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Centenaire du PCF, au jour le jour : L'Humanité du mardi 2 novembre 1920

L'Humanité, journal socialiste quotidien

À partir du site internet Gallica, de la Bibliothèque nationale de France

 

L'Humanité du mardi 2 novembre 1920

 

 

La Conférence des Jeunesses décide

par 5 443 mandats contre 1 958

l'adhésion à l'Internationale Communiste

 

Nous regrettons d'être contraints, - vu le peu de place dont nous disposons - à donner un compte rendu abrégé des débats d'hier. Nous sommes réduits à résumer en quelques lignes les interventions de Rella et de Vandomme qui terminèrent la séance de nuit de dimanche.

Rella et Vandomme

Rella expliqua que l'action des Jeunesses est forcément différente suivant que le pays où elle s'exerce est, ou n'est pas, en révolution. En France où la réaction triomphe, c'est à la propagande qu'il faut donner, ses efforts.

Vandomme, au contraire, est d'avis que les Jeunesses doivent entrer dans la lutte. Il a toujours été partisan de l'adhésion du Parti à la IIIe Internationale et cela le conduit tout naturellement à préconiser aujourd'hui l'adhésion à l'Internationale des Jeunes.

Clapaud puis Auclair

À la séance d'hier matin, après que Clapaud (Haute-Vienne) eût indiqué qu'à son estime les Jeunesses doivent accepter les directives du Parti, Auclair (Seine) a la parole.

Il croit que la tache révolutionnaire présente essentielle est non de recruter de gros effectifs, mais de former des chefs instruits et décidés. D'ailleurs, au jour peut-être prochain de la Révolution, il faudra moins de socialistes bourrés de science que de bons ouvriers et de techniciens dévoués.

Discours de Pierre Lainé

Lainé (Seine) tient essentiellement au maintien du statut actuel des Jeunesses. Il attaque « ces intellectuels qui veulent instaurer la dictature du prolétariat et qu'on verra bientôt retourner au conservatisme ».

Il condamne le « noyautage » du Parti, des syndicats et des coopératives qu'on veut donner pour tâche essentielle aux Jeunesses. « Voir des enfants de 16 ans dénoncer les social-traîtres de la C. G. T., s'écrie-t-il, c'est ridicule ! Votre aventure après un fiasco se terminera dans un éclat de rire ! »

Lainé est assuré que les communistes ne seront pas en état d'appliquer leur programme : « Vous ferez des manifestations à quinze ou vingt ! » raille-t-il. Et il termine en disant que ses amis et lui refusent de se lancer « dans des aventures prématurées ».

Laporte et Vandomme concluent le débat

Laporte (Seine) explique que les communistes ne sont pas adversaires des divertissements, mais que ceux-ci ne doivent pas être un mode de recrutement. L'œuvre capitale c'est de donner aux jeunes l'amour du sacrifice. La culture des esprits doit aller avec la pratique de l'action. « On nous trouve ambitieux à l'excès pour les Jeunesses qui sont la partie la plus faible du prolétariat, dit Laporte, mais on oublie que les jeunes sont intéressés plus que tous les autres hommes à l'avenir du prolétariat. »

Vandomme (Seine) expose comment 1! faut appliquer les idées communistes à la situation française. « Ici, dit-il, le mouvement syndical est une réalité. Nous devons respecter son autonomie. La dictature du prolétariat sera réalisée à la fois par l'organisation syndicale et par l'organisme politique. Mais il faut auparavant la rénover, la remplir de socialisme. » Vandomme montre ensuite que le noyautage du Parti et de la C. G. T. est la tâche urgente car « tant que le problème de la IIIe Internationale ne sera pas résolu, il ne sera pas possible d'agir sur la masse. »

Le vote

Après diverses, brèves interventions de Mondard (Gironde), Maréchal (Seine), Dumoulin (Gironde), Goldschild (Seine), Crépin (Nord), Evrard (Pas-de-Calais), Laporte (Seine), on procède au vote. Il y a deux résolutions : Celle de Lainé confirme les statuts actuels et manifeste le désir d'appartenir à une internationale non sectaire et complète. Voici le texte intégral de la résolution de la majorité :

Le Congrès National des Jeunesses socialistes réuni à Paris les 30 octobre et 1er novembre 1920, constatant : que la IIIe Internationale rassemble tous les socialistes révolutionnaires du monde entier ;

