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Centenaire du PCF, au jour le jour : L'Humanité du mardi 9 novembre 1920

L'Humanité, journal socialiste quotidien

À partir du site internet Gallica, de la Bibliothèque nationale de France

 

L'Humanité du mardi 9 novembre 1920

 

 

Avant le congrès

Les méfaits de la Représentation proportionnelle - par Flory

Toute organisation désireuse d'adhérer à l'internationale communiste doit régulièrement et systématiquement écarter des postes impliquant tant soit peu de responsabilité… les réformistes et les centristes et les remplacer par des communistes éprouvés…

Telle est la seconde des conditions imposées par l'Internationale communiste aux Partis qui la composent ou qui désirent se rattacher à elle.

Conformément à cette prescription, la résolution d'adhésion qui sera présentée au prochain Congrès par le Comité de la IIIe Internationale et les camarades démissionnaire du Comité de la Reconstruction, comportera la suppression de la représentation proportionnelle dans les organismes de direction et de propagande du Parti.

L'application immédiate de cette condition à la C.A.P. transformée en Comité directeur et à L’Humanité est de la plus haute importance. C'est d'elle que dépend l'action du Parti au lendemain du congrès de décembre. Si, contre notre attente, la motion du Comité de la IIIe Internationale ne groupait qu'une minorité, nous laisserions à la majorité l'entière responsabilité de la direction et de l'administration du Parti.

Il est donc indispensable que, dans toutes les sections et fédérations, les camarades sincèrement désireux de voir le socialisme français prendre sa place dans l'Internationale communiste opposent aux adversaires déclarés ou masqués de celle-ci qui s'efforceront de les troubler par de pathétiques plaidoyers en faveur de la représentation proportionnelle, leur inébranlable volonté de voter sans y rien changer la résolution du Comité de la IIIe internationale, seul texte d'adhésion véritable qui sera porté devant le congrès.

Il ne s'agit pas ici, ce qui d'ailleurs serait un droit, de s'attaquer à un principe correspondant à une conception de la justice, et que l'expérience condamne, mais à une extension de son application pratique qui en dénature la valeur et en fausse complètement les résultats.

On conçoit très bien qu'une assemblée délibérante, dans laquelle les opinions se confrontent pour l'établissement de ce qui sera la loi de la collectivité qu'elle représente, soit élue selon les règles d'une représentation proportionnelle, mais l'histoire du socialisme depuis 1914 a suffisamment prouvé qu'il est impossible d'appliquer ces règles dans la composition des organismes d'exécution. Envoyer des hommes avec mission de faire tourner dans un sens la roue du destin et les choisir de telle façon qu'un certain nombre d'entre feront tous leurs efforts pour la tourner en sens contraire est une erreur et, pour le Parti, dans les circonstances actuelles, un crime.

Sans remonter dans le passé, sans refaire l'historique des scandaleuses et stériles séances de la C.A.P. mourante, il suffit de considérer l'état présent de la crise du socialisme français, l'important et l'urgence des décisions à prendre pour sentir l'impérieuse nécessité d'une transformation profonde des statuts du Parti. Or cette transformation est incompatible avec le maintien de la représentation proportionnelle. L'Humanité administrée et rédigée à la fois par des défenseurs et des adversaires de la IIIe Internationale ne peut être un journal communiste, les premiers y seraient-ils en majorité.

Continuer, alors que le parti aura enfin défini sa politique, à faire de son organe une mosaïque d'opinions, ce serait se priver bénévolement de l'instrument de propagande le plus efficace, ce serait mener le journal à sa perte. C'est grâce à la représentation proportionnelle que le citoyen Longuet a pu, à Halle, tenir les stupéfiants propos suivants : « Je prends la parole au nom du Parti socialiste français, encore uni, et particulièrement au nom de la majorité qui se forma en 1918 contre le socialisme de guerre, majorité qui va de Pressemane et de Mistral à Loriot et Saumoneau. »

C'est la proportionnelle qui permettra s'il le veut au citoyen Longuet, devant le démenti formel que nous lui opposons, d'absorber le temps de la C.A.P. pour justifier son attitude.

