace Marx60, militant syndical et politique) et de Viviane Claux (membre du Conseil national du PCF, militante syndicale)

 

Thierry Aury

« Historiquement, la présence du PCF a-t-elle été un obstacle au développement de la CGT ? »

Depuis 25 ans, avec la crise, les expériences de la gauche au pouvoir, la chute de l'URSS, le PCF et toutes les forces de transformation de la société sont à la recherche de nouvelles perspectives. La CGT a ainsi pris ses distances avec le PCF, à une période où le Parti s'interrogeait sur son devenir. Pour Thierry, la CGT a eu l'illusion que couper les ponts avec le PCF serait une solution : en quoi la présence du PCF, gnéralement rassembleur, a-t-elle été un obstacle au développement de la CGT, sur le plan historique ?

Il prend l'exemple de l'Oise où le secrétaire de l'UD départemental de la CGT était ensuite élu au bureau fédéral du PCF Oise (pas l'inverse), dans un but d'enrichissement de la réflexion communiste. La réalité était donc plus complexe et contradictoire que les simplifications ne le feraient penser.

 

Philippe Martinez « Il fallait casser le lien PCF-CGT »

Il y a des problèmes spécifiques aux syndicats (rassembler le maximum de salariés, quelle que soit la conviction politique (sauf FN) ; composer avec le capital ou pas), d'autres aux politiques, et d'autres sont liés (campagne du coût du capital). Des réflexions communes sur certains sujets nourriraient les syndicats et les partis politiques : le Front national, les travailleurs détachés…

Pour Philippe, il est « clivant » pour un syndicaliste d'avoir des responsabilités politiques. Il fallait casser le relais syndical qu'était la CGT pour le PCF, à l'exemple de ce qu'écrit Roger Linet dans son ouvrage Renault 1947-1958, les années chaudes de la guerre froide. « La CGT et le PCF ont une histoire commune à assumer, pas à nier. »

 

Interventions de Brenard Lamirand et de Viviane Claux

Bernard, président d'Espace Marx60, témoigne de l'évolution d'Henri Krasucki, tandis que Viviane, nouvelle membre du Conseil national du PCF, regrette qu'il n'y ait pas plus de syndicalistes dans cette instance pour nourrir la réflexion.

 

Syndicats et partis politiques, comment travailler ensembl​e ?

Vidéo 10 : Philippe Martinez (CGT) et Thierry Aury (PCF)

Philippe souhaite des liens d'organisations à organisations, il regrette que trop souvent les interlocuteurs des syndicats soient des élus et pas les partis politiques. Il pose la question du rassemblement, pour que chacun puisse grandir : sur quoi et comment ?

Thierry pense que le travail commun peut s'effectuer sous diverses formes, de la Convention industrie de novembre dernier à laquelle invitait le PCF au collectif 3A.

 

 
« Le bonheur est une idée neuve en Europe. » Saint-Just (révolutionnaire français, 1767-1794)