Qu'elle répudie tout « socialisme de guerre » passé et futur, méconnaît le mythe que représente la Défense nationale, préconise l'intransigeance révolutionnaire et la dictature du prolétariat par le régime des Conseils des travailleurs se substituant à la fausse démocratie bourgeoise parlementaire, que ce régime peut seul faire triompher la production au bénéfice total du producteur et instaurer le Communisme ;

Constatant, d'autre part, que l'Union Internationale des Jeunesses socialistes a fait faillite au même titre que la IIe Internationale, le Congrès condamne avec force et refuse de s'associer jamais avec les Jeunesses qui, répudiant en 1914 les principes fondamentaux du socialisme en approuvant, de quelque manière que ce soit, la politique dite « d'Union sacrée », continuent deux ans après les hostilités à rester fidèles à leurs erreurs et à collaborer de près ou de loin, consciemment ou inconsciemment, avec la politique des renégats de la lutte sacrée de classe. Elle condamne également les tentatives des Jeunesses jaunes de Noske, d'Allemagne, de Renner, d'Autriche, faites dans le but de reconstruire une Internationale qui serait en complète opposition avec l'Internationale Communiste des Jeunes ;

Le Congrès, conscient de l'idée de lutte de classe qui s'est affirmée dans l'Internationale Communiste des Jeunes ne faisant pas double emploi avec la IIIe Internationale, lui donne son entier appui et son adhésion non conditionnée, comme elle la donne sans réserve aucune à son aînée et approuve pleinement son manifeste et son programme lancé au Congrès international tenue le 25 novembre à Berlin ;

De plus, le Congrès,

Considérant que la division qui s'est affirmée au sein de la Fédération Nationale des Jeunesses Socialistes résulte d'une divergence profonde sur le but et la doctrine ;

Considérant qu'aucune organisation ne saurait exercer d'action révolutionnaire sérieuse et efficace si ses membres sont ainsi divisés sur les principes mêmes de la lutte ;

Affirme que s'il est vrai que tous les communistes ont l'impérieux devoir d'adhérer sans réserve à la IIIe Internationale, il n'en est pas moins évident que seuls les communistes doivent y avoir accès.

En conséquence :

Soucieux de permettre aux éléments révolutionnaires des Jeunesses de France d'adhérer à l'Internationale Communiste des Jeunes, le Congrès pour clarifier définitivement la situation et faire œuvre durable, décide la transformation des Jeunesses Socialistes de France en Fédération Nationale des Jeunesses Socialistes Communistes, et admet pleinement la déclaration et le programma général d'action suivant, qui sera celui de la Fédération ainsi reconstituée.

La résolution communiste obtient 5 443 mandats ; celle de Lainé, 1 958. Il y a 350 abstentions.

Lainé lit ensuite, au nom des 1 958 mandats qui ont voté sa résolution, une déclaration « prenant acte de l'acte d'indiscipline de la majorité qui vient de proclamer l'autonomie des Jeunesses. »

La nomination du comité directeur

La Conférence décide, après cette lecture, de nommer un comité directeur de treize membres et composé seulement de communistes.

La citoyenne Weiziard et les camarades Schaub, Laporte, Auclair, Calman, Vidal, Fégy, Kuntz, Lacrosille, Perche, Pontillon, Vandomme, William sont désignés pour former le comité.

Les suppléants seront Naze, Paratre, Chevalier, Houel, Dériot, Songne.

Le comité de rédaction de l'Avant-Garde est composé de Auclair, Laporte, Pére, Vidal, Pontillon, Vandomme.

La Conférence est terminée vers 19 heures. Le comité directeur se réunira vendredi.

 

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LA VIE REPUBLICAINE

Fritz, secrétaire de l'Internationale des Jeunes, a été expulsé hier

Hier à 9 heures trois quarts, notre camarade Fritz, secrétaire adjoint de l'Internationale des jeunes, se promenait, devant la Bellevilloise en attendant l'ouverture de la conférence des Jeunesses socialistes. Deux hommes s'approchèrent de lui, s'avouèrent inspecteurs de police chargés du service des étrangers, et le prièrent de les suivre au poste.

Quelques heures plus tard, on apprenait par le citoyen Teneveau, qui avait réclamé la mise en liberté de notre ami, que le gouvernement de la République expulsait le camarade Fritz.