Il suffit d'ailleurs à ceux qui veulent sincèrement rallier la IIIe Internationale de jeter un coup d'œil rapide sur les thèses et les conditions pour se convaincre de leur enchaînement normal, logique, inévitable. Les thèses ne saurait s'isoler des formes d'action prévues ; celles-ci dépendent étroitement de l'organisation adoptée. Si la seconde condition avait été omise par Moscou, les partis adhérents auraient été amenés à l'appliquer automatiquement devant l'impossibilité de mettre vraiment en pratique les vingt autres.

Ce n'est pas seulement sur les problèmes essentiels que s'affirmeraient au sein du Comité directeur les antagonismes irréductibles des fractions rivales. Tous les militants qui ont été investi d'une fonction savent combien il est facile à une minorité de faire obstruction au travail courant d'une assemblée permanente et les mille moyens que l'opposition peut employer pour ajourner une décision et faire échouer un projet.

L'organisation centrale du Parti est mise constamment en présence de certains faits qui, pour être parfois d'ordre secondaire, n'en ont pas moins leur importance, et qui nécessitent souvent, pour ne pas être dépassés par les événements et tomber dans l'oubli, une décision prompte. Les opposants interviennent, font des contre-propositions, prolongent le débat, énervent l'assemblée qui s'échauffe, discute et… se séparent sans avoir rien résolu.

Certes, c'est là un inconvénient dont aucune réunion n'est complètement exempte, fut-elle composée des camarades les plus unis ; mais, si le mal est inévitable, au moins devons-nous nous efforcer de le réduire au minimum.

Il faut que le chaos actuel cesse ; il faut que la politique du Parti précisée dans sa charte nouvelle et soumise dans les sections, fédérations et congrès à la libre discussion, soit dégagée dans l'exécution de l'influence de ceux qui pourraient être tentés d'y faire obstacle.

Le Parti français ne saurait consentir à être la section inactive d'une internationale d'action.

Flory.

 

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Dans les sections parisiennes

La IXe section

Pour l'adhésion sans réserves : 122 voix

Pour l'adhésion avec réserves : 7 voix

 

La Xe section

Pour l'adhésion sans réserves : 134 voix

Pour l'adhésion avec réserves : 61 voix

Contre l'adhésion : 28 voix

 

La XIe section

Après une première réunion, le 30 octobre, ou l'adhésion à la IIIe Internationale fut discutée par les camarades des diverses tendances, la section a émis dans sa réunion du 6 novembre, le vote ci-dessous, qui fut obtenu sans qu'on ait discuté les motions d'après la volonté de la majorité de la section :

Pour l'adhésion sans réserves : 246 voix

Pour l'adhésion avec réserves : 47 voix

Contre l'adhésion : 3 voix

 

La XVe section

Motion Frossard : 271 voix

Motion Longuet : 55 voix

Motion Lorris : 10 voix

Vie socialiste : 8 voix

Abstention : 1 voix

 

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Orage de rentrée [extraits]- par Marcel Cachin

Depuis plusieurs semaines, j'ai assisté à des réunions populaires fort nombreuses dans Paris et à travers la France entière ! Partout, un public de travailleurs attentifs, avides d'apprendre, écoutant avec sérieux durant des heures et sans une interruption les explications parfois ardues, qui leur sont apportées.

Hier, séance de la chambre ! Quel spectacle ! Cris, vociférations, injures, tohu-bohu, impossibilité de percevoir un argument dans le déchaînement du tumulte intense. On aurait pu se croire transporté en je ne sais quelle assemblée de délirants ou d'irresponsables.

Pour l'homme de la rue qui entre en cette maison, et assiste à un meeting de cette sorte, quelle impression d'écœurement n'en doit-il par retenir ? Est-ce là la représentation de la France ? Non, c'est seulement le Bloc National qui exerce sa dictature.

D'autres camarades ont dit leur sentiment sur le fond du débat ! Durant les rares intervalles où le chahut diminua de violence, on entendit les délégués du royalisme, de la grande Banque, des Profiteurs de la Mort, puis pour le bouquet, un Mandel qui se disputaient sans pudeur la dépouille du malheureux Poilu arraché par eux à son sommeil éternel. Ah ! s'il avait été là, le Poilu, de quel mépris n'eût-il pas été envahi à la vue de cette cohue uniquement occupée de l'exploitation politique de son sacrifice !

