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Article paru dans la Lettre d'information n° 5 de la LDH Beauvais

Extrait de la Lettre d'information de la LDH Beauvais n° 5 de juillet-août 2018

 

« Salauds de pauvres ! »

de Malik SALEMKOUR, président de la LDH

Le 12 juin 2018, une vidéo diffusée par l'Elysée montrait le président de la République s’exprimer sans retenue sur la pauvreté en France. La citation complète est utile pour apprécier la perception présidentielle du sujet : « On met trop de pognon, on déres-ponsabilise et on est dans le curatif. C’est qu’on doit mieux prévenir, ça nous coûtera moins, et on doit mieux responsabiliser tous Les acteurs. On met un pognon de dingue dans des minima sociaux, les gens sont quand même pauvres… Les gens qui naissent pauvres, ils restent pauvres. Ceux qui tombent pauvres, ils restent pauvres. On doit avoir un truc qui permette aux gens de s’en sortir, par l’éducation. C’est comme ça qu’il faut faire, il faut prévenir la pauvreté. Et responsabiliser les gens pour qu’ils sortent de la pauvreté. »

L’intention est volontairement de faire passer un message officiel après les déclarations le 29 mai de Darmanin, ministre des Comptes publics, qui distinguait deux types d’aides sociales, celles « pour les gens qui sont cassés par la vie », parlant des allocations aux adultes handicapés et du minimum vieillesse, des autres attribuées entre deux périodes d'activité, qui seraient des « trappes à inactivité ».

Sont ainsi mis en cause le RSA (revenu de solidarité active), qui pesait en 2016 11,1 milliards d’euros, pour 1,8 million de foyers bénéficiaires (selon la Cnaf), et l’allocation de solidarité spécifique, accordée à près de 500 000 bénéficiaires, pour un total de 2,7 milliards d’euros.

Cette distinction faite parmi les bénéficiaires des minima sociaux rappelle l’expression « salauds de pauvres ! », rendue célèbre par Coluche dans les années 1980, reprenant la réplique de Jean Gabin dans le film « La Traversée de Paris » de Autant-Lara, en 1956. Il y dénonçait la perception des bourgeois qui n’y voyaient que des fainéants, des profiteurs du système. Dans les termes populaires choisis par le Président, il faudrait les « responsabiliser », pour qu’ils s’en sortent. Voilà donc le retour de l’antienne des assistés, des pauvres responsables de leur situation et qui s’y complaisent.

Or ces minima sociaux sont un devoir de solidarité de la nation envers ses membres les plus fragiles.

Les aides versées par l’État le sont pour assurer un revenu minimal à une personne, ou à sa famille, vivant en situation de précarité, au nom d’une dignité universelle. Il s’agit des chômeurs, de ceux en fin de droit, des salariés précaires très mal payés ou à temps partiel, avec, parmi eux, majoritairement des femmes seules avec enfants.

Ces aides sont au maximum, pour le RSA, de 550,93 € par mois pour une personne seule, 826,39 € par mois pour une personne seule avec un enfant, ou de 494,40 € pour l'allocation de solidarité spécifique. Comment considérer que ce serait trop, pour vivre ! Que ce serait un luxe que la France ne pourrait plus s’offrir !

Le gouvernement doit recevoir prochainement un rapport du Comité action publique 2022 sur les pistes de réductions possibles de l’intervention publique. Ces aides représentent 0,6 % du PIB.

La priorité est-elle là ! Peut-on ainsi précariser plus et sanctionner la misère ! En posant au cœur du débat ces minima sociaux en termes de charges financières, le gouvernement s’inscrit dans une approche purement gestionnaire de la dépense sociale, comme cela a été fait avec la coupe de 5 € des aides personnalisées au logement.

La prévention de la pauvreté est cependant un enjeu majeur qui doit, tous, nous mobiliser. Non en culpabilisant les victimes de la casse sociale et en précarisant l’emploi, mais en responsabilisant tous les acteurs économiques, pour que chacun puisse vivre des fruits de son travail avec un accès à l’emploi sans discrimination, sociale, de sexe ou d’origine. Il est urgent de repenser la nécessaire redistribution des richesses vision ultralibérale actuelle de l’économie laissant de trop nombreuses personnes au bord de la route. Cela passe par l’écoute des partenaires sociaux et des associations dans un dialogue social et civil fort, par l’affirmation des droits fondamentaux sans les réduire à leurs coûts budgétaires, et par une justice sociale qui assure à chacune et chacun une égalité de traitement et une capacité effective de progrès.

 

 

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« Le bonheur est une idée neuve en Europe. » Saint-Just (révolutionnaire français, 1767-1794)