Cette mesure qui surprendrait si elle ne répondait pas aux mœurs de notre république, paraîtra scandaleuse à tous les vrais républicains.

Mais n'est-ce pas une manière d'honneur d'être expulsé par les hommes qui hébergent et stipendient les agents des bandes noires de Koltchak !

 

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Pour la Révolution ru​sse

La Commission d'Entente de la C.G.T., du Parti socialiste et de la Ligue des Droits de l'Homme se réunit ce soir

Les pourparlers engagés entre ces trois groupements ont abouti, comme chacun sait, à une entente pour une action en faveur de la Révolution russe et contre la réaction mondiale.

Cette action doit s'engager dès la semaine prochaine et commencer par une série de meetings à travers tout le pays. Ces meetings porteront sur une centaine de villes et cités ouvrières.

Dans le programme prévu, cette agitation se traduira, à Paris, par des réunions qui se tiendront dans les comités intersyndicaux et les villes de banlieue. L'ensemble de cette première agitation sera couronné par des manifestations importantes dans les villes principales comme Paris, Lyon, Marseille, Bordeaux, Lille, etc.

Pour Paris, l'organisation de cette action se fera entre l'Union des Syndicats de la Seine, la Fédération de la Seine du P.S. et les organismes parisiens de la Ligue des Droits de l'Homme.

Pour l'organisation d'ensemble, une commission a été désignée. Elle se compose de Perrot, Dumoulin et Lenoir pour la C.G.T.; Mayéras. Frossard et Bracke, pour le Parti Socialiste ; Guernut, Oustry et Ferdinand Buisson, pour la Ligue des Droits de l'Homme.

Cette commission est chargée de mettre au point un projet de manifeste, de faire imprimer des affiches et de prendre toutes dispositions pour l'organisation des meetings dans lesquels les orateurs des trois groupements devront prendre la parole.

LES MEMBRES DE CETTE COMMISSION SONT INVITÉS À SE REUNIR CE SOIR MÊME, À 5 HEURES, AU SIÈGE DE LA C. G. T., 211, RUE LAFAYETTE.

Ils voudront bien nous excuser de prendre cette initiative, gui se justifie par le peu de temps dont nous disposons.

G. DUMOULIN.

 

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CHEZ LES INDEPENDANTS DE DROITE

Un discours d'Hilferding

CONTRE LA TACTIQUE BOLCHEVISTE

 

Berlin, 27 octobre. - (De notre correspondant particulier.) - Hilferding a prononcé un discours devant les fonctionnaires de la Fédération de Berlin-Brandebourg (indépendants de droite).

Le fond de notre différend avec les communistes, dit-il, vient de ce qu'ils considèrent comme identiques les conditions de la Révolution russe et de la Révolution allemande. La Révolution russe est soutenue par une paysannerie révolutionnaire tant que sa propriété sera menacée par les nobles et les révolutionnaires. Il y a une différence encore plus grande dans la politique de paix de l'Allemagne et de la Russie ; un des mobiles essentiels de la Révolution russe a été le pacifisme qui est apparu, dès la révolution de mars et, finalement a mis les bolcheviks au pouvoir. En Allemagne, l'armistice était signé quand la révolution a éclaté. Si bien qu'elle n'a pas eu ce mobile pacifiste auquel, bien plus qu'à leur organisation, les bolchevistes ont dû leur triomphe.

La tactique à suivre ne se détermine pas du « haut en bas », elle ressort de l'action même des masses qui ont ici le dernier mot à dire. Rosa Luxembourg, à l'époque de la première révolution russe, a déjà montré que le Comité central bolchevik siégeant à l'étranger n'avait aucune idée de la situation, que le mouvement se développait d'une manière tout à fait spontanée et que les Comités centraux aussi bien bolcheviks que mencheviks n'avaient rien d'autre à faire que de se mettre à la suite. Le mouvement paysan, la débâcle de l'armée, ont été aussi des mouvements spontanés. Ainsi la question d'organisation n'a pas du tout en réalité l'importance que les bolcheviks lui ont donnée. Dans les conditions qu'ils nous ont présentées, elle a […] de leur part qu'un artifice pour nous [mener] à la scission qu'ils désiraient.