Marcel Cachin

 

La séance

Messieurs du Bloc sont revenus tels qu'ils étaient partis. Rassurez-vous : on ne vous les a pas changés pendant les vacances. Ils sont aussi gueulards, aussi mal embauchés ; ils ont la même haine rageuse des socialistes. Le premier, notre ami Bracke l'éprouvait hier. Et même ces bons messieurs s'étaient si bien fait la voix à couvrir la sienne, qu'après Bracke, ils donnèrent à plein gosier contre d'autres, y compris ce faquin de Mandel, jusqu'au moment où le président Péret se décida à coiffer son chapeau et à suspendre la séance.

Et pourtant, on parlait du soldat anonyme, du poilu inconnu, de son martyre, de sa gloire ! Ah !

S'il vous voyait, dit à un moment donné M. Vidal à ses collègues du Bloc, il vous dirait : « Laissez-moi donc où je suis. »

 

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La dernière goujaterie du gouvernement

Nos camarades des Jeunesses étrangères au régime politique

Le gouvernement, qui n'a pas craint d'emprisonner sans aucune raison - sinon celle, avant la rentrée des Chambres, de donner un gage nouveau à la horde du Bloc National - nos trois jeunes camarades des Jeunesses socialistes étrangères, di Marchi, Susbachner et Vouyovitch, n'a pas osé les maintenir au régime du droit commun.

Depuis dimanche, les militants des Jeunesses communistes sont au régime politique. C'est là le droit strict.

Le juge d'instruction n'a pas encore abordé le fond de l'affaire. Le malheureux n'y tient pas plus que cela. Car je ne le vois pas établissant le crime visé par le mandat de l'arrêt. L'inculpation de complot contre la sûreté de l'État ne tient pas debout. Les propos tenus par di Marchi et Susbachner n'ont rien eu de subversif, ainsi que nous le répétait hier le secrétaire de la conférence Pierre Lainé. La mauvaise foi de l'accusation éclate. Combien de temps va-t-on garder en prison des jeunes gens honorables auxquels on ne peut reprocher qu'une chose : « Être socialistes ». Nous réclamons leur mise en liberté immédiate, qui sera d'ailleurs suivie de leur expulsion.

 

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Le meeting de la « Voix des Femmes »

Une assemblée attentive a écouté hier soir à la Grange-aux-Belles une conférence éminemment éducative de Marcel Cachin sur la situation de la femme dans la république communiste.

Au cours de cette réunion, dans l'organisation fait grand honneur à notre sympathique journal La Voix des Femmes, Louise Bodin et Jeanne Melin exhortèrent les femmes à rejoindre le Parti de la révolution.

Cachin en exposant dans le détail quelle est la condition de la femme mit en lumière cette idée que les bolcheviks ont le parti pris de remplacer l'individualité par des formes collectives d'action.

En Russie, le développement des modes de vie collectifs a permis de faire de la femme l'égale de l'homme au point de vue légal, conjugal, l'a rendue indépendante économiquement et l'a déchargée des soucis absorbants de l'intérieur.

Cachin fut écouté avec beaucoup d'intérêt par les femmes présentes […] applaudi par tous les [assistants].

 

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Le cinquantenaire de Marianne

Le Comité de Défense sociale, ainsi qu'un certain nombre d'organisations populaires d'avant-garde : Fédération ouvrière et paysanne des mutilés, Comité de Défense des Marins, Fédération des Soviets, Fédération anarchiste, Jeunesses anarchistes, Jeunesses syndicalistes, Syndicats minoritaires, Fédération communiste, Sections de l'A.R.A.C, nous communiquent l'appel suivant :

« Le bilan de cinquante années de régime républicain se traduit par l'égorgement de la Commune de Paris, les rapines coloniales, les lois scélérates, la diplomatie secrète, la guerre européenne, 1 700 000 morts, autant de mutilés, 300 milliards de dettes, 50 milliards d'impôts, la vie hors de prix, la guerre hypocrite contre le prolétariat russe et hongrois, la répression féroce contre les meilleurs militants révolutionnaires, les révocations, le chômage, la honte et la misère.

Contre un tel régime, prolétaires, dressez-vous unanimes ! Assistez en masse aux meetings organisés le 11 novembre, à 14 heures. »

Nous publierons ultérieurement la liste des meetings.

 

Centenaire du PCF, au jour le jour : L'Humanité du mardi 9 novembre 1920

 

 

le 08 November 2020

 
 

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« Le bonheur est une idée neuve en Europe. » Saint-Just (révolutionnaire français, 1767-1794)