La psychologie des bolcheviks est devenue peu à peu un culte pur et simple de la force ; c'est ce que montre leur politique opportuniste, particulièrement leur politique agraire et leur politique orientale, où ils se sont alliés aux courants nationalistes sans avoir la moindre attention pour les aspirations prolétariennes de ces pays. De même dans les 21 conditions qu'ils nous ont posées, il ne s'agit pour eux que d'employer le mouvement ouvrier occidental pour leur politique de force, tout comme ils emploient les peuples de l'Orient comme instruments de cette politique.

De puissance à puissance

Les gens de Moscou avaient vu les choses en beau. Avant et pendant son discours, Zinoviev rayonnait de contentement. Après que nous eûmes répondu, il devint pensif et se refusa constamment à la réplique. 11 avait nettement le sentiment de se heurter pour la première fois â une résistance produite par un autre esprit et une autre moralité. En refusant de suivre une méthode qui serait un désastre pour tout le mouvement ouvrier occidental, nous avons infligé aux méthodes moscovites leur première grande défaite. Aussi, bien avant son départ, Zinoviev s'est-il adressé a quelques-uns de nos amis en leur demandant s'ils ne voulaient pas encore causer et en leur disant qu'on leur concéderait peut-être quelque chose. Mais pour qui donc ce Zinoviev prend-il les hommes de confiance du prolétariat allemand ?

Halle nous a donné la certitude que nous ne sommes pas isolés au point de vue international. Le Parti suisse va provoquer une conférence de tous les partis qui sont sortis de la IIe Internationale et veulent adhérer à la IIIe. Il ne s'agit pas ici de fonder une nouvelle Internationale, il s'agit seulement de parler aux Russes, une fois pour toutes, de puissance à puissance. La force du mouvement ouvrier occidental doit être jetée dans la balance.

Les bolcheviks ont rendu au mouvement ouvrier russe le plus mauvais service en divisant les partis occidentaux qui, seuls, pouvaient leur venir en aide. Nous comprenons très bien que les choses ne vont pas assez vite pour les Russes. Dans notre propre intérêt, nous ferons tout ce que nous pourrons pour le maintien et le développement de leur Révolution, mais nous ne voulons pas être les jouets d'une politique de va-tout qui conduirait la classe ouvrière à un désastre. - F. CAUSSY

 

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LE RECUEILLEMENT OF​FICIEL DE M. MILLERAND DEVANT LE MONUMENT AUX MORTS

PEUT=ETRE SONGE-T-IL aux 2 700 soldats innocents, réhabilités en Cassation après avoir été fusillés sur l'ordre des cours martiales qu'il avait illégalement instituées ?...

M. Poincaré devant les tombes - par Daniel RENOULT

On conte qu'un jour, visitant un hôpital du front allemand, Guillaume II eut une défaillance. La vue de toutes les souffrances entassées là lui arracha ce cri : « Je jure que je n'ai pas voulu cela ».

M. Raymond Poincaré, digne complice du Kaiser sanglant, et qui, comme celui-ci, porte la responsabilité et du déchaînement du fléau et surtout de son effroyable prolongation, a plus d'estomac que le Hohenzollern.

La vue des tombes innombrables de ceux qu'il a tant contribué à faire tuer ne lui inspire pas de pensées tristes.

Hier, dans le Matin, en un article que dominait une photographie du cimetière de ce plateau de craonne où, par deux fois, des chefs criminels firent tuer nos soldats par dizaines de milliers, M. Poincaré s'extasiait sur la bonne ordonnance de ces champs sinistres, où les croix de bois s'étendent aussi loin que peut aller le regard. Il admirait « l'alignement impeccable de ces bataillons immobiles qui conservent la rectitude de leurs formations de manœuvres ! »

Ainsi M. Poincaré, contemplant les cimetières du front, leur trouve un aspect qui plaît à ses idées de symétrie et d'ordre, et il se réjouit on son coeur : il est fier de son œuvre.

Il faut signaler ce cynisme de l'homme au cœur sec qui a tout fait pour préparer la guerre, qui n'a rien fait pour la conjurer au moment suprême, et qui ensuite pendant quatre ans et demi, a repoussé toutes les possibilités de paix, prolongé le massacré, accru démesurément le nombre des victimes.

Comment se peut-il que cet homme, qu'à la fin de la guerre, les poilus accueillaient à coups de pierre dans les cantonnements du front, ose tenir un pareil langage, et, par ses paroles brutales et odieuses, insulter à la douleur des familles des 1 700 000 Français qui sont tombés par le crime de sa politique ?

Il faut vraiment que la réaction que nous subissons lui inspire une grande confiance et qu'il s'imagine que le peuple français n'est plus capable désormais du moindre. sentiment de révolte.

S'il est un homme qui devrait se taire, ou qu'on devrait faire taire, le jour dos morts, devant les tombes des martyrs de la guerre impérialiste, n'est-ce pas celui qui plus que tout autre en France est le responsable du massacre ?

M. Poincaré qui, à certains moments a eu peur de la justice populaire, se croit maintenant tout permis. Il a tort. La veulerie qui déshonore la France d'aujourd'hui ne durera pas toujours.

Daniel RENOULT.

 

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Les réformes de M. Le Trocquer - par Marcel CACHIN

La Chambre va être appelée, avant le 31 décembre, à voter une loi modifiant le statut des chemins de fer français. Comment se présente l'opération ?

Toute une campagne de presse est en cours pour préparer l'opinion. Elle est dirigée par le ministère des travaux publics dont le titulaire réactionnaire, M. Le Trocquer, jeta sans pitié à la rue 25 000 honnêtes cheminots, à la suite de la grève de mai.

Avec un semblable patronage, on prévoit de quelle qualité sera la réforme (?) que la Chambre des 120 millionnaires s'apprête à avaliser.

On nous dit d'abord que le déficit des réseaux continue à progresser et qu'il s'élève à 2 milliards pour cette année. Le détail :

P.-L.-M. : 300 millions.

Nord : 400 -

Orléans : 400 -

Etat : 530 -

Est : 280 -

Midi : 170 -

Pour remédier à ce déficit, le gouvernement nous offre de décréter la solidarité financière des six exploitations. On établirait un « fonds commun » alimenté par toutes les compagnies au prorata de l'excédent de leurs recettes sur leurs dépenses.

Les compagnies déficitaires auraient recours à ce fonds commun pour rétablir l'équilibre financier de leur exploitation

Si le fonds commun ne suffisait pas, l'État paierait la différence pendant les deux premières années.

Après la deuxième année, si le déficit se maintenait, les tarifs voyageurs et marchandises seraient relevés.

Telle est l'économie de cette géniale conception du ministre des travaux publics, plus soucieux de garantir les bénéfices des grandes compagnies que de défendre les intérêts de l'État et du public, dont il a la charge.

Le résultat de cette caricature de réforme est en effet lumineux. On aura beau décréter la solidarité des déficits : on n'en fera pas des excédents ! La vérité c'est que l'on n'ose pas relever tout de suite des tarifs déjà fort lourds : et l'on décide alors que la bonne vache à lait de l'État devra verser 2 milliards à ces messieurs des compagnies.

Après cela, dans deux années d'ici, on verra à remettre à flot ce malheureux fonds commun (?) en relevant sérieusement le prix des billets de voyageurs et les tarifs des marchandises. Dans toute l'affaire, le budget de l'État, c'est-à-dire le contribuable, puis les usagers seront chargés de subvenir aux insuffisances des exercices.

Au point de vue financier, l'exploitation sera donc soldée par les ressources publiques. Mais, naturellement, comme il fallait s'y attendre, la gestion sera laissée aux directions capitalistes de l'heure présente. M. Le Trocquer est pour elles d'une prévenance sans limites.

Deux organismes sont, il est vrai, prévus pour le contrôle, l'un dénommé Conseil supérieur des chemins de fer, l'autre Comité de direction.

Pure façade puisque les maîtres des réseaux conservent la haute main sur l'entreprise générale.

Une tentative sera faite par les socialistes pour faire échouer ces scandaleuses propositions d'un gouvernement qui apparaît aussi ingénument comme un simple chargé d'affaires des grandes compagnies. Nous savons quel en sera le résultat. Si nous avions conservé des illusions, la grève de mai nous aurait renseignés de manière décisive. Pour venir à bout des capitalistes des transports, comme de leurs congénères, il est clair que des interpellations, des discours, des arguments et des paroles seront tout à fait insuffisants.

 

Marcel CACHIN.

 

 

 
 
 

Centenaire du PCF, au jour le jour : L'Humanité du mardi 2 novembre 1920

 

le 30 October 2020

 
 

Il y a cent ans : L'Humanité au jour le jour

 
 
« Le bonheur est une idée neuve en Europe. » Saint-Just (révolutionnaire français, 1767-1794)